Un mime pour sortir le cirque russe de l'ornière soviétique


AFP
Jeudi 18 Juillet 2013

Un mime pour sortir le cirque russe de l'ornière soviétique
Faire entrer le cirque russe dans la modernité en l'extrayant définitivement de l'ère soviétique: c'est le défi en forme de "mission impossible" qu'un célèbre mime s'est promis de relever.
Pour y parvenir, le mime Slava Polounine, détenteur du prestigieux prix Laurence Olivier, va devoir cette fois joindre la parole au geste en redorant le blason du cirque russe, terni depuis plusieurs années.
Son "laboratoire" : le cirque de la Fontanka de Saint-Pétersbourg, une institution en plein déclin qu'il dirige depuis la mi-janvier.
Mais ce nouveau souffle qu'il ambitionne d'insuffler, suscite déjà des remous.
Quelques mois à peine après sa nomination, une centaine des membres du cirque ont appelé à son limogeage, jugeant qu'il ne comprenait pas les traditions et les spécificités du cirque russe.
"Cet homme est incontestablement doué dans son domaine, mais celui-ci est très loin de l'art du cirque", ont-ils écrit dans une lettre adressée au président Vladimir Poutine, où ils ont également estimé que Polounine était un défenseur du style du "Cirque du Soleil".
Cheveu argenté et barbe blanche, Slava Polounine, aujourd'hui âgé de 63 ans, qualifie lui-même davantage son travail de "théâtre" que de "cirque".
Il se voit donc à des années lumières du spectacle mis en scène l'an dernier pour le 135e anniversaire de la vénérable maison dans la plus pure tradition soviétique.
Les spectateurs ont ainsi pu apprécier un homme costumé domptant des lions en cage, des acrobates oeuvrant sur une musique folklorique et des caniches sautillant en file indienne sur leurs pattes arrière.
Pour ajouter à ce manque d'originalité, un scandale a éclaboussé l'institution après qu'un groupe de défense des droits des animaux Vita a diffusé des images de dresseurs frappant un singe et un kangourou en répétition.
Même si la date de tournage de ces images n'a pas été précisée, de nombreuses célébrités comme le cinéaste Alexandre Sokourov ont envoyé une lettre au nouveau directeur dans laquelle ils lui ont demandé d'arrêter les spectacles avec les animaux.
Mais le célèbre cirque Dourov de Moscou a immédiatement réagi, appelant lui à conserver cette pratique qu'il juge traditionnelle du cirque russe.
"Des cas isolés de cruauté ne reflètent pas le tableau complet", a estimé ce cirque.
Des critiques se sont en revanche rangés du côté de Polounine, regrettant cette coloration toujours soviétique des représentations et l'absence d'une nouvelle ligne artistique.
Interrogé par l'AFP, Polounine, qui se targue de n'avoir jamais utilisé d'animaux dans ses spectacles, a indiqué qu'il comptait organiser une table ronde à ce sujet.
Selon lui, le cirque russe a un cruel besoin de renouvellement, aussi bien concernant la teneur de ses spectacles que son édifice.
"Le cirque était à son sommet dans les années 50, maintenant il stagne", a-t-il lancé.
"Nos artistes sont très professionnels, ils sont parmi les meilleurs au monde, mais il y a un manque de mise en scène, de nouvelles idées", a-t-il estimé.
"Je veux garder tout ce qui est bien, je ne veux rien détruire", a-t-il toutefois assuré.
Quant à l'édifice construit en 1877 dans le centre historique de Saint-Pétersbourg, il a perdu de son lustre.
Premier "cirque d'hiver", construit en dur, en Russie, il a été fondé par l'Italien Gaetano Ciniselli. Sa famille l'a dirigé jusqu'à la Révolution bolchévique de 1917. En 1919, il a été nationalisé.
Le nouveau directeur est en effet loin d'être un novice. Dans les années 80, il a fondé sa propre troupe "Litsedeï" à Saint-Pétersbourg avec des spectacles alliant pantomime, tragicomédie et farce.
Après avoir acquis une énorme renommée avec son personnage de clown Assissaï, il a quitté la Russie durant la Perestroïka, à la fin des années 80, pour travailler à l'étranger.
En 1993, il a créé "Le Snowshow", un spectacle féérique, à la croisée du conte, de la magie et du rire, qui a remporté un succès international.
Il a passé notamment des années en France, en Grande-Bretagne et au Canada, où il a travaillé avec le Cirque du Soleil, avant d'être nommé directeur du cirque de Saint-Pétersbourg.
Et de confier avoir réfléchi "cinq minutes avant de dire oui à la proposition qui m'était faite" de prendre la direction de la Fontanka.


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