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L'heure de VARité

Jeudi 7 Juin 2018

L'arbitre dessine un écran avec ses doigts et part consulter son écran de contrôle en bord de terrain: la fameuse VAR, l'assistance-vidéo à l'arbitrage, fera ses débuts lors du Mondial-2018 en Russie, comme le souhaitait le président de la Fifa Gianni Infantino.
Après des expériences dans différents tournois Fifa, en Serie A et Bundesliga cette saison, le principe est désormais connu. La VAR peut être utilisée dans quatre cas de figure: après un but marqué, sur une situation de penalty, pour un carton rouge direct ou en cas d'erreur sur l'identité d'un joueur averti ou exclu.
"Il s'agit d'éviter les erreurs majeures et manifestes, pas de réarbitrer avec la technologie. L'objectif n'a jamais été de vérifier chaque incident mineur et il y aura toujours des cas où différentes opinions seront possibles", a rappelé en avril Pierluigi Collina, président de la commission des arbitres Fifa, lors d'un stage des directeurs de jeu choisis pour le Mondial organisé à Coverciano, le centre d'entraînement de la fédération italienne.
En Russie, 13 arbitres officieront exclusivement derrière les écrans de contrôle. Et certains des 35 sifflets sélectionnés pour arbitrer sur le terrain pourront aussi devenir VAR, pour un ou plusieurs matches.
Du côté des arbitres, on assure que l'outil est perçu comme un atout. "La VAR peut être notre meilleure amie. Il n'est plus possible de faire d'erreur cruciale. Si je suis corrigé, c'est une aide", a ainsi assuré le Néerlandais Bjorn Kuipers à Coverciano.
Reste la question du manque d'expérience de certains sifflets rarement confrontés au dispositif avant le Mondial. "Tous les arbitres impliqués ont participé à de nombreux tournois où l'assistance-vidéo a été utilisée", a assuré le représentant français Clément Turpin lors d'une rencontre début mai avec plusieurs médias, dont l'AFP.
Après la VAR, voici la VOR (Video Operation Room), la salle d'opérations vidéo où seront installés les assistants, et ils seront nombreux, ainsi que quatre opérateurs techniques.
"Il y aura quatre responsables vidéo. Le VAR principal communique avec l'arbitre central et peut lui suggérer de venir vérifier les images", a ainsi expliqué Roberto Rosetti, responsable du projet VAR pour la Fifa.
"L'assistant VAR N.1 suit le direct pendant une vérification. Le N.2, qui est forcément arbitre-assistant, s'occupe spécifiquement du hors-jeu. Et un troisième assistant VAR est chargé d'épauler le VAR principal, de vérifier le respect du protocole et d'assurer une bonne communication dans l'équipe", a ajouté l'Italien.
La Fifa a par ailleurs choisi le principe d'un seul centre opérationnel, comme en Bundesliga, qui sera installé à Moscou et relié à tous les stades via un réseau de fibre optique.
Collina a aussi assuré que les VAR ne feraient jamais plus d'un match par jour. "On m'a demandé pourquoi les VAR seraient en tenue. C'est parce qu'ils transpirent comme sur le terrain. Ce n'est pas comme regarder un match sur son canapé en buvant un café", a expliqué l'ancien grand arbitre italien.
La question du hors-jeu est un paradoxe: l'apport de la vidéo est facile à gérer pour les arbitres, mais l'aspect technologique reste extrêmement complexe.
"Les joueurs sont tellement préparés, ça va tellement vite, que maintenant on peut se dire: +Si vraiment j'ai un doute, je laisse partir le joueur et s'il marque, on vérifiera la vidéo+. Ça enlève de la pression", a expliqué Cyril Gringore, assistant de Clément Turpin.
D'un point de vue technique, le Mondial bénéficiera de deux caméras supplémentaires, uniquement consacrées au hors-jeu, "installées en hauteur pour renforcer une zone qui, malgré les 33 caméras des diffuseurs, n'était pas couverte de façon optimale", a expliqué Sebastian Runge, responsable du groupe d'innovation technologique de la Fifa.
En outre, un système de triangulation sera inauguré, apportant une première dose de 3D à la difficile prise de décision en matière de hors-jeu.
Consciente de l'importance de la communication envers les spectateurs, la Fifa a mis en place un système d'information via les écrans géants des stades.
"Dans la VOR, une personne de la Fifa aura accès à ce que voient et entendent les VAR. Avec une tablette qu'on a développée, elle pourra envoyer des informations aux commentateurs et aux responsables des écrans géants", a résumé Sebastian Runge.
Concrètement, des messages d'explication seront diffusés sur les écrans ainsi que la décision de l'arbitre: but, pas de but, hors-jeu, etc.
"Aucun ralenti ne sera diffusé avant la prise de décision. On ne veut pas que l'arbitre soit influencé par la foule", a précisé Sebastian Runge.

