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A quelques semaines de la prochaine conférence internationale sur le climat (COP26), un rapport de Climate Action Tracker révèle que nous sommes encore loin du compte pour tenir cet objectif (+2°C). Ce rapport basé sur une analyse de plus de 35 pays, dont les plus grands émetteurs de carbone au monde, révèle qu’aucune nation n’est à la hauteur des mesures prises pour freiner le changement climatique, à l’exception d’un seul État africain, la Gambie. Ce petit pays d’Afrique de l’Ouest qui utilise, pour une grande partie de ses besoins, des énergies renouvelables a fourni des efforts considérables lui ayant permis d’être en tête du classement.
Le rapport, qui a évalué un certain nombre de mesures, telles que les politiques climatiques nationales entreprises, l’action et l’utilisation des terres, le soutien financier international et les objectifs d’émissions, souligne que sept autres pays, dont le Maroc (Costa Rica, Kenya, Éthiopie, Népal, Nigeria, Royaume-Uni), récoltent la mention «action climatique presque suffisante».
Des mesures jugées insuffisantes
Ce n’est, hélas, pas le cas de nombreux autres pays qui émettent beaucoup de gaz à effet de serre (GES), les États-Unis en tête. Les mesures prises par les Américains sont jugées « insuffisantes ». C’est aussi dans cette catégorie que sont classées les politiques de l’Union européenne, du Japon, de la Norvège ou du Chili, selon ce rapport scientifique indépendant rapporté par The Guardian et produit par deux ONG, Climate Analytics, spécialisée dans les sciences et les politiques climatiques et le NewClimate Institute, qui couvre les sujets liés aux négociations internationales sur le climat. D’autres États sont encore plus loin du compte, notamment la Chine qui est désormais le pays qui émet le plus de gaz à effet de serre chaque année. En 2019, elle était ainsi responsable de 27% des émissions mondiales (même si ce sont toujours les USA qui ont les émissions par habitant les plus élevées). Les mesures qu’elle a prises pour l’heure demeurent dans la catégorie « très insuffisantes », avertit Climate Action Tracker. C’est aussi le cas de gros émetteurs tels que le Canada, l’Australie ou l’Inde. La Russie qui est le quatrième émetteur de gaz à effet de serre mondial est, quant à elle, parmi les plus mauvais élèves, aux côtés de Singapour, de l’Iran, de l’Arabie Saoudite, et de la Thaïlande. Si l’objectif de zéro carbone est en général visé à l’échéance 2050, Climate Action Tracker alerte les pays sur l’importance de tenir les échéances préalables.
«L’échéance la plus importante est celle de 2030, date à laquelle les émissions globales doivent avoir été réduites de 50 %. Les gouvernements sont mal partis pour l’atteindre », indiquent les deux ONG. Selon leurs évaluations, au rythme actuel, les émissions mondiales seront toujours deux fois trop élevées par rapport aux seuils à respecter. «La vague d’États qui se sont engagés à atteindre le zéro carbone en 2050 donne des raisons d’espérer», souligne tout de même Climate Action Tracker. La priorité est donc d’adapter le planning en fonction de cette échéance. «Il est crucial que les objectifs que les États se fixent pour 2030 et 2050 soient correctement alignés. La plupart des objectifs zéro carbone sont formulés de manière vague (…) Des objectifs à court terme précis sont indispensables, pour tenir l’objectif de long terme», lit-on dans ledit rapport.
Le Maroc est-il vraiment un bon élève?
L'action climatique prévue par le Maroc dans le cadre de sa stratégie énergétique nationale comprend la mise en œuvre d'un « objectif ambitieux » de 42% de capacité électrique installée à partir des énergies renouvelables d'ici 2020, passant à 52% à l’horizon 2030, relève le document. En tant que pays non pollueur avec des émissions à effet de serre (GES) «faibles», le Maroc doit être soutenu par d'autres pays afin de passer à la vitesse supérieure dans la mise en place de sa politique climatique, font savoir les deux ONG. Climate Action Tracker, qui annonce avoir évalué en détail l'impact des mesures d'atténuation prises actuellement par le Maroc, estime également que le Royaume est en phase d’atteindre ses objectifs inconditionnels de la CDN (Contribution déterminée au niveau national) dans le cadre des politiques actuelles en raison de l'extension « ambitieuse » de la capacité de l'énergie solaire, éolienne et hydraulique. Hassan Bentaleb, chercheur associé au Laboratoire Changement climatique et Aménagement du territoire - Université Hassan II de Casablanca, estime que ce classement du Maroc parmi les pays à «action climatique presque suffisante» n’a rien de surprenant.
