La solution ne réside sûrement pas dans des textes de loi désespérément confus
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Des contraintes et des entraves
Lors de la présentation de son premier rapport annuel dévoilé mardi dernier à Rabat, Hicham Mellati, directeur des Affaires pénales et des grâces au sein du ministère de la Justice, a indiqué que l'expérience a démontré la nécessité de modifier le cadre juridique relatif au crime de traite d’êtres humains vu la complexité de cette notion et la difficulté de se l’approprier notamment par les instances chargées d’exécuter la loi. Selon lui, il y a une grande confusion entre celui-ci et le crime de trafic humain comme en atteste l’annulation de la part de la Cour de cassation d'une trentaine de décisions rendues par les tribunaux de première instance concernant les crimes de traite d’êtres humains, en raison du manque de clarté concernant les éléments constitutifs de ces crimes ainsi que leurs formes.
A ce propos, l’intervenant a noté que cette confusion touche également le travail de la Commission vu l’ambiguïté qui marque le système judiciaire, en particulier au niveau des fondements de ce crime jugés multiples et similaires.
Parmi les défis et contraintes qui entravent une application fluide de la loi sur la lutte contre le crime de traite d’êtres humains, il y a aussi la difficulté de distinguer puisqu’il s’agit d’un crime organisé, complexe et permanent, en plus de la difficulté d'identifier les victimes. D’autant que l’arrestation des auteurs de ce crime devient plus difficile lorsqu’il est transfrontalier et commis par des réseaux criminels organisés et actifs dans différents pays.
En outre, la même source a souligné que l'absence de prise de conscience parmi les victimes de la traite des personnes et leur peur des poursuites judiciaires en cas de signalement de certaines formes de transgression, telles que celle sexuelle ou l'exploitation dans les circuits de la prostitution et de la mendicité, entravent également le travail des instances chargées de l’application loi. Des écueils reconnus par le Parquet lui-même qui a constaté dans une note en date du 3 juillet 2018 que « des victimes sont poursuivies pour des délits tels que les rapports sexuels hors mariage ou la prostitution, alors qu’en réalité elles ont fait l’objet de crimes de traite d’êtres humains». Il a également souligné le problème d’identification des victimes à qui on accorde peu d’importance lors du traitement des plaintes. En effet, certains procureurs «se contentent» d’entendre seulement «la personne qui a déposé plainte ou celles qui ont été identifiées lors de l’enquête».
Un rapport du département d'Etat américain sur la traite des personnes publié en 2018 a indiqué que «le gouvernement marocain ne respecte pas les critères minimum en matière de lutte contre la traite d’êtres humains malgré les efforts notables qu’il a déployés et le nombre croissant des enquêtes et des cas de poursuites diligentées dans le cadre de la loi 27-14 relative à la lutte contre la traite d’êtres humains». Les rédacteurs dudit document ont estimé que malgré la mise en œuvre d’un système interministériel de coordination des politiques et programmes de lutte contre la traite d’êtres humains et la création d’une unité spécialisée, il n’en demeure pas moins que le gouvernement marocain n’a rien fait au niveau de la mise en place et du financement des services de protection pour les victimes de cette traite ainsi qu’au niveau de l’identification et de la recherche des victimes, en particulier parmi les migrants irréguliers qui demeurent très vulnérables à la traite au Maroc, précise le rapport en soulignant que notre pays est resté, au cours des cinq dernières années, une source, une destination et un pays de transit pour les hommes, les femmes et les enfants soumis au travail forcé et au trafic sexuel comme c’est le cas de certaines femmes subsahariennes en situation administrative irrégulière ou de domestiques asiatiques contraintes à la prostitution et au travail forcé ou le cas d’hommes, de femmes et d’enfants marocains exploités de force, principalement en Europe et au Moyen-Orient.
