Une plateforme de réflexion sur la question de la protection sociale établie par la Fondation socialiste des recherches des études et de la formation

Quel modèle social pour le Maroc de demain ?


Libé
Mardi 11 Mai 2010

Ensemble des dispositifs mis en place pour assurer et aider les individus face aux risques majeurs de la vie, la protection sociale a donc à la fois des objectifs, obéit à des logiques et est assurée par des institutions. Aux  objectifs inhérents à la  matérialité de l'existence individuelle se couplent des objectifs sociaux plus larges d'intégration et d'inclusion sociale. Les modalités de réponse aux besoins de protection sociale,  qui diffèrent selon les contextes socio-historiques, restent étroitement déterminées par la nature même des  logiques qui président  à  la philosophie de cette  protection : logique d'assurance, logique d'assistance, ou logique de  solidarité liée au degré d'ancrage de   l'idéal de justice sociale.
Au sein de sociétés de plus en plus gouvernées par la logique rampante de la valeur d'échange, les conséquences financières des "risques sociaux" amplifient les  situations susceptibles de compromettre la sécurité économique de l'individu, de sa famille et du groupe de personnes liées par des liens de filiation et d'alliance., en provoquant une baisse des ressources ou une hausse des dépenses des cycles de vie  (vieillesse, maladie, invalidité, chômage, maternité, charges de famille, etc.).
Aujourd'hui, alors que les USA du président Barack Obama tentent un rattrapage,  les systèmes les plus développés de protection sociale sont surtout le fait des pays développés européens. Fait  général solide et historique aussi, la  protection sociale constitue un secteur encore largement dépendant des pouvoirs publics   et dont les  ressources sont constituées principalement par les impôts et les prélèvements de cotisations sociales. La place de  l'Etat comme  un acteur clé dans le domaine de la protection sociale se jauge de par son rôle d'initiateur et de   producteur des textes juridiques, d'exercice de  tutelle sur les différents organismes de ce domaine et de financement  des charges de la protection sociale par des impôts et taxes affectés ou des subventions budgétaires.
Néanmoins et au regard des mutations de la sphère économique, consécutives au processus d'ouverture des économies puis de mondialisation et de ses impératifs de  recherche de compétitivité et d'intégration au marché mondial,  le rôle de l'Etat impose quelques rétrécissements plus ou moins importants au sein des différentes formes de protection sociale. Ainsi  et selon les pays, s'est imposé un processus plus ou moins tangible d'association - implication des partenaires sociaux à la gestion des régimes de sécurité sociale sur la voie d'une codification des lois de financement selon la nature obligatoire ou complémentaire  de ces régimes….. C'est pourquoi la protection sociale demeure  au centre de tous les débats dans les pays développés comme dans les pays en développement. Ici et là,  elle s'est mise en place laborieusement et a abouti à un ensemble de politiques publiques visant à couvrir collectivement les individus en vue de réduire leur vulnérabilité et de parvenir à une plus grande équité.
Au Maroc, la question de la protection sociale se pose avec une acuité particulière.  Les tentatives de son acclimatation au lendemain de l'indépendance politique ont buté sur des conditionnalités liées aux retards de l'économie. Celles de son actualisation à l'aube du 3ème millénaire (AMO- RAMED, élargissement CNSS…..) se sont confrontées aux défis de la recherche des injonctions  d'une compétitivité glissante. Elle apparaît comme un élément endogène de la croissance recherchée et doit ainsi participer au rattrapage économique et à la cohésion sociale. La complexité des défis auxquels s'est trouvée  confrontée la mise en place de systèmes de protection sociale dans notre pays témoigne non seulement de  la diversité des situations et des difficultés de leur mise en œuvre mais également des hésitations ou tergiversations en matière de modèle et de population cible.
Dans notre pays, les mécanismes de protection sociale fort étroite restent confrontés à des questions de soutenabilité et de prise en charge de larges pans de l'économie formelle et de l'ensemble de l'espace de l'économie informelle. Des retards persistent malgré le fait avéré que la protection sociale n'est pas seulement un coût ou une charge pour la collectivité nationale. Elle produit concrètement des utilités sociétales dont l'impact sur l'économie est positif en termes de croissance, de productivité, de raffermissement du lien social ou grâce aux externalités positives qui en résultent.
