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Nouvelles appréciées de la littérature arabe Tayeb Salih : Le palmier Oud Hamed (7)Traduit et présenté par Sahraoui Faquihi
Mercredi 20 Août 2014
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Tayeb Salih est un écrivain soudanais né en 1929 à Markaz Marawi dans l’Ach Chamaliyah, au nord du Soudan et mort le 18 février 2009. Il est considéré comme l’un des plus grands écrivains arabes avec Taha Hussein et Naguib Mahfouz. Venant d’un milieu modeste et composé essentiellement par des agriculteurs, il avait l’intention d’aider sa famille dans l’agriculture et pensait faire des études d’agronomie ou travailler dans les champs. Mais le destin en a voulu autrement. Pour lui, il n’aurait jamais écrit s’il n’avait pas quitté son pays. Il poursuit ses études supérieures à l’Université de Khartoum pour les achever à l’université de Londres en Angleterre. Il travaille comme enseignant et rejoint ensuite la section arabe de la BBC à Londres. Ses œuvres ont été traduites dans plus de 30 langues. La plus célèbre est « Saison de la migration vers le nord » qui est considérée comme un chef-d’œuvre de la littérature arabe contemporaine. Il a reçu le prix de la troisième rencontre du Roman arabe. On nous conduisit en prison où nous passâmes un mois. Un jour, les mêmes soldats qui nous avaient emprisonnés, vinrent nous ouvrir les portes. On leur demanda ce qui se passait mais pas un seul ne répondit. Nous trouvâmes cependant toute une foule devant la prison qui, dès qu'elle nous vit, se mit à crier et à s'exclamer. Des personnes avec une chevelure parfumée, des habits propres, et des montres brillantes et dorées nous étreignirent et nous conduisirent au milieu d'un grand cortège jusqu'à chez nous où nous trouvâmes une grande foule, avec des voitures stationnant partout, des chevaux et des chameaux. On se dit alors : " Le tapage de la capitale a atteint donc notre village". On nous demanda de nous mettre en rang, nous les vingt prisonniers. Les membres de la délégation, l’un derrière l’autre, passaient nous serrer la main : le Premier ministre, le président de la Chambre des représentants, le président de la haute Chambre, les conseillers des circonscriptions. On se regardait sans comprendre ce qui se passait autour de nous. Il faut dire que nos bras étaient las à cause de tous ces présidents et conseillers qu'on avait salués. Puis on nous conduisit au milieu d'une foule, là où se trouvaient le palmier et le mausolée. Le Premier ministre posa la première pierre du piédestal, de la dôme et du mur que je t’avais montrés. Et telle une tempête qui souffle un moment avant disparaître tout de suite après, le groupe disparut, sans passer une seule nuit chez nous... On aurait dit ces moucherons qui piquent les vaches qui étaient-à propos- cette année là, aussi gros et épais, aussi bourdonnant et vibrant que l'année où nous avions acceuilli le prêcheur. L’un de ces étrangers que les chemins mènent chez nous, nous raconta plus tard l'histoire de tout ce tintamarre ainsi : "Les gens n'étaient pas satisfaits de ce gouvernement depuis son arrivée au pouvoir. Ils étaient sûrs qu'il n'eut le pouvoir que grâce à l'achat des voix d'un certain nombre de conseillers. Et on attendait l'occasion pour le renverser. L'opposition cherchait comment mettre le feu aux poudres? Lorsqu'on vous emprisonna à cause de cet incident du palmier, la nouvelle fut publiée dans tous les journaux. C'est alors que le président du gouvernement précédent prononça devant le Parlement un discours violent et s’écria: "Ce gouvernement poussa la tyrannie jusqu'à intervenir dans les croyances des gens. Dans tout ce qu'ils ont de plus sacré". Et l'orateur de continuer dans une attitude émouvante, et avec une voix chevrotante: "Posez une question à notre Premier ministre au sujet du palmier Oud Hamed ! Demandez-lui comment il s'est permis d'envoyer ses soldats et ses assistants pour profaner ce lieu chaste et sacré" Cet appel de l'orateur fut répandu dans tout le pays. Et les gens compatissent avec l'incident du palmier comme ils ne l'avaient jamais fait auparavant. Et la cause, semble-t-il, en est que dans chaque région de ce pays existe un marabout qui hante les rêves des gens. Après un mois de tapage, de cris, et d'ardentes émotions, cinquante conseillers furent obligés de retirer leur appui au gouvernement en place. Ils furent avertis par leurs circonscriptions que dans le cas où ils ne se rangeraient pas du côté de l'opposition, ils n'auraient pas à compter sur elle dans l'avenir. Ainsi le gouvernement fut-il renversé et remplacé par le précédent. Le plus grand journal du pays écrit ce jour-là :"Le palmier Oud Hamed est dorénavant le symbole du réveil du peuple!" Depuis, on ne se rendait même pas compte de l'existence du nouveau gouvernement. Depuis, aucun de ces hauts responsables, ces personnes éminentes, qui nous avaient accompagnés ne nous rendit visite. Nous remerciâmes le bon Dieu que notre corvée s’arrêtât au moment où on les avait salués. Notre quotidien reprit son train. Plus de pompe à eau! Plus de projet agricole! plus de port ! On garda notre palmier qui étend son ombre sur le rivage est en début d’après-midi, et sur les champs et les maisons en milieu d'après-midi jusqu'à ce qu'elle atteigne le cimetière la matinée et le fleuve coule à ses pieds semblable à un serpent mythologique, sacré. Alors que le nombre de poteaux en marbre, de murs en fer forgé et de dômes surmontés de croissants dorés augmentait à travers tout le pays. Quand l'homme cessa de raconter, il me regarda, un sourire vague telle la lumière d'un abat-jour se dessina au coin de ses lèvres. Je lui demandai alors :"Et quand vous installerez la pompe à eau, allez-vous lancer le projet agricole et construire le port ?" Il se tut un moment puis il dit: "Le jour où les gens s'endormiront, et qu'ils ne verront plus dans leur rêve le palmier". Et moi de lui redemander: "Et quand cela arrivera-t-il?". Il répondit: "Je t'avais dit que mon fils se trouve dans une école à El Bandar. Ce n'est pas moi qui l’y ai envoyé. Il a fui la maison et y est allé de lui-même. Je prie Dieu qu'il y reste. Le jour où il aura fini ses études et que le nombre de jeunes ayant une âme différente aura augmenté parmi nous, ce jour-là, on installera une pompe à eau, on lancera le projet agricole et peut-être que le bateau s'arrêtera chez nous au pied du palmier ". Je lui demandai : " Crois- tu que le palmier sera coupé un jour ? ". Il me fixa longtemps comme pour me transmettre à travers son regard fatigué ce que les mots ne pouvaient exprimer: "Il ne sera nullement nécessaire de couper le palmier ! Il n'y aura pas de raison de détruire le mausolée ! Ce que personne n'a compris, c'est que les lieux sont assez larges pour contenir aussi bien le palmier et le mausolée, que la pompe à eau et le port. Après un moment de silence, il me regarda d'une manière que je ne peux décrire mais qui suscita en moi cependant une tristesse. Une tristesse à cause de quelque chose de vague que je ne peux déterminer. Il dit: "Tu nous quitteras certainement demain. Quand tu seras chez toi, ne dis pas de mal de nous ! Ne sois pas sévère en nous jugeant».
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