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​Casa malade de ses moyens de transport

Une gestion aléatoire subventionnée pourtant par l’argent du contribuable



Absence totale d’une vision à long terme et un manque flagrant de tout suivi ou contrôle


Hassan Bentaleb
Vendredi 19 Juillet 2019

«La crise du M’dina Bus n’est pas l’affaire de la seule société délégataire, mais elle est également celle de la commune urbaine de Casablanca et du ministère de l’Intérieur ». C’est ce qui ressort de la conférence de presse sur le transport public dans la capitale économique organisée, mardi dernier, par la Fédération de la gauche démocratique (FGD) qui a alerté sur l’absence d’une vision de long terme concernant le secteur du transport urbain en un temps où le contrat liant la ville à M’dina Bus arrivera à terme dans trois mois.    
Concernant la responsabilité de la ville et du département de l’Intérieur, la FGD a constaté que la commission de suivi chargée de contrôler le respect des engagements de la société délégataire ne s’est réunie que deux fois depuis 2004. Idem pour les parties représentant le ministère de l’Intérieur, les collectivités locales et la société délégataire qui se sont réunies une seule fois depuis 2008 alors qu’elles sont censées le faire tous les trois ans afin d’examiner les évolutions en matière d’application du cahier des charges.  
La ville est également responsable du fait qu’elle n’a pas procédé à la construction de passages spéciaux pour les bus et qu’elle a été incapable de concevoir des dispositifs concernant la concurrence des taxis et du transport informel. La ville a également échoué à fixer un tarif permettant un équilibre économique à l’exploitant du contrat de gestion déléguée. La FGD n’a, pourtant, pas trouvé utile d’évoquer la mise en place depuis 2012 du tramway qui a réussi dès le premier mois de son lancement à attirer quotidiennement entre 40.000 et 45.000 usagers. Ce chiffre a augmenté en 2013 à 70.000 usagers quotidiens en moyenne (soit 22 millions de passagers par an) avant d’atteindre les 85.000, soit 30 millions en 2014 et 120.000 une année plus tard, soit 32 millions. En 2017, le tram a transporté plus de 34,6 millions de passagers.
La FDG a, pourtant, souligné le rôle primordial du ministère de l’Intérieur dans la gestion du transport dans la ville puisqu’il a la possibilité de prendre des décisions concernant le soutien financier, d’établir des audits et des rapports sur la gestion déléguée sans oublier le soutien accordé par sa direction des agences et les services délégués aux communes pour la poursuite de la mise en place des contrats de délégation. 
A ce propos, les intervenants lors de la conférence de presse ont indiqué que M’dina Bus qui transporte annuellement 141 millions de personnes et emploie 4.000 salariés, a bénéficié entre 2008 et 2012 de 557 millions de DH de soutien de l’Etat. Elle a précisé qu’il s’agissait d’un soutien destiné à combler son déficit estimé à 200 millions de DH, à lancer des investissements de l’ordre de 165 millions de DH, à soutenir les tarifs scolaires (107 millions de DH), les dépenses des départs volontaires (35 millions de DH) et la mise en place d’un système de réservation des billets (50 millions de DH) ; un système qui n’a d’ailleurs jamais vu le jour. 
La FGD a également révélé que M’dina Bus a failli à son engagement de mobiliser 1.207 bus neufs puisque seulement 866 véhicules ont été en circulation dont 770 bus vétustes. Ces bus ont couvert 75 lignes alors qu’elle s’est engagée à en couvrir 154. Ceci d’autant plus que cette société n’a effectué que 37% des investissements engagés, soit seulement 600 millions de DH des 1,61 milliard de DH promis. Elle s’est même permise des dépenses qui n’ont pas de raison d’être comme celles concernant la location  de deux garages à 6,67 millions de DH par an au lieu de construire son propre garage  avec une enveloppe budgétaire qui n’aurait pas dépassé les 18 millions de DH.  Pis, la société a aussi procédé à des augmentations des prix des billets qui lui auraient rapporté 128 millions de DH alors que le contrat de délégation ne mentionne en aucun cas ces hausses.  Dans son rapport de 2015, la Cour des comptes les avait d’ailleurs considérées comme illégales. 
La détérioration de la qualité des services au sein des bus a conduit les Casablancais à les bouder. Selon la FGD, seuls 13% de ces derniers utilisent les bus contre 20 à 21% au niveau mondial, 62% d’entre eux préfèrent marcher à pied et ceci sur des parcours parfois très longs, 12% utilisent leurs voitures et 9% des taxis.  Selon le Plan des déplacements urbains (PDU), adopté en 2007 et qui est en cours de mise à jour aujourd’hui, les transports en commun ne représentaient alors que 13% des modes de déplacement urbain à Casablanca et, selon la même étude, en l’absence de politique d’amélioration du secteur, ils ne seraient plus que de 11% en 2019.
Cette faible utilisation des transports publics est due, selon les études du PDU, à la faiblesse de l’offre réelle, à une mauvaise couverture des agglomérations et à une qualité de service insuffisante. Ceci d’autant plus que les transports collectifs ne sont pas en adéquation avec la demande de déplacements des populations urbaines.
Il faut également signaler le développement important des déplacements automobiles (parc de 300.000 véhicules en 2001 Vs 1.300.000 en 2014). Ces déplacements (véhicules particuliers et taxis), en forte augmentation, ont compliqué les conditions de circulation aux heures de pointe, menaçant Casablanca d’un véritable engorgement. « En conséquence, l’accès des citoyens aux services et aux activités économiques a été considérablement réduit et les accidents, la pollution  et les autres nuisances ont progressé de manière constante », a conclu le PDU.
 


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