L’enseignant entre vérité et représentation !


Par Driss Chergui
Mercredi 17 Octobre 2018

On ne naît pas enseignant, on le devient. Enorme est constamment la distance entre la vérité et sa représentation. Les deux sont marquées par un rapport de divergence. Ce que nous croyons comprendre n’est pas forcément ce qui existe effectivement. Qu’est-ce qu’un enseignant aujourd’hui? Cette question a deux éléments : le premier concerne le ‘est’, ce qui revient à dire l’essence ou bien la quintessence qui définit un objet ou un sujet. Le deuxième élément est celui de l’enseignant en tant que personne qui pratique l’activité enseignante en transmettant des savoirs et des valeurs aux apprenants. Mais, sommes-nous effectivement des enseignants ? Y a-t-il un modèle d’enseignant ? Telles sont les questions auxquelles essaie de répondre le présent article.
Enseigner est d’ordinaire un moment de pouvoir. L’enseignant exerce un rapport de pouvoir inconscient sur les apprenants. Par ce pouvoir soi-disant légitime et justifié, on leur impose un modèle à suivre. Bien que ceci puisse paraître positif et conforme aux exigences pédagogiques et culturelles, il nous semble une imitation servile et une limitation de la pensée tant que nous fixons un modèle aux futures générations. Posons-nous ces questions fondamentales : Pourquoi enseigne-t-on ? Et est-on conscient des ressorts de notre acte d’enseigner ? A notre avis, l’enseignant aurait bien fait de prendre conscience de ce pouvoir et d’essayer d’en minimiser l’effet tant que nous ne savons pas exactement le degré du pouvoir autorisé du point de vue pédagogique. Ce rapport au pouvoir doit être ainsi soumis à un examen critique.   Les enseignants sont constamment appelés à développer leurs compétences et à parfaire leurs connaissances de la vie d’enfant, de sa psychologie et des autres facteurs qui entrent en jeu. L’homme est ce que l’enseignement vise. De ce fait, quel type d’homme veut-on mettre au monde ? Veut-on qu’il soit homme équilibré ou déséquilibré ? Sain ou malade ? Créatif ou passif ? Fort ou faible?
Chaque enseignant prend en charge, chaque année, la mission de former approximativement trente personnes, souvent d’une manière subjective et ignorante. Mais, a-t-il vraiment suffisamment de cognition de ce que l’Homme devrait être? Est-il tellement conscient de la psychologie individuelle et collective de l’Homme ? La formation de base qu’il a, a-t-elle la capacité de lui permettre de réussir?
Entre l’élève et son enseignant se tissent souvent des liens qui dépassent la simple relation de la transmission du savoir et des connaissances. Ses liens sont  souvent complexes.
Minimiser le rapport de force serait à même de créer une atmosphère de confiance réciproque entre l’élève et l’enseignant. Par ce fait même, l’amour de l’école  par les élèves se renforcerait et ils ne trouveront plus de différence entre l’espace scolaire et leur domicile.  Ainsi, en classe, les élèves doivent se détendre, jouer, rire, confier leurs secrets d’une manière confiante et spontanée. La classe doit répondre à tous leurs besoins d’enfant notamment le jeu. Dans ce sens, le jeu est un catalyseur de la créativité, de l’inventivité et de l’épanouissement personnel. Pour gérer une classe, les enseignants n’ont plus besoin de mettre au premier plan leur autorité. Cela est, à juste titre, un signe de leur faiblesse et leur ignorance de l’art d’enseigner. Par contre, l’enseignement est un art. Pour en être doués, nous sommes enclins à développer en nous ce regard esthétique.
S’agissant du savoir, il est courant de dire qu’il est en tant que tel source d’ennui. Une fois l’autorité est réduite au degré minimal ou bien à zéro, l’activité enseignante doit être transformée en une source inépuisable de plaisir et de jouissance. Il faut érotiser le savoir. Enseigner par exemple la lecture d’une manière qui procure aux élèves du plaisir et de la joie est ce qu’il faudrait pour créer de bons lecteurs. Tout ce qui se fait sans amour est souvent soldé par un échec.
L’amour est tout ce qu’il faut de facto. Sans amour, toute activité d’apprentissage devient une vraie et triste perte d’énergie de la part des élèves et des professeurs et combien sont nombreux les enseignants qui se sont ennuyés et combien sont nombreux les élèves qui se sont lassés de la classe.  

 


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