En adoptant une démarche dynamique et une perspective de long terme, l'argumentaire en faveur de la protection sociale s'avère consistant. Outre le fait qu'il est un facteur d'intégration sociale et  d'amélioration du capital humain et donc du rythme de la croissance, il est également un instrument de stabilisation macroéconomique. Pour garantir la solidarité entre des générations imbriquées et dans un contexte d'économie de marché,   c'est la présence d'un système de protection sociale qui est à même de procurer à la population une assurance contre les risques. La protection sociale, en réduisant les inégalités et en visant l'inclusion notamment par le biais des minima sociaux, est génératrice de cohésion sociale. Elle est l'instrument pour soutenir les efforts de régulation sociale face aux aléas de la vie moderne.
La récession mondiale a accru le chômage et la pauvreté dans le monde avec des répercussions différentes selon les pays et leurs filets de sécurité. Quel que soit son niveau de richesses,  chaque pays constate l'impératif de développement d'un  système global de sécurité sociale, développement qui permettrait d'adoucir les terribles conditions liées à la pauvreté, de mettre un terme au creusement des inégalités et d'encourager la croissance économique. C'est pourquoi la construction d'une  société décente passe et de plus en plus par la place accordée aux ressources et aux mécanismes de la protection sociale parmi les priorités politiques et les programmes à teneur ou visée sociale.
Comment pouvons-nous surmonter les défis que posent les retards dans la mise en place de la sécurité sociale au Maroc ?
Dans notre pays, le défi est d'établir ou d'élargir des systèmes de sécurité sociale qui prennent en compte l'absence ou carence de politiques d'aide sociale cohérentes et complètes pour des couches sociales pauvres de plus en plus larges. La clé, c'est de créer, grâce à une volonté et à une vision politiques, une société où la population est en relative sécurité même si notre pays n'est pas nécessairement riche. Mais si cela demeure réalisable, quelles en ont sont les conditions à la lumière de l'expérience marocaine de sécurité sociale, d'assurance-maladie et  de difficultés de généralisation des mécanismes de la couverture sociale ?
Alors même que le socle du système actuel de protection sociale au Maroc repose encore sur les principes de répartition et d'obligation, les réformes successives de ces dernières décennies semblent plus orientées vers un modèle de capitalisation facultative ou ultime. Entre cette évolution rampante ou affichée d'inspiration économiquement libérale et la seule défense de la valeur solidarité sans déclinaison lisible, l'approfondissement du débat s'impose pour clarifier et assumer les choix.
C'est pour  contribuer à ce débat que la Fondation initie cette réflexion sur le système de protection sociale au Maroc  C'est une  invitation à   formuler ensemble une esquisse de stratégie qui favoriserait la sécurité et la protection  sociale comme élément fondamental des politiques de réduction de la pauvreté et qui encouragerait la poursuite de vastes chantiers de développement permettant au pays de croître avec équité.
 La fécondité des échanges est un argument de poids en faveur d'une concertation actualisée sur les progrès et les lacunes  des mécanismes de la protection  sociale universelle et sur les efforts d'introduction d'un niveau minimum de protection sociale en faveur des populations les plus démunies, comme le préconise l'INDH.
En partant de l'analyse de la complexité et  du caractère  multidimensionnel du  risque social  au Maroc, comment étendre la portée et l'efficacité de la protection sociale pour tous?  Comment pallier les difficultés  de financement de la sécurité sociale généralisée ? Comment garantir l'équilibre de l'AMO vers un parcours de soins coordonnés ? Comment rendre tangibles les prises en charge de l'accident du travail et de la maladie professionnelle ? Quel niveau de protection sociale aux  demandeurs d'emploi ? Quelles sont les réformes structurelles et paramétriques  des régimes de retraite, Quel niveau de solidarité intergénérationnelle et interprofessionnelle serait-il nécessaire pour assurer à la fois des prestations de retraites dignes, et aussi des niveaux d'équilibre financier pour les régimes gérants les retraites au Maroc ? Comment garantir progressivement  la couverture maladie universelle ?.
Autour de ces questions, la Fondation a initié, le samedi 8 mai 2010 au siège de l'USFP Hay Ryad, Rabat, une réflexion en profondeur sur la question de la protection sociale, dont l'objectif est de définir les contours et les pistes de construction d'un modèle social équitable pour le Maroc de demain.


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1.Posté par Mutuelle le 11/05/2010 19:55
Merci pour l'information toujours actualisées

2.Posté par mutuelle le 22/06/2010 05:12
Bien ils doivent porter attention aux mutuelles.

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