L’avenir appartient à la jeunesse…

Au coeur de la politique, pas à sa périphérie


Mohamed Assouali
Vendredi 31 Octobre 2025

A l’approche des élections législatives de 2026, la question de la place des jeunes dans la vie politique refait surface avec insistance. Nombreuses sont en effet les interrogations qui ont été soulevées à cet effet. Mais la seule qui vaille pour le moment est de savoir si en ouvrant la voie aux candidatures indépendantes aux prochaines échéances électorales, on  va réussir à concilier les jeunes avec les institutions élues et à les rendre plus intéressés, à supposer qu'ils ne le sont, à leur manière,  par la politique. Est-ce ainsi qu'on pourra rajeunir la scène politique, ou ne faudra-t-il pas renforcer les partis comme véritables viviers où l'on apprend le débat politique, en les incitant à s'ouvrir davantage sur les jeunes?

Derrière le discours séduisant du renouvellement générationnel se joue une bataille bien plus profonde: celle de la crédibilité du politique et de la survie même de la démocratie marocaine. Car l’avenir ne se construira pas sur les marges du système, mais en son centre, là où se décide le destin collectif du pays.

La jeunesse au cœur du débat démocratique

Le débat autour de la représentation des jeunes est devenu révélateur du rapport du Maroc à la démocratie. L’idée d’autoriser davantage de candidats de moins de 35 ans, sans appartenance politique, paraît progressiste. Pourtant, derrière l’argument de la modernisation se cache souvent une stratégie subtile : celle d’une reconfiguration politique maîtrisée d’en haut, visant à redessiner la carte électorale sous couvert de rajeunissement. Cette ambiguïté traduit une contradiction fondamentale : on ne peut pas prétendre moderniser la démocratie tout en marginalisant les cadres qui en assurent la cohérence, à commencer par les partis politiques.

L’illusion des indépendants: la jeunesse sans boussole

Présenter la jeunesse comme un acteur autonome, indépendant des structures partisanes, c’est flatter une illusion dangereuse: celle d’une indépendance politique désincarnée. La politique sans organisation, c’est la dispersion, et la démocratie sans partis, un corps sans âme. Les jeunes ne manquent ni de compétence ni de volonté, mais ils ont besoin d’espaces structurants d’apprentissage, de débat et de responsabilité. Les candidatures indépendantes, sans vision collective ni ancrage idéologique, ne peuvent produire ni réforme profonde ni pensée durable. Le risque est grand de voir émerger une génération d’élus sans repères, sans projet et sans racines, utilisés comme symboles d’ouverture alors qu’ils deviennent, malgré eux, les instruments d’un système qui les dépasse. Derrière la façade du renouvellement, se profile ainsi le danger d’une dépolitisation organisée, où la jeunesse devient vitrine démocratique plutôt qu’actrice du changement.

Un système politique suspendu entre volonté et verticalité

Depuis plusieurs années, la démocratie marocaine oscille entre la volonté proclamée de réforme et la réalité d’une gestion verticale du politique. L’Etat affiche son ambition de moderniser la vie démocratique, mais les partis historiques peinent à remplir leur mission d’encadrement et de mobilisation, affaiblis par la défiance citoyenne et la centralisation excessive. Ce déséquilibre laisse un vide que comblent les réseaux d’argent, les notabilités locales et la communication opportuniste. Le résultat est une scène politique désarticulée où les institutions fonctionnent, mais sans véritable vie démocratique interne, et où la jeunesse se sent spectatrice plus qu’actrice. Le véritable défi n’est donc pas d’ouvrir la porte à des candidatures indépendantes, mais de réconcilier l’Etat et la société à travers le renforcement de la médiation partisane, seul espace capable de transformer l’énergie citoyenne en engagement structuré.

