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Sous la Coupole, Abdelilah Benkirane s’est donc prêté à l’exercice, bon gré, mal gré. Les droits des femmes ne sont vraisemblablement pas le sujet où le chef du gouvernement est le plus à l’aise. L’orateur champion de la communication démagogique et populiste qu’il sait être, a tout d’un coup cédé la place au leader islamiste aux idées ultra-conservatrices. «Je n’oblige personne à me croire. Je tiens mes promesses dans la mesure du possible. Mais sachez bien que l’égalité et la parité ont des règles. Il n’y a pas si longtemps, il n’y avait qu’une seule femme au Parlement. Une seule Marocaine a signé le Manifeste de l’Indépendance. Tout cela doit venir progressivement. Il faut aussi savoir prendre le temps de la réflexion». Interpellé sur la situation des femmes au Maroc et le bilan du gouvernement en matière de promotion des droits des Marocaines et de lutte contre la violence faite aux femmes, Abdelilah Benkirane a botté en touche, le dérapage au bout de la langue, donnant libre cours à sa vision, forcément conservatrice et rétrograde, de la condition féminine.
A l’évidence et après une année au pouvoir, le chef du gouvernement et son Exécutif ne sont pas pressés. La promotion des droits des femmes, la protection des Marocaines contre les violences conjugales, le mariage des mineures, celui des victimes avec leurs violeurs, l’accès de la moitié de la société aux centres de décision et autres postes de responsabilité ne sont pas visiblement une urgence. Pour le gouvernement conservateur, les priorités sont ailleurs. «Oui, M. Benkirane, l’un de vos ministres a bien affirmé que la lutte contre la violence à l’encontre des femmes ne constituait pas une priorité pour votre gouvernement. C’est bien pourquoi le groupe parlementaire socialiste en coordination avec les groupes de l’opposition ont programmé, à l’occasion de cette séance mensuelle, la thématique de la politique gouvernementale pour lutter contre la violence familiale. Nous vous posons aujourd’hui cette question pour que vous nous répondiez précisément en présentant le bilan de votre gouvernement en la matière. Un bilan qui semble des plus maigres alors que les instituions relatives aux femmes prévues par la nouvelle Constitution tardent à voir le jour. Assez de paroles, nous voulons des actes et des actions concrètes. Nous réclamons par exemple une loi cadre contre la violence à l’encontre des femmes. Dites-nous comment et quand un tel texte sera promulgué», s’est exclamée la députée usfpéiste Rachida Benmessaoud en s’adressant à Abdelilah Benkirane.
«Ikram» en lieu et place
de l’agenda pour l’égalité
Le chef du gouvernement n’a pas tenu ses promesses. Pas de remaniement ministériel à l’horizon. Bassima Haqqaoui restera –pour longtemps encore ?- la seule femme du gouvernement. Les nominations aux postes de responsabilité ne prendront pas, non plus, en considération les règles de l’égalité ou tout au moins celles du genre. « Pas de ma faute », dira en substance celui qui conduit pourtant le gouvernement et sa politique. Aux dernières nominations de consuls, de walis et gouverneurs, se défendra Abdelilah Benkirane, ses ministres des Affaires étrangères et de l’Intérieur ont voulu privilégier les compétences de leurs administrations respectives…
Que fait le gouvernement pour que l’égalité ne soit plus seulement un slogan, un concept, un mot échappé d’une Constitution flambant neuve ? M. Benkirane parlera bien d’un plan d’action « Ikram » pour l’égalité que comptent lancer Bassima Haqqaoui et ses équipes, omettant de rappeler que cette stratégie a bel et bien été léguée par le gouvernement précédent et l’ancienne ministre Nouzha Skalli sous l’appellation plus universelle (et donc plus rassurante) d’agenda pour l’égalité.
Et c’est bien au principe de l’égalité que le chef du gouvernement n’hésitera pas à tordre le cou ce lundi 24 décembre, sous la coupole et face aux élus du peuple. «Ecoute-moi, M. El Ouafa. Je te demande de ne plus muter les jeunes femmes enseignantes dans les zones éloignées et enclavées. Envois les hommes. La place de ces femmes est auprès de leurs parents. C’est là que leur dignité sera préservée. Elles doivent être à l’abri. Et j’assume cette responsabilité», lancera-t-il au ministre de l’Education nationale, lequel avait bien du mal à cacher sa surprise devant cette étrange directive prenant allure de loi anti-constitutionnelle.
«Où est passé le numéro vert qui avait été mis en place par le gouvernement d’Abbas El Fassi et pourquoi la campagne nationale de lutte contre la violence faite aux femmes qui est organisée depuis dix ans tous les mois de novembre n’a pas eu lieu?», s’est interrogée avec inquiétude l’ancienne ministre de gauche en charge de la Famille, devenue députée. Attendu fortement sur la question de la violence dont sont victimes les femmes de ce pays, le chef du gouvernement a bien du mal à croire aux chiffres. «Soyons sérieux. Nous n’avons pas 60% de femmes violentées au Maroc ! Sinon cela voudra dire que vous aussi, les femmes députées, vous êtes victimes de violence». Dans les travées de l’opposition, les protestations font rage. Des députées rappellent à Abdelilah Benkirane que les violences verbales aussi constituent une forme de violence. «Mais les femmes se rendent elles aussi coupables de violences verbales», dira-t-il du haut de la tribune comme pour mieux justifier l’injustifiable…
