Harvey Weinstein de retour au tribunal




Stromae : Le succès rend amnésique


Propos recueillis par Danaé Pol
Jeudi 5 Juin 2014

Stromae : Le succès rend amnésique
Le jeune homme au physique atypique monte sur la scène 
de l’OLM Souissi et une fois n’est pas coutume à Mawazine, l’artiste arrive à l’heure attendue. Il entonne ses grands titres
de l’album « Racine carrée » alors que le public  chante 
à gorge déployée. L’artiste sautille, galope et danse avec 
une énergie défiant toute concurrence entraînant 
les festivaliers dans l’eurphorie.
Ses entrées sur scène sont toutes charismatiques: 
de la statue humaine du papa figé de «Papaoutai»
au déguisement de Charlie Chaplin pour 
le tube « Carmen »,  Stromae sait user de son originalité 
et de ses multiples talents artistiques grâce à d’inouïs 
surprises au public marocain: une interprétation de 
«Tous les mêmes» a capella mais également un 
«Alors on shtah» qui a déchaîné les Rbatis.
Sur scène, Stromae semble extraverti et déjanté et pourtant, 
il est tout autre au quotidien et nous laisse découvrir 
un jeune homme timide et attachant. Il confie à Libé 
sa réelle timidité, malgré le fait de ´complètement 
assumer ses mises en scène. 
Entretien
 
Libé : Est-ce votre première fois au Maroc?
 
Stromae : Je suis déjà venu au Maroc dans le cadre du Marrakech du rire  et une deuxième fois de manière un peu plus touristique mais c’était assez court. Je suis heureux d’être ici et impressionné par l’ampleur de l’événement.
 
Vos textes sont très engagés. N’avez-vous pas peur que vos paroles s’effacent derrière ces mélodies festives?
 
Je n’ai pas peur que le message soit dilué, car je n’ai pas forcément de message à passer.  Le public peut entendre mes chansons sans prendre en compte le sens. C’est l’avantage de ce métier car dès qu’on a fait une chanson, elle ne nous appartient plus et cela est très intéressant.
 
Qu’en est-il de votre interprétation de Papaoutai?
 
Je ne le vois pas interprété d’une autre façon qu’en Papa figé. J’ai trouvé que c’était la manière la plus honnête de représenter le père, entre fantasme, distance et autorité.
 
Ressentez-vous une pression particulière de la part du public marocain?
 
La routine peut s’installer lors des tournées, quand on ne passe pas plus d’une journée dans le pays. Ici, cela fait trois jours que je suis sur le territoire, donc il y a une sorte de montée de pression quand on reste un peu plus longtemps dans le pays. Il y a incontestablement une grosse pression mais j’essaye de la repousser le plus possible.
 
Vous considérez-vous comme moralisateur?
 
Il est vrai que j’ai un côté un peu moralisateur et paternaliste. J’en discutais avec Orelsan qui m’a confié qu’il remarque une sorte de morale dans mes chansons. Peut-être est-ce dû à une éducation catholique ; j’ai une espèce de bonne conscience. Je ne suis pas très rebelle, enfin, ma rébellion s’exprime dans des choses minimes.
 
Vous faites des choix artistiques audacieux que ce soit au niveau de l’expression corporelle, des chorégraphies ou des costumes. Est-ce un style difficile à assumer?
 
En fonction de l’éducation et du caractère, mes projets peuvent paraître osés ou pas du tout. Vestimentairement parlant, je suis un peu engagé mais sinon je n’ai pas l’impression d’être choquant ; je suis quand même très lisse. Etre déguisé moitié homme moitié femme, ce n’est pas ce qu’il y a de plus déplacé ou de faussement bourré non plus. Enfin, cela dépend vraiment des gens. Ce style n’est pas vraiment difficile à assumer. Je suis plutôt timide dans la vraie vie mais quand il s’agit de me mettre en scène et de faire l’imbécile, j’assume complètement.
 
Est-ce que votre renommée est difficile à gérer?
 
Je ne peux qu’être reconnaissant dans ce succès. Après je grince un peu des dents quand ça empiète sur ma vie privée. Je suis une personne pudique et j’ai besoin de retourner chez moi au calme pour me dire que tout va bien dans ma tête. C’est super d’avoir autant d’attentions mais c’est tout ce qu’il y a de plus anti-humain. C’est l’extraordinaire dans le sens premier du terme. Pour contrebalancer, il faut beaucoup de solitude, c’est-à-dire j’ai besoin de soigner l’attention qu’on me porte avec de la solitude et je n’en ai pas beaucoup avec la tournée. C’est sûr que c’est beaucoup d’attention. Ça m’affecte, et ça ne me rend pas forcément plus intelligent.
 
Beaucoup de vos chansons ont fait le buzz. Qui se trouve derrière votre stratégie de communication?
 
C’est comme si c’était une grosse boîte de marketing ou de communication, alors que ce n’est pas du tout le cas. Dans l’équipe, il y a mon petit frère, une styliste et des graphistes...  Et nous n’avons jamais engagé de boîte de communication. Pour « Formidable », l’idée était tirée de ces hommes alcooliques qui transpirent l’extrême sincérité. On a puisé dans les journaux « Le roi du buzz »  alors que ce n’était pas du tout le but. Je voulais seulement créer et changer, faire quelque chose de différent.  Le succès rend amnésique : on ne se souvient que des buzz alors il y a beaucoup de chansons qui n’ont pas fonctionné. 


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