Le combat soutenu de l’USFP contre les dérives de l’expropriation : Mettre fin à des abus insoutenables

Réparer l’injustice foncière


Mehdi Ouassat
Mercredi 11 Juin 2025

Le combat soutenu de l’USFP contre les dérives de l’expropriation : Mettre fin à des abus insoutenables
Il y a des lois qui, sans faire de bruit, écrasent des vies. Des articles juridiques aux formulations techniques qui, sur le terrain, deviennent les instruments d’injustices profondes. L’article 40 de la Loi n° 7-81 relative à l’expropriation pour cause d’utilité publique et à l’occupation temporaire en fait partie. Et c’est pour en finir avec ces abus, devenus presque structurels, que l’USFP monte aujourd’hui au front, en déposant une proposition de loi courageuse, claire et absolument nécessaire.

Un constat d’échec

Dans «Rissalat Al Ittihad», l’USFP dénonce sans ambiguïté les conséquences délétères de l’article 40 dans sa forme actuelle. Le parti y affirme que cet article « ouvre de larges brèches à une exploitation illégitime du pouvoir d’expropriation ». Les faits sont là : de nombreux terrains sont saisis au nom de projets d’utilité publique… qui ne verront jamais le jour. Et une fois l’expropriation accomplie, le bien est abandonné ou revendu aux enchères. Pour l’USFP, cela revient à détourner l’essence même de la loi : «Le principe d’utilité publique devient un prétexte juridique pour des pratiques dénuées de justice et de transparence, en violation de l’esprit et des dispositions explicites de la Constitution».

Ce n’est pas une critique isolée. C’est un retour d’expérience, ancré dans les réalités de milliers de familles marocaines qui ont vu leurs biens confisqués, sans compensation réelle, sans perspective de projet et sans possibilité de récupérer ce qui leur appartenait légitimement. L’USFP s’en fait le porte-voix: «Ce que propose notre groupe parlementaire n’est ni théorique ni politicien. C’est une expression sincère de la souffrance réelle de milliers de familles marocaines qui ont perdu leurs propriétés sans jamais voir naître le projet annoncé, et sans avoir pu récupérer leurs biens à cause de délais trop courts, de conditions injustes, voire de complicités soigneusement dissimulées».

Une réforme de fond

La proposition de l’USFP repose sur un principe clair : l’intérêt général ne peut être invoqué sans garde-fous. Le parti réclame ainsi que l’administration expropriante ne puisse revendre le bien avant un délai de cinq ans. Ce délai est capital. Il permet de s’assurer que le projet public est réellement mis en œuvre. Et surtout, il offre une fenêtre de justice aux expropriés.

Car pendant ces cinq années, le propriétaire initial pourra récupérer son bien – au même prix – à condition de régler le montant dans un délai d’un an. C’est une avancée majeure par rapport au régime actuel, qui impose un délai irréaliste de vingt jours. L’USFP affirme sans ambiguïté: «Ce que nous proposons vise à établir un équilibre raisonnable entre le droit de l’Etat à servir l’intérêt public et le droit du citoyen à la protection de sa propriété face à l’abus administratif».

Ce n’est pas une attaque contre le pouvoir public. C’est une exigence de justice. L’USFP reste fidèle à sa tradition démocratique : défendre l’Etat, mais un Etat responsable, transparent, au service de tous, non au service de quelques-uns.

Contre la spéculation déguisée

Dans des termes d’une  franchise sans équivoque, le billet de l’USFP dénonce une réalité trop souvent étouffée dans le discours institutionnel. Le processus d’expropriation, loin d’être un instrument neutre, est parfois devenu une filière parallèle de spéculation. Le parti parle sans détour de «l’absurdité de la spéculation publique», dans laquelle «les biens expropriés deviennent des trophées dans un marché de prédation foncière, alors qu’ils devraient être des leviers de développement équitable». On ne peut pas dire les choses plus clairement.

