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«Les nouveaux partis sont-ils utiles à la démocratie ?» : A Rabat, des leaders s'inquiètent de l'avenir de la construction démocratique


Narjis Rerhaye
Jeudi 23 Décembre 2010

«La construction démocratique est en danger. La démocratie est menacée.  Ce qui se passe aujourd'hui au Maroc prête à inquiétude ». Ce mardi 21 décembre, dans les locaux de HEM-Rabat, les leaders politiques ont donné libre cours à toutes leurs préoccupations sur l'avenir d'un pays, le nôtre, qui a fait le choix de la démocratie, du progrès et de la modernité.
Dans une libre parole, loin de toute langue de bois, les intervenants -Nabil Benabdallah, le secrétaire général du PPS, Abdelilah Benkirane, le leader du PJD, Habib Belkouch membre fondateur du PAM, Nabila Mounib membre du Bureau politique du PSU, Habib El Malki, membre du Bureau politique de l'USFP et enfin Mohamed Aujjar, membre dirigeant du RNI- ont répondu à la thématique de la conférence annuelle des étudiants de 3ème année de HEM-Rabat.  «Les nouveaux partis sont-ils utiles à la démocratie ?», tel était le questionnement posé par cette conférence organisée par un groupe d'étudiants de 3ème année, une conférence qui a presque fait figure d'événement politique en cette fin d'année 2010,  tant les leaders ont multiplié prises de positions et petites phrases.
L'interrogation a d'évidence interpellé les responsables politiques qui ont fait, ce soir-là,  le déplacement. Dans un devoir d'introspection, ils se sont pour la plupart  interrogés sur le rôle des partis politiques. « Le constat est valable pour tous. Que font aujourd'hui les partis pour faire avancer la démocratie ? Pourquoi l'élite refuse de s'engager ? Et quelles sont les raisons de la désaffection du champ politique ? Il faudrait que nous soyons capables, en tant que partis,  d'apporter des réponses à ces questions qui se posent aujourd'hui avec force. La création du PAM participe justement à cette volonté de réconcilier la société avec la politique », fait valoir Habib Belkouch, un ancien détenu politique devenu membre dirigeant du Parti Authenticité et Modernité.
Les questions sont nombreuses et témoignent de la complexité du sujet. En terre marocaine, la pratique politique est sans cesse défigurée. Les conférenciers -tous des responsables politiques, rompus à la pratique politique- n'ont pas hésité à pointer d'un doigt accusateur ces « créatures électorales » qui investissent le Parlement, l'achat des voix et des consciences sur fond de pression de « mains invisibles » qui entendent faire et défaire d'éphémères et factices alliances. « Il est urgent de tirer la sonnette d'alarme. Et au PPS, nous l'avons tiré le week-end passé lors de la tenue de notre comité central. S'il n'y a pas de sursaut, le Parlement ne sera plus composé que de personnes venues défendre leurs propres intérêts. Des acquis importants ont été réalisés depuis le gouvernement d'alternance. Le Maroc revient de loin.
Les militants se sont battus et ont souffert dans leur chair pour que de tels espaces de débat comme la conférence puissent se tenir en toute liberté. Aujourd'hui, toute cette construction est menacée parce que justement le politique est dévalorisé, dénigré, décrédibilisé. Il ne faut pas se voiler la face. Les événements de Laâyoune, la question de l'intégrité territoriale du pays menacent la stabilité même du pays. La seule réponse possible est la démocratie. Si l'UE a accordé au Maroc le statut avancé dans le partenariat, c'est bien parce que nous faisions figure d'exemple dans la région », explique le secrétaire général du PPS, Nabil Benabdallah.
Un système construit sur la centralité de l'Etat
La démocratisation de l'espace public ainsi que la réhabilitation des institutions ont été parmi les revendications fortes de ces politiques participant à la conférence organisée mardi soir par HEM-Rabat. «Aujourd'hui, la réforme constitutionnelle revêt une importance cruciale. L'instauration de la démocratie, la vraie et sans la moindre spécificité dite marocaine, passe par la séparation des pouvoirs. La justice est au cœur de l'édifice démocratique. Il faut en faire un pouvoir autonome. Nous devons aujourd'hui être en mesure d'ouvrir des débats sur des questions comme la monarchie parlementaire ou encore la laïcité », soutient Nabila Mounib, l'une des dirigeantes du PSU, tout en mettant en exergue « ces deux fondamentalismes qui ont pris corps au Maroc, le fondamentalisme de l'Etat et celui des mouvements islamistes ».
Et en attendant la séparation des pouvoirs, une sorte de distribution des rôles semble s'être installée dans le pays. C'est ce que fait remarquer l'Usfpéiste  Habib  El Malki qui a choisi de convoquer l'Histoire pour mieux comprendre la situation politique qui prévaut chez nous. « Notre système est construit sur l'hyper-centralité d'un Etat qui prend toutes les décisions et en face il y a les partis ou plus exactement leur émiettement. Difficile pour les politiques d'exister dans de tels cas ! », s'exclame cet Usfpéiste en vue. Les choses avancent doucement. Des reculs sont observés. Habib El Malki l'affirme sans ambages : le monde de la politique est en crise mais c'est dans l'alliance et l'unité que la démocratie peut être irréversible. « Aucune réforme ne peut aboutir sans une alliance solide. C'est pourquoi le cadre de la Koutla, même si aujourd'hui elle est agonisante- est plus que jamais important. La Koutla  peut même être élargie aux forces qui  ont cette volonté de réformer le Maroc, » précise-t-il.
Laisser les partis remplir leur rôle
Que les institutions remplissent leur rôle, telle est la démocratie. Aux yeux du RNI, l'institution du gouvernement est en bien mauvais état et ne procède pas exactement de la pratique démocratique. « Où est le Premier ministre ? Pourquoi s'est-il fait porter pâle lors des événements de Laâyoune ? On a distribué des lots de terrains aux manifestants. Pourquoi Hjira, le ministre de l'Habitat, était absent de cette opération?» Les questions de Mohamed Aujjar, l'ancien ministre des Droits de l'Homme et membre dirigeant du Rassemblement national des indépendants, dérangent. Elles dérangent d'autant plus que le RNI est l'un des principaux partis de la coalition gouvernementale…
« Il faut laisser les partis faire leur travail librement. Il faut les laisser faire leurs alliances librement. Il faut arrêter de les combattre ». C'est un véritable cri de colère que le patron des islamistes du Parlement, Abdelilah Benkirane, a poussé. Invoquant  la bataille des mairies de Tanger et d'Oujda,  ce leader a livré le difficile vécu politique d'un parti comme le PJD. « Il faut arrêter de présenter ce parti comme une menace, et justifier la création d'un nouveau parti pour contrecarrer les islamistes. Arrêtons!» a renchéri N. Benabdallah avant de conclure que les acquis du Maroc ont été possibles grâce aux combats des forces vives de ce pays. « Il est dangereux de présenter la monarchie comme le seul acteur dynamique. La rencontre de la monarchie avec les forces vives est des plus heureuses et permet à notre pays d'avancer ». 


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