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Introduction : Une diplomatie sans ancrage territorial peut-elle convaincre ?
Dans un contexte international instable, où l’influence se construit autant par la négociation que par l’image projetée, la diplomatie marocaine s’est imposée comme un levier stratégique de rayonnement. Sous l’impulsion de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, le Royaume a multiplié les initiatives audacieuses, consolidant sa présence en Afrique, en Europe, au Moyen-Orient et au sein des grands forums internationaux.
Ce dynamisme est souvent salué comme l’un des rares domaines où le Maroc brille. Mais à mesure que s’étend l’influence extérieure, les failles du développement intérieur deviennent plus visibles : disparités territoriales criantes, précarité sociale persistante, désillusion de la jeunesse. Ce contraste soulève une interrogation centrale : peut-on espérer une diplomatie forte sans justice territoriale, ni cohésion sociale ?
Cette question s'impose dès lors que l'on sait que la diplomatie moderne ne peut plus se résumer à un exercice de représentation. Elle doit s’ancrer dans la réalité du pays, refléter la crédibilité de ses choix, la solidité de ses institutions, et surtout la confiance de son peuple. A défaut, le risque est grand de voir le discours international perdre toute portée, faute d’appui sur un socle national cohérent, équitable et durable.
Diplomatie et développement : un tandem stratégique ou un vœu pieux?
Aujourd’hui, diplomatie et développement sont indissociables. La diplomatie est devenue un outil de création de valeur, de partenariats et de coopération. Le développement, quant à lui, dépasse le cadre économique pour inclure les droits sociaux, la justice territoriale et la durabilité. Mais comment crédibiliser un discours diplomatique si les réalités internes ne suivent pas ? L’efficacité du plaidoyer marocain dépend de cette articulation concrète entre l’image projetée et les réformes réelles.
Leadership Royal : Un moteur diplomatique à transformer en levier de développement
La diplomatie marocaine s’est redéployée ces deux décennies grâce à une vision Royale fondée sur l’anticipation, la coopération Sud-Sud et la défense des intérêts stratégiques. Le dossier du Sahara, la politique africaine, les positions sur la migration ou le climat, et récemment l’organisation de la Coupe du monde 2030, illustrent cette diplomatie proactive. Mais pour transformer cette impulsion en levier de développement inclusif, il faut une mobilisation coordonnée de l’appareil administratif, des collectivités territoriales et des institutions publiques.
Complémentarité entre diplomatie officielle et diplomaties parallèles: un enjeu de cohérence nationale
La diplomatie marocaine s'appuie sur deux piliers essentiels : la diplomatie officielle menée par le ministère des Affaires étrangères, les ambassades et les services consulaires, et les diplomaties parallèles portées par les partis politiques, les groupes parlementaires, les ONG, ou encore la diaspora. Cette complémentarité peut renforcer l’influence du Maroc à l’international, à condition qu’elle soit structurée et coordonnée. Dans ce cadre, l'Union socialiste des forces populaires (USFP) a fait de son positionnement au sein de l’Internationale socialiste, réseau mondial regroupant les partis socialistes et démocratiques de cinq continents, une plateforme pour expliquer et faire valoir le point de vue du Maroc sur un ensemble de sujets. Cette présence continue et influente a permis à l'USFP justement d'obtenir un soutien explicite de plusieurs partis de gauche à la solution politique prônée par l’Etat marocain pour régler le conflit autour du Sahara. C'est un exemple probant de diplomatie politique efficace, capable de renforcer la voix officielle du Royaume sur la scène internationale.
Plaidoyer économique : Sans justice territoriale, pas d’attractivité durable
La compétition internationale impose au Maroc de renforcer son attractivité. Les centres régionaux d’investissement et les ambassades jouent un rôle de plus en plus actif. Mais le discours d’excellence ne peut masquer les inégalités territoriales.
Comment convaincre un investisseur d’implanter une unité industrielle dans une région sans routes, ni hôpitaux, ni universités? La décentralisation doit devenir une arme diplomatique. Il faut accorder aux régions les moyens de promouvoir leurs projets, leurs talents, et leurs filières, à travers la coopération décentralisée et la participation aux foires et forums internationaux.
Des failles systémiques qui minent la crédibilité diplomatique
Plusieurs défis freinent encore l’impact du plaidoyer marocain. Le manque de coordination entre institutions, la faiblesse des compétences spécialisées dans des domaines clés (climat, numérique, santé globale) et l’absence d’indicateurs d’évaluation en sont des exemples criants. A cela s’ajoute un déficit dans la formation continue des diplomates et un retard de l’information nationale dans les espaces numériques mondiaux. Par ailleurs, la diaspora marocaine, qui pourrait être un vecteur puissant d’influence, reste sous-utilisée.
De la diplomatie événementielle à une stratégie cohérente et inclusive
Il ne suffit plus d’avoir un agenda diplomatique actif. Il faut que ce dernier soit ancré dans une stratégie de développement cohérente, territorialisée et inclusive. La diplomatie doit porter une vision : celle d’un Maroc solidaire, équitable, innovant. Cela suppose un alignement entre le discours extérieur et les réformes intérieures. Sans justice sociale, sans accès à la santé et à l’éducation pour tous, sans égalité des chances, le discours du Maroc moderne reste incomplet.
Conclusion : Une diplomatie au service du réel, pas d’un récit déconnecté
La diplomatie ne peut être efficace que si elle repose sur un socle de crédibilité. Et cette crédibilité ne se décrète pas : elle se construit à partir d’une réalité nationale cohérente, équitable et inclusive. Tant que les fractures sociales s’élargissent, que des territoires entiers restent à la marge et que la jeunesse se sent abandonnée, aucun discours international ne suffira à compenser le déficit de confiance intérieure.
Le Maroc dispose d’une vision stratégique, souvent saluée sur la scène mondiale. Mais cette vision reste inachevée si elle ne s’incarne pas dans les politiques publiques concrètes et dans un développement réparti équitablement entre les régions. Il est temps de sortir d’une logique d’apparence, de vitrine, pour entrer dans celle de la performance territoriale, de l’écoute citoyenne et de la justice sociale.
La véritable influence extérieure d’un pays se mesure à la solidité de ses fondations internes. Ce n’est ni le protocole, ni les podiums diplomatiques qui garantissent la place d’un Etat dans le concert des nations, mais la capacité à offrir à ses citoyens une vie digne, stable et pleine d’avenir. Influencer à l’extérieur exige aujourd’hui, plus que jamais, de transformer l’intérieur. Car dans l’avenir, le développement n’est plus une option stratégique. Il est une condition de souveraineté.
Par Mohamed Assouali
Membre de la Commission nationale d’arbitrage et d’éthique