Comme lors du premier examen devant les députés de ce texte qui divise la gauche, le Premier ministre Manuel Valls posait la question de confiance, une arme constitutionnelle qui permet d'éviter un vote.
L'exécutif, très impopulaire, n'entend rien céder sur le fond, et des concessions de dernière minute n'ont pas suffi à ce stade pour désarmer un petit groupe de députés socialistes "frondeurs". Un de leurs chefs de file, Christian Paul, juge "un compromis à portée de main", mais renvoie la balle au gouvernement.
Valls a assuré ces derniers jours, après un nouveau tour de piste des partenaires sociaux, qu'il saurait prendre ses "responsabilités" à l'Assemblée, quitte à passer en force.
Il ne pouvait espérer un vote favorable des élus de droite qui dénoncent un texte vidé de sa substance au fil des mois de fronde. Lors du passage du texte au Sénat où elle est majoritaire, la droite a infléchi le texte dans un sens plus favorable aux revendications patronales (notamment sur le temps de travail hebdomadaire) mais c'est le texte gouvernemental qui est soumis à l'Assemblée nationale pour adoption définitive.
Cette réforme, la dernière d'importance du quinquennat de François Hollande dix mois avant la prochaine élection présidentielle, est censée donner de la fluidité au marché du travail dans un pays où le chômage culmine à 10%. Mais ses détracteurs à gauche la jugent trop favorable aux employeurs au détriment des salariés.
Au cœur de la contestation, une disposition accorde la priorité aux accords d'entreprises sur ceux conclus au niveau des branches professionnelles. Les syndicats réformistes y sont favorables, y voyant des occasions de donner plus de place aux négociations. Mais pas les syndicats contestataires, principalement CGT et FO, majoritaires, dont la culture est façonnée par l'idée de lutte de classes.
Le 28 juin, ils ont encore été 64.000 manifestants selon la police et 200.000 selon les organisateurs à participer à différents défilés organisés en France. Le début des vacances d'été devrait cependant contribuer à rendre les foules plus clairsemées.
Des réunions sont déjà prévues pour la fin de l'été, comme à Nantes (ouest) le 28 août, où la contestation sociale a plusieurs fois pris un tour violent faisant des blessés.
Ce climat a conduit le Parti socialiste à annuler son université d'été prévue dans cette ville à la même date. Ses permanences, ainsi que des locaux syndicaux, ont été récemment vandalisés dans plusieurs villes de France.
Le paysage politique en France a rarement été aussi éclaté. Dans l'opposition, l'ancien président Nicolas Sarkozy, chef du parti Les Républicains, a fait adopter samedi par ses troupes un programme en vue de la présidentielle. Mais ses nombreux rivaux ont fait savoir qu'ils n'étaient pas liés par ses orientations.