2021: supprimer sans reconstruire, l’erreur symbolique

La suppression  de la liste nationale des jeunes lors des élections de 2021 fut un tournant symbolique. Au lieu d’améliorer le dispositif pour qu’il serve la formation et le mérite, on l’a purement supprimé, comme si le problème venait des jeunes eux-mêmes plutôt que du manque de vision politique. Ce choix a envoyé un signal négatif : celui d’un désengagement de l’Etat vis-à-vis de la participation structurée de la jeunesse. L’enjeu, aujourd’hui, n’est pas de ressusciter une liste, mais de reconstruire un véritable parcours politique de la jeunesse, fondé sur la formation, la responsabilisation et l’accompagnement au sein des partis. C’est dans ces structures que s’acquièrent la culture démocratique, la discipline collective et la conscience nationale.

L’argent électoral: le nouveau pouvoir sans légitimité

La crise du politique ne se limite pas à la question générationnelle. Chaque fois que les partis reculent, le pouvoir de l’argent avance. La compétition électorale s’est progressivement transformée en marché où les convictions s’effacent devant les moyens financiers. Comment un jeune indépendant, sans réseau ni soutien institutionnel, pourrait-il rivaliser avec des candidats disposant de ressources importantes ou de l’appui de puissants relais? La lutte contre l’argent électoral n’est pas une question technique, mais un combat moral et politique pour la dignité du citoyen et la souveraineté du vote. C’est pourquoi la transparence financière et la régulation des campagnes doivent être au cœur de toute réforme électorale. Les jeunes ne veulent pas acheter leur légitimité, ils veulent la conquérir par leurs idées, leur mérite et leur engagement collectif.

L’Union socialiste: des solutions concrètes, pas des slogans

Dans ce contexte, l’Union socialiste des forces populaires ne se contente pas d’un constat critique. Elle avance des propositions concrètes pour refonder la confiance entre la jeunesse et la politique : la création d’une autorité nationale indépendante de supervision des élections, l’inscription automatique des jeunes atteignant la majorité, le conditionnement du financement public des partis à la représentativité des jeunes et des femmes, et l’encadrement de l’usage de l’intelligence artificielle dans les campagnes pour éviter la manipulation numérique. Ces propositions traduisent une conviction claire : la démocratie ne se met pas en scène, elle se construit dans la transparence, la rigueur et l’équité.

Les leçons du passé: éviter les partis fabriqués d’en haut

L’histoire politique du Maroc nous met en garde contre les illusions répétées. Les expériences des décennies passées — de la FDIC des années 60 au RNI des années 70, en passant par l’Union constitutionnelle des années 80 — ont montré que les formations nées d’en haut, sans légitimité populaire, affaiblissent le pluralisme et dévitalisent la démocratie. Reproduire ce modèle reviendrait à institutionnaliser la dépendance politique et à étouffer l’esprit critique. Le Maroc n’a pas besoin de nouveaux partis fabriqués, mais de partis rénovés, enracinés dans la société et portés par une jeunesse consciente et courageuse.

La renaissance politique passera par la jeunesse organisée

Le futur appartient à la jeunesse, certes, mais à une jeunesse organisée, formée et consciente de sa responsabilité historique. Les candidatures indépendantes, aussi sincères soient-elles, ne bâtissent pas d’institutions durables. Elles incarnent des élans individuels incapables de produire une pensée politique collective. Qui veut réformer doit s’engager dans la politique. Qui veut transformer doit croire aux institutions. La jeunesse n’est pas un ornement électoral: elle est le moteur de la démocratie et le pilier de la justice sociale. Et cette démocratie ne se renouvellera que par leur participation active, au sein des partis, au cœur du projet national.

Conclusion: le courage de transformer de l’intérieur

Le Maroc de demain ne se construira pas par la dispersion des initiatives, mais par la réconciliation entre la jeunesse et la politique organisée. C’est en réhabilitant le rôle des partis, en restaurant la confiance et en garantissant la transparence électorale que la démocratie retrouvera son souffle. L’Union socialiste le rappelle avec force: le renouveau ne viendra pas de l’extérieur du politique, mais du courage de le transformer de l’intérieur. C’est là que se joue le véritable pari du futur : celui d’une jeunesse qui croit encore en la politique comme espace de sens, d’équité et de transformation nationale.

Par Mohamed Assouali
Secrétaire provincial de
l’Union socialiste des forces populaires à Tétouan


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