L’économie marocaine a-t-elle encore un visage humain ?


Mohamed ASSOUALI
Jeudi 31 Juillet 2025

L’économie marocaine a-t-elle encore un visage humain ?
Dans un contexte économique et social de plus en plus tendu, le discours du Trône du 29 juillet 2025 a rappelé avec clarté que le développement n’a de sens que s’il touche concrètement la vie des citoyens.
 
Une volonté royale qui interpelle et un parti qui assume

Le Souverain a tracé un cap en affirmant que le Maroc à deux vitesses n’a pas sa place, ni aujourd’hui ni demain. Cet appel à replacer l’humain au cœur des politiques publiques rejoint, dans son essence, le combat historique de l’Union Socialiste des Forces Populaires, qui milite depuis des décennies pour un État social fort, garantissant à chaque citoyenne et citoyen, où qu’il vive sur le territoire, un accès équitable aux droits, aux ressources et aux opportunités. Face à la montée des inégalités, à la précarisation des classes moyennes et à la détérioration des services publics, nous devons nous poser une question simple mais essentielle : l’économie marocaine a-t-elle encore un visage humain ?
 
Une croissance froide, déconnectée du réel

Aujourd’hui, l’économie semble tourner, mais sans son peuple. Sur les graphiques, les indicateurs sont encourageants. Mais dans les foyers, c’est une autre réalité : les chiffres avancent, les profits aussi, mais les visages se ferment. Le pouvoir d’achat s’effondre, le chômage grimpe, les prix flambent, et les services publics s’effritent. Ce n’est plus simplement une affaire de croissance, c’est une question de justice. Car à quoi sert un PIB en hausse, si le citoyen s’enfonce dans la précarité et l’angoisse quotidienne ? Le gouvernement actuel, pourtant fort d’une majorité absolue, avait tous les moyens pour impulser une transformation sociale ambitieuse. Il avait la légitimité pour faire du social une priorité nationale. Mais il a préféré la gestion froide, comptable, technocratique, sans âme ni élan, vidant les institutions de leur souffle démocratique et renonçant à construire un modèle inclusif.
 
Quand les chiffres masquent les souffrances

Les conséquences de ce choix sont visibles et brutales : un taux de chômage de 13,2 % au niveau national, qui atteint 33 % chez les jeunes et 41 % chez les femmes rurales ; une dette publique qui avoisine les 1.160 milliards de dirhams, soit plus de 71% du PIB, sans impact social significatif ni effet d’entraînement sur l’emploi ou les services de proximité ; un taux de remplissage des barrages à peine à 29%, malgré les milliards annoncés pour le plan national de l’eau ; une inflation alimentaire dépassant 11,5% sur six mois. Dans ce tableau déjà préoccupant, 54,8% des familles marocaines déclarent vivre avec des revenus insuffisants pour couvrir leurs besoins essentiels, de même que 40,6% s’endettent ou puisent dans leurs économies pour survivre. Ces chiffres ne sont pas abstraits. Ils traduisent une réalité quotidienne faite d’inquiétude, de renoncements et parfois de colère sourde.
 
L’humain effacé des politiques publiques

Derrière les pourcentages, il y a des enfants mal scolarisés, des mères qui comptent chaque dirham, des jeunes qui perdent foi en l’avenir. Ce n’est pas un débat de technocrates : c’est une fracture sociale qui s’élargit sous nos yeux. Les inégalités se creusent, et les territoires ruraux manquent toujours d’eau, de soins de santé, d’accès à des services de base. Un Maroc à deux vitesses est en train de s’installer, et avec lui, le risque d’un déclassement silencieux mais profond.
 
Un tournant imposé par la parole royale

Le discours royal de 2025 est venu rappeler avec force qu’il n’y aura de développement réel que s’il améliore concrètement la vie des citoyens. Ce sursaut appelle à un recentrage profond des priorités : remettre l’humain au centre des politiques, réconcilier l’économique avec le social, relier l’investissement à la dignité. Il ne peut plus y avoir de territoires oubliés, ni de catégories abandonnées. Ce message royal rejoint les fondements mêmes du projet porté par l’Union Socialiste des Forces Populaires.

Un projet d’économie sociale, juste et solidaire

Fidèle à sa tradition progressiste, l’USFP n’a cessé de porter une vision économique alternative, fondée sur la solidarité, l’équité et la responsabilité. Nos propositions sont claires et immédiatement applicables : une réforme fiscale ambitieuse qui allège la pression sur les classes moyennes et fait contribuer davantage les grandes fortunes ; un investissement massif dans les secteurs vitaux que sont l’éducation, la santé, le logement et l’accès à l’eau, en priorité dans les zones les plus délaissées ; une protection sociale universelle, fondée sur des droits clairs, sans clientélisme ni barrières administratives ; une politique économique qui rompt avec la rente, soutient l’innovation et encourage l’entrepreneuriat citoyen ; et, surtout, l’exigence de transparence, de responsabilité et de reddition des comptes dans la gestion des finances et des marchés publics.

Des propositions concrètes pour un État social fort

Parmi nos mesures phares figure la mise en place d’un contrat d’insertion territorialisé pour les jeunes diplômés, visant à intégrer 100 000 jeunes par an dans les services publics locaux, les collectivités territoriales et les coopératives, pour répondre à la fois au fléau du chômage et aux besoins des territoires.
 
Une constance politique face au déni gouvernemental

Cette vision n’est pas conjoncturelle. Elle s’inscrit dans une continuité politique et éthique. Dès 2020, dans notre contribution au nouveau modèle de développement, nous écrivions : « Pas de développement sans justice, pas d’économie sans dignité, pas de stabilité sans protection sociale. » En 2023, notre Conseil national lançait un avertissement clair : « Le pays court à la crise sociale si les inégalités persistent. » Aujourd’hui, ces alertes prennent tout leur sens. La société civile, les syndicats, les collectifs de jeunes diplômés, les associations de consommateurs... tous réclament un tournant. Le temps du silence technocratique est révolu.
 
Le Congrès national : une promesse de rupture

Le 12ᵉ Congrès national de l’USFP ne sera pas une simple échéance organisationnelle. Il sera un moment fort de refondation politique et sociale, un rendez-vous avec la nation, une occasion de redonner du sens à l’action publique, de renouer avec les attentes citoyennes, et de proposer un nouveau contrat social, fondé sur l’équité, la transparence, la solidarité et l’égalité des chances.
 
Redonner un visage humain à l’économie

Car au fond, l’économie ne vaut que si elle soulage. Les chiffres ne servent à rien s’ils ne remplissent pas une assiette, ne soignent pas un malade, ne protègent pas une famille. Comme l’a dit Sa Majesté le Roi : « Le succès économique ne doit pas être réservé à une minorité, mais partagé par tous. » Nous ne voulons pas d’un pays où les chiffres brillent tandis que les visages s’assombrissent. Nous voulons un Maroc où chaque région compte, où chaque voix pèse, où chaque citoyen a droit à la dignité. Notre combat est aussi celui de la jeunesse, pour qu’un jeune Marocain croie encore que ses rêves ont une place ici, chez lui, et pour que le Maroc de demain ne soit pas un mirage, mais une promesse tenue. Ce Maroc-là, nous le construirons. Ensemble. Et sans détour.

Par Mohamed Assouali
Secrétaire provincial de l’Union Socialiste des Forces Populaires – Tétouan


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