Cette place n’est qu’un vaste cimetière pour des morts-vivants... accepteriez-vous de continuer à jouer ce rôle ? Vous êtes considérés comme de bonnes gens, vous vous en remettez à la volonté de Dieu. C'est en votre nom que le bon Dieu est vénéré, discrètement ou à haute voix pour tous les biens et faveurs qu'il nous prodigue. Accepteriez-vous de vivre misérables sur une terre riche et généreuse?
Selon la version de Sahlab Ibnou Mahlab, qui lui-même racontait la version de Zentah, fils de Kalil Al Afrah (le malheureux) :
"Si un Arabe s'arrache à ses beaux rêves, et qu’il se réveille, qu'il prend au petit déjeuner un sevré de deux ans, qu'il patiente jusqu’à l’après-midi pour manger 44 poules rôties au beurre et boire deux outres de vin et qu'il meurt après s’être endormi sous les rayons solaires, il rencontrera le bon Dieu rassasié, ivre et désaltéré.
Quant à vous misérables, vous répondez à ce que Abi Redaa raconte, selon la version de Termidi:
«Le meilleur de ma nation est ce qui vient au début et à la fin. Son milieu c'est de la lie». Vous êtes ce milieu trouble». La clameur s'éleva :
«Cette tête coupée dépasse les limites. Nous sommes heureux dans notre misère.
Pourquoi réveille-t-elle les afflictions, et aggrave-t-elle les blessures ? Où sont les mouchards des autorités locales? Pourquoi n'informent-ils pas les responsables de ce fauteur de troubles?»
Un autre lui coupa la parole avec assurance :
«On lui donne le temps de vider ce qu'il a sur le cœur. Et pour savoir également si son discours est personnel, ou dicté par une force extérieure».
Une autre voix s'éleva:
"Mais il n'a pas peur ! On lui a tranché le cou ; pourtant il dit haut des choses vraies ! Lui au moins, il ne ment pas !".
Je roulai au milieu de la halka (foule) souriant, satisfait, en examinant les visages.
J'ai secoué les gens, provoqué la discussion et amené le public à prêter l'oreille à des airs étranges. Soudain, la foule s'écarta pour laisser passer un filet tenu par une grande barre soutenue par deux pompiers entourés de policiers. Je ris à gorge déployée en regardant le filet s'abattre sur moi d'en haut. Je ne tentai ni d'y échapper, ni de résister. Ils furent étonnés que je ne réagisse pas. Les cris s'élevèrent. L'incident devint grave ! Ils restèrent longtemps perplexes tout en se consultant. J'entendis le responsable de l'opération dire:
«Ne le touchez pas de la main ! Il se peut qu'il porte des produits empoisonnés ou des explosifs. Mettez-le dans la cage pour le transporter au tribunal !»
Je fus extasié alors que je regardai à travers la cage en fer transportée sur les épaules des pompiers. La foule bougea pour suivre le cortège. La police se mit à la menacer. Je criai à perdre la voix :
«Adieu ! Rappelez-vous les paroles de Sahlab Ibnou Mahlab ! -Revendiquez votre droit à la viande de mouton, au poulet, au bon vin et au sexe qui détend. Osez interroger et vous interroger!» Les voix répétaient dans un bruit de tonnerre :
"Laissez-le parler! On n’a rien à reprocher à celui qui ne fait que parler ! Sa halka est bien réussie ! Depuis quand le Makhzen craint-il la parole?".
Je dis avant de disparaître à l'intérieur d'un grand véhicule:
«Exiger à ce que le procès soit public !» Mohamed Berrada est l'un des plus grands écrivains contemporains du Maroc. Il est né à Rabat en 1938. Après avoir obtenu sa
licence en littérature arabe à l'Université du Caire,
il exerça le métier
d'enseignant à la Faculté des lettres de Rabat, puis
à celle de Fès, tout en
assurant la présidence de l’Union des écrivains du Maroc pendant plusieurs années. Il a publié de
nombreuses œuvres,
notamment «Mohamed Mandour et la théorie de la critique arabe» (essai), «L'équarrissage», (recueil de nouvelles), « Le jeu de l'oubli » et «La lumière
filante » (romans), sans oublier ses nombreuses traductions dont «Le degré zéro de l'écriture» de
Roland Barthes et «Le
discours narratif» de Bakhtine.
