Le rapport du MEN se félicite d’une baisse du taux d’abandon, mais ne dit pas tout
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En effet, le communiqué du ministère de tutelle ne fait que ressasser des données chiffrées qui ont déjà été publiées en janvier dernier sans donner plus de précisions sur la situation de l’abandon scolaire dans le pays, qui guette des milliers d’enfants en les obligeant à quitter les bancs de l’école avant l’obtention d’un certificat d’études voire avant l’achèvement des cycles de l’enseignement obligatoire (primaire et secondaire collégial).
En effet, les seules données exhaustives qui existent sur le sujet datent de 2018, année de la publication de l’Atlas d’abandon scolaire élaboré par le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique. Que s’est-il passé entre 2018 et 2021 ?
Personne ne le sait puisque le département de l’Education nationale demeure la seule et unique source des chiffres. « En tant que syndicat, nous ne disposons pas de chiffres propres à nous. Les seules données disponibles sont celles du gouvernement. Mais, cela n’empêche pas que ce phénomène existe toujours et qu’il perdure», nous a indiqué Sadik Rghioui, du Syndicat national de l'enseignement (FDT). Et de nous rappeler : « Nous avons été les premiers à évoquer le sujet du décrochage scolaire et jusqu’à 2002, cette question était un tabou, difficile à discuter en public. Le ministère a toujours nié ce phénomène et nous a refusé de travailler sur ce sujet.
Pour les responsables du MEN, les syndicats sont là pour s’occuper d’autre chose. Mais c’est grâce à notre travail fait au niveau international avec la collaboration de syndicats européens que ce dossier est devenu sujet de débat public et même le MEN a fini par reconnaître cette réalité ». Les chiffres du MEN interpellent également par le fait que le communiqué ne pipe mot sur le contexte du Covid19 qui a conduit à la fermeture des écoles et à la perturbation du processus d’apprentissage de millions d’enfants et de jeunes. D’autant plus que l’enseignement à distance a conduit à l’abandon du suivi régulier des cours ou à l’abandon pur et simple de la scolarisation.
En effet, on se demande si les chiffres du MEN sur le décrochage scolaire prennent en compte ces élèves qui suivent de temps à autre les cours ou qui ont carrément abandonné l’école. Selon un rapport du HCP datant d’octobre 2020, pendant le confinement, près de 84% des préscolarisés n’ont pas pu suivre les cours à distance.
Le risque de ne pas suivre les cours à distance est significativement plus réduit parmi les ménages dirigés par une femme (77,5%) que parmi ceux dirigés par un homme (84,4%). Le contexte du Covid-19 marqué par le report ou l’annulation des examens, a donné lieu également à un suivi irrégulier pour 22,1% des élèves au collège et à l’abandon des cours pour 16,4%. Parmi les élèves qui suivaient irrégulièrement les cours avant cette décision, 43,3% les ont complètement abandonnés. De même, suite à cette décision, 70% des élèves au collège ont déclaré une baisse du temps consacré aux cours et activités scolaires. Cette proportion est de 50,4% dans le secteur privé contre 71,5% dans le public. En revanche, 7,7% des élèves ont consacré plus de temps au téléenseignement, proportion qui a presque doublé dans le secteur privé (15%), contre 7% dans le public.
En outre, dans ce contexte, 14,3% des élèves au collège considèrent que les cours à distance ont couvert totalement le programme pédagogique annuel, proportion qui va du simple au double du secteur public (12,9%) au privé (29,6%).
Pour près de 3 scolarisés sur 4 (72,6%), ces cours ne couvrent pas totalement le programme et 13,2% sont indécis. Le même rapport a indiqué également et d’après l’avis de plusieurs parents, que l’abandon scolaire ou le suivi irrégulier des cours à distance sont principalement dus au manque d’outils ou de supports nécessaires (PC, Smartphones, imprimantes, connexion Internet, etc.), pour 47,8% d’entre eux, puis à l’insuffisance de ces moyens ou supports (36,9%) et au désintéressement des élèves (11,3%). Le manque de moyens ou de supports ou leur insuffisance entravent le téléenseignement pour 85,7% des parents citadins et 83,5% de ceux résidant en milieu rural. Difficile alors de prendre les chiffres du département de Said Amzazi pour de l’argent comptant.
Hassan Bentaleb