Des chiffres en nette progression
Pourtant et malgré ces entraves et contraintes, le rapport de la Commission a noté que le nombre des victimes de la traite d’êtres humains au Maroc a connu une augmentation significative au cours des trois dernières années. En effet, le nombre des victimes et celles présumées l’être a atteint 719 personnes. Une grande majorité d’entre elles sont des adultes marocains avec une forte présence des mineurs qui représentent 47,41%. Le nombre des victimes masculines s’élève à 414 contre 305 victimes féminines, répartis entre 536 Marocains et 183 étrangers. L’exploitation sexuelle demeure la forme la plus courante de la traite d’êtres humains au Maroc, avec 283 cas, suivie de la mendicité (56 cas) et le travail forcé (35 cas). Le rapport affirme qu'au cours des trois dernières années, le nombre de personnes poursuivies dans des affaires de traite d’êtres humains a enregistré une augmentation remarquable, dépassant 200% pour l'année 2018 et 96% pour l'année 2019. En chiffre, le nombre de personnes poursuivies a atteint un total de 585 (adultes et mineurs), dont 84 étrangers et 144 femmes, considérant que cette augmentation est due aux efforts déployés pour définir le crime et démanteler les réseaux actifs. Le nombre d’affaires enregistrées a connu aussi une augmentation constante, passant de 17 cas en 2017 à 80 cas en 2018, pour atteindre 151 cas en 2019. Des chiffres émanant du CNDH datant de 2020 ont déjà révélé que le nombre des affaires de traite d’êtres humains est passé de 17 en 2017 à 80 en 2018 avant d’atteindre 151 en 2019. Ces trois dernières années ont enregistré également la poursuite, dans le cadre d’affaires de traite de personnes, de près de 585 individus, dont 144 femmes et 84 étrangers. Quant au nombre des victimes de la traite des personnes, il a atteint les 719 durant ces trois dernières années. En détail, le Conseil précise que 283 personnes ont été victimes d’exploitation sexuelle, 58 personnes ont été exploitées dans la mendicité, alors que 35 personnes ont été victimes de travail forcé. Les autorités marocaines ont émis 137 mandats dans le cadre de ces affaires et pas moins de 443 personnes ont été placées en garde à vue.
Une coopération internationale toujours de mise
Sur un autre registre, le rapport a révélé qu'au cours des cinq dernières années, le Maroc a déposé 41 demandes d'extradition de criminels accusés de traite humaine auprès d'autorités étrangères (dont 12 en 2016, 4 en 2017, 15 en 2018, trois en 2019 et sept en 2020). La plupart des demandes d'extradition ont été adressés à l'Espagne, à la Belgique et à la France. En retour, le Maroc a reçu des demandes d'extradition d'un certain nombre de pays étrangers, dont une grande majorité provenant d'Espagne, d'Italie, de Tunisie, de Norvège et de Suisse. L'extradition a lieu dans le cadre de la coopération judiciaire pénale internationale et dans le cadre de la loi 27.14 sur la traite d’êtres humains.
Le même document a indiqué que le nombre de demandes de délégations judiciaires émises par les autorités judiciaires marocaines s'élevait à 25 en 2017, alors que la plupart des délégations judiciaires reçues par les autorités judiciaires marocaines provenaient de France, de Hollande, d'Espagne et de Belgique. La même source a révélé aussi que le plus grand nombre de demandes de transfert de condamnés au cours des cinq dernières années pour terminer leur peine dans leur pays d’origine a été enregistré en 2018, atteignant sept demandes, la plupart d’entre elles sont issues de Belgique, d'Espagne et de France, alors que le rapport n'a pas enregistré de demandes du Maroc vers d'autres pays sauf en 2016 où le nombre de demandes était de trois. A rappeler que la coopération entre le Maroc et d’autres pays en matière de lutte contre le trafic et la traite d’êtres humains a toujours été de mise et permanente. Les réunions entre les responsables de ce dossier se font de manière régulière. Les trafiquants sont traqués et arrêtés en permanence.