Parmi ses meilleures
nouvelles, «La tête
coupée», parue dans le supplément culturel du journal Al Moharrir, au cours des années 70, et son recueil «L'équarrissage».
Cette place n’est qu’un vaste cimetière pour des morts-vivants... accepteriez-vous de continuer à jouer ce rôle ? Vous êtes considérés comme de bonnes gens, vous vous en remettez à la volonté de Dieu. C'est en votre nom que le bon Dieu est vénéré, discrètement ou à haute voix pour tous les biens et faveurs qu'il nous prodigue. Accepteriez-vous de vivre misérables sur une terre riche et généreuse?
Selon la version de Sahlab Ibnou Mahlab, qui lui-même racontait la version de Zentah, fils de Kalil Al Afrah (le malheureux) :
"Si un Arabe s'arrache à ses beaux rêves, et qu’il se réveille, qu'il prend au petit déjeuner un sevré de deux ans, qu'il patiente jusqu’à l’après-midi pour manger 44 poules rôties au beurre et boire deux outres de vin et qu'il meurt après s’être endormi sous les rayons solaires, il rencontrera le bon Dieu rassasié, ivre et désaltéré.
Quant à vous misérables, vous répondez à ce que Abi Redaa raconte, selon la version de Termidi:
«Le meilleur de ma nation est ce qui vient au début et à la fin. Son milieu c'est de la lie». Vous êtes ce milieu trouble». La clameur s'éleva :
«Cette tête coupée dépasse les limites. Nous sommes heureux dans notre misère.
Pourquoi réveille-t-elle les afflictions, et aggrave-t-elle les blessures ? Où sont les mouchards des autorités locales? Pourquoi n'informent-ils pas les responsables de ce fauteur de troubles?»
Un autre lui coupa la parole avec assurance :
«On lui donne le temps de vider ce qu'il a sur le cœur. Et pour savoir également si son discours est personnel, ou dicté par une force extérieure».
Une autre voix s'éleva:
"Mais il n'a pas peur ! On lui a tranché le cou ; pourtant il dit haut des choses vraies ! Lui au moins, il ne ment pas !".
Je roulai au milieu de la halka (foule) souriant, satisfait, en examinant les visages.
J'ai secoué les gens, provoqué la discussion et amené le public à prêter l'oreille à des airs étranges. Soudain, la foule s'écarta pour laisser passer un filet tenu par une grande barre soutenue par deux pompiers entourés de policiers. Je ris à gorge déployée en regardant le filet s'abattre sur moi d'en haut. Je ne tentai ni d'y échapper, ni de résister. Ils furent étonnés que je ne réagisse pas. Les cris s'élevèrent. L'incident devint grave ! Ils restèrent longtemps perplexes tout en se consultant. J'entendis le responsable de l'opération dire:
«Ne le touchez pas de la main ! Il se peut qu'il porte des produits empoisonnés ou des explosifs. Mettez-le dans la cage pour le transporter au tribunal !»
Je fus extasié alors que je regardai à travers la cage en fer transportée sur les épaules des pompiers. La foule bougea pour suivre le cortège. La police se mit à la menacer. Je criai à perdre la voix :
«Adieu ! Rappelez-vous les paroles de Sahlab Ibnou Mahlab ! -Revendiquez votre droit à la viande de mouton, au poulet, au bon vin et au sexe qui détend. Osez interroger et vous interroger!» Les voix répétaient dans un bruit de tonnerre :
"Laissez-le parler! On n’a rien à reprocher à celui qui ne fait que parler ! Sa halka est bien réussie ! Depuis quand le Makhzen craint-il la parole?".
