Driss Lachguar : Les récentes catastrophes à Safi et à Fès ont révélé l’incapacité gouvernementale à passer d'une logique de gestion circonstancielle à une logique de prévention et d'anticipation

Driss Lachguar dans un entretien avec Al3omk


Mourad Tabet
Lundi 22 Décembre 2025

Driss Lachguar : Les récentes catastrophes à Safi et à Fès ont révélé l’incapacité gouvernementale à passer d'une logique de gestion circonstancielle à une logique de prévention et d'anticipation
Dans un contexte marqué par les récentes inondations dévastatrices à Safi et l’effondrement de deux immeubles à Fès, qui ont causé des pertes en vies humaines, le Premier secrétaire de l’USFP, Driss Lachguar, a lancé une critique acerbe contre la gestion gouvernementale lors d’un  entretien accordé vendredi dernier à  Al3omk.

Driss Lachguar a déclaré que ces catastrophes ont révélé de manière criante les limites de l’action gouvernementale et son incapacité à passer d'une logique de gestion circonstancielle à une logique de prévention et d'anticipation, imputant au gouvernement la responsabilité politique pleine et entière des pertes en vies humaines causées par les inondations.

Il a précisé que la responsabilité de protéger les citoyens et de gérer les investissements publics incombe à l'exécutif, tandis que celle de l'opposition consiste à tirer les sonnettes d’alarme, à contrôler l’action du gouvernement et à proposer des alternatives.

Le dirigeant ittihadi a insisté sur le fait que ces événements ne relèvent ni du destin imprévu ni d'accidents isolés, mais d'un manque flagrant de volonté de mettre en application les recommandations d’études établies depuis des années.

Selon lui, imputer à l'opposition la responsabilité des faits à Safi ou Fès constitue une tromperie de l'opinion publique, car l’opposition ne gère pas les budgets de l'Etat ni supervise les projets d'infrastructure.

Driss Lachguar a souligné que les catastrophes naturelles, notamment les inondations, ne sont pas imprévisibles, des études scientifiques ayant identifié depuis longtemps les zones vulnérables. Il a évoqué l'exemple de la région de Setti Fatma, où des mesures préventives comme les stations d'alarme précoce ont permis d'éviter la répétition de drames.

Il a également mis l’accent sur le fait que restaurer la confiance dans la politique passe par la clarification des responsabilités, en premier lieu celle du gouvernement en matière de protection des vies et de prévention des catastrophes, en liant le discours à la pratique et en rompant avec l'instrumentalisation opportuniste des événements. Il a estimé que le véritable enjeu réside dans la construction de politiques publiques anticipatrices et justes, faisant de la dignité du citoyen le cœur de l'action politique.

Driss Lachguar a par ailleurs mis en garde contre la persistance de l’hégémonisme gouvernemental, qui vide le Parlement de ses rôles de contrôle et de législation, et consacre une logique de domination, appelant à faire des échéances électorales de 2026 une opportunité pour restaurer l'équilibre institutionnel.

Il a évoqué son expérience antérieure en tant que ministre chargé des Relations avec le Parlement, indiquant qu'il avait alors alerté sur le danger de transformer les séances de questions parlementaires en tribunes populistes ou en espaces de règlement de comptes, considérant que cela contribue à ternir l'image de l'institution législative et à approfondir la crise de confiance des citoyens.

Il a rappelé que le Maroc a besoin d'un véritable équilibre institutionnel, mettant en garde contre la reproduction d'une logique d’hégémonisme, et insistant sur le fait qu'il est impossible de compenser ce qu'il a qualifié d’hégémonisme gouvernemental du PJD par celui de la majorité actuelle dirigée par Aziz Akhannouch.

Le dirigeant ittihadi a également critiqué ce qu'il considère comme une instrumentalisation politique des mécanismes constitutionnels, dont tout le monde connaît les limites dans le contexte des équilibres parlementaires actuels, insistant sur le fait que ce comportement nuit au travail démocratique et mine la confiance des citoyens dans les institutions.

Concernant la rupture de la coordination avec le PPS, Driss Lachguar a relevé que le désaccord n'était pas sur la motion de censure, mais lié à la manière de gérer cette étape, entre ceux qui la voient comme une mesure circonstancielle et ceux qui défendent la construction d'une alliance politique stratégique fondée sur une vision claire et le partage des rôles.

Il a ajouté que l’USFP ne peut consentir des concessions affectant sa position institutionnelle, notamment la présidence de la Commission de justice, de législation et des droits de l’Homme, estimant que l'évaluation de la performance du parti au sein de cette commission doit s'appuyer sur des données chiffrées, des textes légaux et des résultats concrets, et non sur des impressions ou des accusations toutes faites.

En réponse aux critiques prétendant un affaiblissement de la voix de l’USFP au Parlement sur des dossiers majeurs, comme celui des marchés de médicaments, Driss Lachguar a considéré ces accusations comme imprécises, invitant, pour se rendre compte du rôle important joué par l’USFP au sein du Parlement, à se référer aux interventions du président du Groupe socialiste-Opposition ittihadie, à la Chambre des représentants Abderrahim Chahid, et aux positions du Groupe parlementaire de l’USFP à la Chambre des conseillers.

Quant à la demande de formation de commissions d'enquête, il a qualifié le recours à cette procédure sans réunir les conditions légales d’« absurdité politique », notant que brandir ce slogan tout en sachant l’impossibilité de le mettre en application constitue une tromperie de l'opinion publique, faute de nombre suffisant de signatures au sein de l'opposition.

Par ailleurs, le Premier secrétaire de l’USFP a précisé que la relation entre le parti de la Rose et le PJD relève d’un différend de fond sur les références idéologiques et la vision de l’Etat, et non d’une simple rivalité conjoncturelle ou électorale.

Il a affirmé que l’USFP ne peut s’allier à un parti qu’il accuse d’avoir vidé le Parlement de ses rôles constitutionnels et de l’avoir transformé en espace de surenchère et de populisme, tout en refusant par là même un mode de fonctionnement qui, selon lui, a exploité les institutions au lieu de les renforcer et affaibli l’opposition au détriment de l’équilibre démocratique.

Pour lui, les convergences ponctuelles de vote sur des textes liés à la démocratie, aux libertés, aux droits humains ou à certaines lois sociales ne signifient ni alliance ni normalisation politique avec le PJD, car le désaccord de référence reste profond, notamment sur la question des droits des femmes, qu’il considère comme centrale dans le projet de l’USFP et incompatible avec la vision défendue par le PJD.

Mourad Tabet


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