L’Etat ne peut pas se substituer aux acteurs privés du marché foncier. Il ne peut pas utiliser la loi pour acquérir un terrain à bas prix au nom d’un projet public, puis le revendre comme un bien ordinaire sur le marché libre. Ce mécanisme pervertit la finalité de l’expropriation,  crée une rupture de confiance entre l’État et le citoyen et alimente une méfiance croissante à l’égard des institutions.

La dignité comme socle

Ce qui traverse tout le texte de Rissalat Al Ittihad, c’est une vision profondément humaine du droit de propriété. L’USFP rappelle que «la propriété n’est pas seulement un droit civil ; elle est un prolongement de la dignité, une source de sécurité sociale, un moyen de vie digne». En d’autres termes, toucher à la propriété, c’est toucher à l’existence même des citoyens. Ce droit n’est pas un privilège, mais un fondement de la stabilité individuelle et collective.

C’est pourquoi toute réforme dans ce domaine doit être équilibrée, transparente et dégagée de toute logique de domination administrative ou d’avidité foncière. L’USFP ne propose pas ici une réforme technique, mais une refonte de la philosophie même de l’action publique.
 
Sortir des calculs politiciens

Enfin, l’USFP en appelle à la responsabilité des forces politiques représentées au Parlement. Le parti invite chacun à s’élever au-dessus des logiques partisanes pour répondre à une question qui touche à la stabilité juridique, économique et morale du pays. «Nous appelons toutes les composantes de l’institution législative à traiter cette proposition avec un esprit de responsabilité nationale, loin des calculs partisans étroits», peut-on lire dans Rissalat Al Ittihad. L’objectif n’est pas seulement d’amender une loi, mais d’initier une refondation. Ce que porte cette proposition, c’est bien plus qu’un ajustement ponctuel : c’est une mise en garde contre l’inertie, un acte de rupture avec la gestion administrative désincarnée, une volonté de replacer l’humain, le citoyen concret, au cœur du droit. Autrement dit, il ne s’agit pas uniquement de corriger un texte, mais de réparer un déséquilibre qui a été institutionnalisé trop longtemps.

C’est dans cette perspective que Rissalat Al Ittihad fixe une ligne claire : «Que cette réforme soit le point de départ d’un chantier plus vaste de refonte du système d’expropriation, qui place le citoyen au centre des priorités, tout en préservant à l’Etat sa légitimité et son autorité, sans jamais transformer la loi en une arme braquée contre les plus faibles». Cette phrase n’est pas une formule. C’est un cap politique. Elle trace les contours d’un projet de société, fondé sur l’équilibre entre pouvoir public et droits fondamentaux, sur la confiance entre Etat et citoyen.

Car il s’agit bien, au fond, d’une question de confiance. L’expropriation, quand elle est menée dans l’ombre, sans contrôle ni obligation de résultat, mine le lien entre les citoyens et l’État. Elle nourrit le sentiment d’injustice, alimente la défiance, fragilise la cohésion entre l’Etat et la société. Elle transforme la loi en source de peur plutôt qu’en garantie d’équité. En redonnant au citoyen le droit de regard sur ce qui lui a été retiré, en encadrant la durée et les conditions de cession du bien exproprié, l’USFP propose une architecture nouvelle de la relation entre individu et Etat : non plus verticale et unilatérale, mais fondée sur la réciprocité et la responsabilité.

La réforme de l’article 40 n’est donc pas un simple débat technique. Elle est une pierre angulaire. Elle permet de repenser la place de la propriété dans le pacte social marocain. Elle oblige à interroger la finalité de l’action publique. Et surtout, elle appelle à restaurer un principe trop souvent relégué : celui de l’équité, ce levier discret mais fondamental de toute société réellement démocratique.

En ce sens, l’USFP reste fidèle à lui-même : parti des équilibres, parti des principes, parti des droits. Et s’il défend aujourd’hui une réforme aussi capitale, ce n’est pas par posture, mais par conviction. Par fidélité à une idée simple, mais décisive : aucune société ne peut construire son avenir en sacrifiant les droits de ses citoyens.

Mehdi Ouassat


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