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Le BRA : un maillon faible dans le dispositif de protection des réfugiés
Concernant le BRA qui a pour principale mission de délivrer aux réfugiés reconnus par le HCR une carte de réfugié, ladite Policy Brief constate que « depuis 2004, le fonctionnement du BRA a été marqué par des interruptions répétées. En effet, ses activités ont connu un ralentissement significatif, voire une suspension totale de ses auditions à plusieurs reprises. Son travail a été interrompu entre 2004 et 2013, au cours de l’année 2015, entre 2017 et 2018, et de nouveau en 2020. Bien que le BRA ait repris ses activités en 2022, son fonctionnement reste limité et irrégulier ».
« Les interruptions des activités du BRA, poursuit ledit document, ont des conséquences directes sur les réfugiés reconnus par le HCR. En l’absence d’une carte-BRA, les réfugiés ne peuvent pas demander une carte de résident auprès du service des étrangers de la préfecture de police. Ainsi, le fonctionnement irrégulier du BRA les maintient dans une situation de précarité, en limitant leur accès au marché du travail, au logement, aux services de base et aux autres droits socioéconomiques ».
Et « même si le HCR et ses partenaires mettent en place des initiatives pour faciliter l’intégration des réfugiés et leur accès aux droits, l’absence de carte de séjour les maintient dans une situation de précarité : leurs droits reconnus par la Convention restent difficiles à exercer. De plus, la dépendance vis-à-vis du HCR et de ses partenaires limite l’autonomie des réfugiés. En l’absence de carte de séjour, les réfugiés se retrouvent souvent dans une situation de dépendance constante à l’aide humanitaire, ce qui entrave leur capacité à s’intégrer pleinement dans la société marocaine. Ainsi, sans fonctionnement régulier, le BRA reste un maillon faible dans le dispositif de protection des réfugiés au Maroc », expliquent Younous Arbaoui et Youness Benmouro, les deux chercheurs auteurs de ladite Policy Brief.
Les limites du droit à l’information dans la procédure du HCR
Sur un autre registre, le document de la Clinque Juridique Hijra observe que « la procédure du HCR présente des lacunes notamment en ce qui concerne l’accès à la transcription de l’entretien de détermination du statut de réfugié (DSR) ainsi qu’à l’évaluation DSR, tant en première qu’en deuxième instance. Selon les normes du HCR, « bien que les bureaux du HCR soient encouragés à assurer le plus haut degré de transparence envers les demandeurs d’asile et les réfugiés, l’accès aux informations se trouvant dans leur propre dossier revêt un caractère discrétionnaire». La transmission des transcriptions d’entretiens et des évaluations de la DSR « peut être refusée, ou limitée, dans les cas où leur divulgation pourrait avoir un impact négatif sur soit la sûreté et la sécurité du personnel du HCR ou de ses partenaires, ou soit sur les besoins et priorités opérationnels primordiaux dans la poursuite du mandat du HCR».
Opacité dans la communication de l’évaluation DSR
Ladite Policy Brief rappelle que « le HCR Rabat se retranche derrière ses normes internes pour justifier le non-partage intégral de l’évaluation DSR (Décision sur le Statut de Réfugié) avec les demandeurs d’asile, arguant que la notification sommaire des motifs de rejet suffit ». Pourtant, cette pratique pose un problème majeur de transparence et d’équité procédurale, selon les rédacteurs de ladite Policy Brief. Et de préciser que « bien que les lettres de notification aient été améliorées depuis 2017 sous la pression associative (notamment la PNPM), elles restent insuffisantes : elles ne permettent pas aux demandeurs ni à leurs représentants légaux de saisir pleinement les fondements juridiques et factuels du rejet, compromettant ainsi leur capacité à préparer un recours efficace ».
La PNPM dénonce à juste titre cette restriction comme un frein à l’assistance juridique, privant les demandeurs d’un droit fondamental : celui de connaître précisément les raisons de leur rejet pour y répondre de manière ciblée. Le HCR invoque une « dispense » de partage sans justification claire, ce qui relève d’une logique arbitraire, contraire aux principes de bonne administration.
Des mécanismes de recours défaillants
La procédure de recours devant le HCR est également pointée du doigt. Elle souffre, toujours selon notre source, de plusieurs carences structurelles, à savoir l’absence d’accès à l’évaluation DSR qui empêche toute contestation éclairée ; les décisions en appel ne sont pas motivées, réduisant le recours à une simple formalité bureaucratique et la Commission des recours, prévue par le Décret de 1957, n’est pas opérationnelle, privant les demandeurs d’une voie de contestation supplémentaire.
« Cette triple faille institutionnelle crée une insécurité juridique grave, où les demandeurs d’asile se retrouvent piégés dans un système opaque, sans véritable possibilité de défense », indique ledit document.
En maintenant cette opacité, le HCR Rabat sape les garanties d’une procédure équitable, en bafouant le droit à l’information et en vidant le droit à un recours effectif de sa substance sans parler du fait que l’inaction de la Commission des recours et l’absence de contrôle judiciaire (devant le juge administratif) renforcent l’impunité du système.
Recours auprès du juge administratif : entre garanties théoriques et obstacles pratiques
Bien que la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés ne prévoie pas explicitement un recours judiciaire, elle exige des Etats qu’ils assurent un traitement équitable et un recours effectif en cas de rejet d’une demande d’asile. Cette obligation découle du principe général de protection des droits des réfugiés. Au Maroc, la Constitution renforce cette exigence en garantissant à toute personne l’accès à la justice pour défendre ses droits (article 118). Elle précise également que les décisions administratives, y compris celles concernant l’asile, peuvent être contestées devant les juridictions administratives (article 125).
Cependant, dans la pratique, révèlent Younous Arbaoui et Youness Benmouro, « les demandeurs d’asile se heurtent à un obstacle majeur. En effet, et pour saisir le juge administratif, ils doivent d’abord déposer un recours devant la Commission des recours, une instance prévue par le Décret de 1957 sur le Bureau des Réfugiés et Apatrides. Or, cette commission n’a jamais été mise en place, ce qui rend cette procédure impossible à appliquer ».
En conséquence, concluent-ils, « les demandeurs d’asile dont la demande est rejetée par le HCR se retrouvent sans voie de recours effective, malgré les protections prévues par la Constitution et le droit international. Cette situation crée une incohérence grave entre les engagements juridiques du Maroc et leur application réelle, privant les réfugiés d’un droit fondamental : celui de contester une décision administrative devant un tribunal ».
Hassan Bentaleb