«Le Maroc est aujourd’hui, selon le discours officiel, un modèle et l’une des références au niveau international, notamment en matière de la promotion des énergies renouvelables et du développement durable», nous explique-t-il. Et de poursuivre: «Un positionnement constamment salué à l’international et vanté par les autres pays, les institutions internationales, les bailleurs de fonds, les investisseurs, etc. Ces derniers soulignent souvent son rôle «très actif» et sa position avant-gardiste pour faire face aux questions du changement climatique aussi bien au sein de l’Afrique qu’au niveau des Nations unies».
Pourtant, précise notre interlocuteur, «le consensus autour de ce discours officiel n’a jamais été établi même si le fait que la question du changement climatique ait été absente du débat public». «Les opinions divergentes contestant le récit officiel ou une partie de ce récit ont toujours existé. Ces opinions ont été souvent portées par quelques universitaires, militants ou ONG qui critiquent certains aspects du discours officiel, mais ne l’ont jamais remis totalement en cause», assure Hassan Bentaleb qui estime que «ces opinions divergentes ont toujours constitué de voix inaudibles, circonscrites et occultées, incapables de produire un contre-récit complet basé sur de nouveaux cadres, paradigmes ou référentiels et inapte à proposer une nouvelle qualification du problème du changement climatique». «Autrement dit, poursuit ce chercheur, les opposants au discours officiel ont été incapables de produire un contre-récit à même d’identifier de nouvelles causes jugées pertinentes et d’élaborer des propositions de résolutions tout en imputant la responsabilité de la situation à une partie bien identifiée».
Toujours selon ce spécialiste, «Attac Maroc fait partie de ces voix contestataires du discours officiel sur le changement climatique et considère que ce discours sur l’engagement du Maroc à lutter contre le changement climatique au niveau international représente un faux semblant». Selon cette ONG, les mesures d’adaptation et d’atténuation citées dans la CDN du Maroc ne constituent en rien «un engagement à réduire les émissions de gaz à effet de serre», mais tout au plus «un engagement à réduire la hausse prévue de ces émissions» ou tout simplement de «changer leur trajectoire», sans réelle volonté de les réduire nettement dans les faits. Hassan Bentaleb rappelle que l’ONG anticapitaliste critique également «les promesses tenues par le Maroc en matière des énergies renouvelables et d’efficacité énergétique». «Elle estime que la remise de nombreux permis d’exploration de gaz et de pétrole à plusieurs multinationales et la mise en place d’une première centrale nucléaire à l'horizon 2022- 2024 contredisent la politique énergétique marocaine qui veut réduire la part des énergies fossiles», souligne-t-il. Et de préciser que l’objectif de réduction de 32% des émissions de GES du Maroc à l’horizon 2030 a été également remis en cause.
«Attac Maroc juge ce chiffre comme «tronqué» puisque l’engagement réel du Maroc n’est qu’une réduction de seulement 14% des émissions. Le scénario à 32% de réduction demeure tributaire d’«un appui international» estimé à 45 millions de dollars», affirme ce chercheur qui tient également à rappeler que «le rapport de force qui caractérise les relations entre l’État marocain et la société civile réduit souvent les ONG à de simples voix dissonantes ou de simples canaux de contestation permanents et mobilisables de façon sporadique et du coup, incapables de créer de nouvelles formes organisationnelles ou de construire une identité collective qui transcende les intérêts particuliers et territorialisés».
En fin de compte, c’est à cela que tout se résume. Chaque gouvernement se trouve confronté à la difficulté de concilier ses engagements en matière de climat avec la réalité à laquelle est confrontée sa population. L’inflation massive qui s’installe actuellement aux États-Unis, par exemple, en raison de dépenses publiques hors de contrôle, en est la preuve ultime. Ces deux ambitions concurrentes ne sont pas souvent compatibles, et souvent l’urgence climatique passe au second plan face aux choix politiques et au cycle électoral.
Cependant, le Maroc, la Gambie et tous ces autres pays en voie de développement, et qui sont souvent catalogués comme étant de bons élèves en la matière, ne représentent qu’une goutte d’eau dans l’océan des émissions mondiales. Ce qui compte réellement pour faire face à l’urgence climatique, ce sont les grands émetteurs. Plus précisément, pour atteindre l’objectif fixé par l’Accord de Paris sur le climat, il faut que la Chine, l’Inde et les États-Unis réduisent drastiquement leurs émissions.