Je dis avant de disparaître à l'intérieur d'un grand véhicule:
«Exiger à ce que le procès soit public !»Mohamed Berrada est l'un des plus grands écrivains contemporains du Maroc. Il est né à Rabat en 1938. Après avoir obtenu sa
licence en littérature arabe à l'Université du Caire,
il exerça le métier
d'enseignant à la Faculté des lettres de Rabat, puis
à celle de Fès, tout en
assurant la présidence de l’Union des écrivains du Maroc pendant plusieurs années. Il a publié de
nombreuses œuvres,
notamment «Mohamed Mandour et la théorie de la critique arabe» (essai), «L'équarrissage», (recueil de nouvelles), « Le jeu de l'oubli » et «La lumière
filante » (romans), sans oublier ses nombreuses traductions dont «Le degré zéro de l'écriture» de
Roland Barthes et «Le
discours narratif» de Bakhtine.
Parmi ses meilleures
nouvelles, «La tête
coupée», parue dans le supplément culturel du journal Al Moharrir, au cours des années 70, et son recueil «L'équarrissage».
Cette place n’est qu’un vaste cimetière pour des morts-vivants... accepteriez-vous de continuer à jouer ce rôle ? Vous êtes considérés comme de bonnes gens, vous vous en remettez à la volonté de Dieu. C'est en votre nom que le bon Dieu est vénéré, discrètement ou à haute voix pour tous les biens et faveurs qu'il nous prodigue. Accepteriez-vous de vivre misérables sur une terre riche et généreuse?
Selon la version de Sahlab Ibnou Mahlab, qui lui-même racontait la version de Zentah, fils de Kalil Al Afrah (le malheureux) :
"Si un Arabe s'arrache à ses beaux rêves, et qu’il se réveille, qu'il prend au petit déjeuner un sevré de deux ans, qu'il patiente jusqu’à l’après-midi pour manger 44 poules rôties au beurre et boire deux outres de vin et qu'il meurt après s’être endormi sous les rayons solaires, il rencontrera le bon Dieu rassasié, ivre et désaltéré.
Quant à vous misérables, vous répondez à ce que Abi Redaa raconte, selon la version de Termidi:
«Le meilleur de ma nation est ce qui vient au début et à la fin. Son milieu c'est de la lie». Vous êtes ce milieu trouble». La clameur s'éleva :
«Cette tête coupée dépasse les limites. Nous sommes heureux dans notre misère.
Pourquoi réveille-t-elle les afflictions, et aggrave-t-elle les blessures ? Où sont les mouchards des autorités locales? Pourquoi n'informent-ils pas les responsables de ce fauteur de troubles?»
Un autre lui coupa la parole avec assurance :
«On lui donne le temps de vider ce qu'il a sur le cœur. Et pour savoir également si son discours est personnel, ou dicté par une force extérieure».
Une autre voix s'éleva:
"Mais il n'a pas peur ! On lui a tranché le cou ; pourtant il dit haut des choses vraies ! Lui au moins, il ne ment pas !".
Je roulai au milieu de la halka (foule) souriant, satisfait, en examinant les visages.
J'ai secoué les gens, provoqué la discussion et amené le public à prêter l'oreille à des airs étranges. Soudain, la foule s'écarta pour laisser passer un filet tenu par une grande barre soutenue par deux pompiers entourés de policiers. Je ris à gorge déployée en regardant le filet s'abattre sur moi d'en haut. Je ne tentai ni d'y échapper, ni de résister. Ils furent étonnés que je ne réagisse pas. Les cris s'élevèrent. L'incident devint grave ! Ils restèrent longtemps perplexes tout en se consultant. J'entendis le responsable de l'opération dire:
«Ne le touchez pas de la main ! Il se peut qu'il porte des produits empoisonnés ou des explosifs. Mettez-le dans la cage pour le transporter au tribunal !»
Je fus extasié alors que je regardai à travers la cage en fer transportée sur les épaules des pompiers. La foule bougea pour suivre le cortège. La police se mit à la menacer. Je criai à perdre la voix :
«Adieu ! Rappelez-vous les paroles de Sahlab Ibnou Mahlab ! -Revendiquez votre droit à la viande de mouton, au poulet, au bon vin et au sexe qui détend. Osez interroger et vous interroger!» Les voix répétaient dans un bruit de tonnerre :
"Laissez-le parler! On n’a rien à reprocher à celui qui ne fait que parler ! Sa halka est bien réussie ! Depuis quand le Makhzen craint-il la parole?".
Je dis avant de disparaître à l'intérieur d'un grand véhicule:
«Exiger à ce que le procès soit public !»