La VAR, simple comme un coup de fil

Un téléphone. Un bon vieux téléphone fixe. En cas de panne des communications entre le centre opérationnel de la VAR installé à Moscou et l'un des stades de la Coupe du monde, c'est par un simple coup de fil que l'assistant-vidéo préviendrait le 4e arbitre d'une erreur à corriger.
Pour le Mondial en Russie, la Fifa a fait le choix du modèle allemand, c'est-à-dire d'un seul centre de contrôle VAR, installé à Moscou. Et pas, comme cela se fait par exemple en Italie, d'avoir une salle vidéo dans chacun des stades.
Ce centre opérationnel, installé au sein de l'IBC, la grande zone de diffusion télévisée, sera relié aux 12 stades via un réseau de fibre optique. Et si le réseau devait planter ?
"On a des solutions de secours avec des interphones fournis par les diffuseurs. Et si ces solutions plantent également, alors on a une ligne téléphonique fixe. Pas de mobile, parce qu'avec 80.000 personnes au stade, il y a tellement de fréquences, de signaux...", a expliqué Sebastian Runge, responsable du groupe d'innovation technologique de la Fifa.
"Cela servira d'abord au VAR, qui pourra appeler le stade et dire: +OK, il y a quelque chose qui ne marche pas+", a-t-il ajouté.
Pour autant, même dans cette situation critique, la VAR continuerait à fonctionner, toujours à l'aide de ce téléphone fixe à l'ancienne, installé à côté du 4e arbitre, en bord de terrain.
"Oui, dans ce cas, on continuerait à utiliser la VAR. En cas d'erreur manifeste, le VAR passe un coup de fil au 4e arbitre, qui décroche et qui peut aller parler au central. Ce système fonctionnerait. Normalement, il n'y a aucune raison d'arrêter la VAR", a assuré Sebastian Runge.
Car il y a même "un scénario du pire", dans lequel tout se ferait au stade.
"C'est le cas où tout l'IBC est hors-service, pas d'électricité, pas de réseau fibre. Dans ce cas, le 4e arbitre devient VAR et est remplacé par l'arbitre de réserve. On a une cabine dans le local des télévisions, d'où on envoie normalement les images à l'IBC. Cette cabine peut être transformée en version +light+ de la VOR", la salle d'opérations vidéo où sont installés les VAR, a expliqué Sebastian Runge.
La question du piratage a également été envisagée. "Cela a été discuté. On sait que ça peut arriver, mais notre département informatique a mis des choses en place pour nous en protéger", assure le responsable allemand.

Réarbitrons avec la VAR

L'histoire de la Coupe du monde est parsemée d'erreurs d'arbitrage ou de décisions discutables. La VAR, introduite au Mondial pour la première fois cet été, en aurait peut-être corrigé certaines.
22 juin 1986 à Mexico. Argentine-Angleterre 2-1 (quart de finale du Mondial-1986)
A la 51e minute, Diego Maradona et Jorge Valdano tentent un une-deux mais le ballon, contré par un défenseur anglais, prend de la hauteur. A la réception dans la surface de réparation, Maradona, à la lutte avec le gardien anglais Peter Shilton, marque de la main, but validé par l'arbitre tunisien Ali Bennaceur. "Ce but, je l'ai marqué un peu avec la tête et un peu avec la main de Dieu", commente le capitaine de l'Argentine.
Verdict probable avec la VAR: but annulé et carton jaune pour Maradona.
8 juillet 1982 à Séville. Allemagne-France 3-3; 5 t.a.b à 4 (demi-finale du Mondial-1982)
Le score est de 1-1 quand, à la 57e minute, Patrick Battiston est lancé en profondeur par Michel Platini. Sans s'occuper du ballon, qui finira en sortie de but, le gardien allemand Harald Schumacher sort jusqu'à l'extrémité de sa surface et vient très violemment percuter, de la hanche, le joueur français. Battiston, qui a perdu trois dents, reste inconscient quelques instants et est évacué sur une civière. L'arbitre anglais Charles Corver signale simplement la sortie de but.
Verdict probable avec la VAR: penalty pour la France et carton rouge pour Schumacher.
27 juin 2010 à Bloemfontein. Allemagne-Angleterre 4-1 (8e de finale du Mondial-2010)
27 juin 2010 à Johannesburg. Argentine-Mexique 3-1 (8e de finale du Mondial-2010)
Une journée sombre pour l'arbitrage. Lors du 8e de finale entre l'Allemagne et l'Angleterre, l'Uruguayen Jorge Larrionda n'accorde pas de but aux Anglais sur une frappe de Frank Lampard qui, après avoir touché le bas de la barre, retombe nettement derrière la ligne de Manuel Neuer. Les Anglais auraient dû revenir à 2-2, ils s'inclineront 4-1.
La VAR n'aurait pas eu d'influence dans ce cas, qui aurait été tranché avec l'aide de la technologie sur la ligne de but, adoptée dès le Mondial suivant, en 2014.
Le même jour, l'ouverture du score des Argentins face au Mexique est entachée d'un hors-jeu très clair de Carlos Tevez sur la passe de Lionel Messi. Le but est pourtant validé, alors que les écrans géants du stade ont diffusé un ralenti de l'action.
Verdict probable avec la VAR: but annulé
22 juin 2006 à Stuttgart. Croatie-Australie 2-2 (phase de poules du Mondial-2006)
Et un, et deux et trois cartons jaunes. Lors du match de poules Australie-Croatie en 2006, le défenseur croate Josip Simunic est averti... trois fois par l'arbitre anglais Graham Poll. Celui-ci expliquera ensuite avoir été piégé par l'accent de Simunic, qui est né et a grandi en Australie, et avoir inscrit "N.3 Australie" pour l'un des deux premiers cartons. Pour M. Poll, comme pour la Croatie et l'Australie, la Coupe du monde s'est terminée à Stuttgart.
Verdict probable avec la VAR: ce cas n'est pas prévu dans le protocole d'application de la VAR. Il est donc possible que la vidéo n'ait rien changé.


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