
Un début de «bank run» (panique bancaire) dans une agence en Crète a été évité de justesse et l’information est restée cachée par crainte de contagion.
Bien avant cette semaine critique, tout avait été fait pour prévenir un tel scénario.
Ainsi, sans attendre le résultat des élections, le Fonds européen de stabilité financière (FESF) a versé aux quatre principales banques (BNG, Alpha Bank, Eurobank, Banque du Pirée), considérées porteuses d’un risque «systémique» en cas de défaillance, un acompte de 18 milliards d’euros sur leur recapitalisation prévue, pour qu’elles puissent se refinancer auprès de la Banque centrale européenne.
L’élection d’Antonis Samaras a-t-elle fait revenir l’argent ? «Depuis deux jours, il y a de nouveau des dépôts d’argent, mais c’est loin de compenser les sommes retirées», indique le responsable, qui ajoute «beaucoup de choses devront être faites par la nouvelle équipe au pouvoir avant que nous puissions respirer».
La formation du gouvernement, qui met fin à l’instabilité politique et la nomination au poste de ministre des Finances de Vassilis Rapanos, jusqu’alors le patron de la Banque nationale de Grèce (BNG), premier établissement du pays, sont bien accueillies par le milieu bancaire.
«Au moins, nous aurons pour ministre un homme qui connaît les banques et qui va faire en sorte de les aider plutôt que de les combattre», se réjouit une source bancaire.
Car les banques grecques restent fragiles, et la confiance que les Grecs leur accordent reste largement tributaire de la crédibilité du gouvernement. Si ce dernier échoue à s’entendre avec ses créanciers sur la renégociation du mémorandum, il est probable que le scénario du «Grexit» (Sortie de la Grèce) refasse surface et entraîne un nouveau mouvement de défiance à l’égard du secteur.
Elles sont considérées comme victimes de la crise plus que responsables, comme dans d’autres pays. Elles ont subi de plein fouet la décote des obligations de l’Etat dans le cadre de l’opération d’effacement de dette, qui a coûté aux quatre premières 23 mds d’euros.
En outre, selon Blackrock, qui a réalisé un audit du secteur dont les conclusions n’ont jamais été rendues publiques par la Banque centrale, elles devraient essuyer, du fait de la multiplication des créances douteuses, des pertes de 30 mds dans les trois ans à venir.
Certes, l’Union européenne s’est engagée à leur verser jusqu’à 50 milliards d’euros dans le cadre du 2e mémorandum. Mais le déblocage de cet argent dépend des négociations avec la troïka.
L’UE a exigé des contreparties. Toutes les banques doivent soumettre d’ici septembre un «business plan» aux autorités bancaires afin d’évaluer leurs ressources et leurs besoins.
La question de la propriété du capital des banques est aussi délicate. Alors que le programme de la gauche radicale Syriza prévoyait leur nationalisation, «les partenaires de la Grèce, UE et FMI, ont insisté pour que le contrôle des banques reste privé», a indiqué une source proche du dossier. Pour une question de principe mais aussi par crainte que l’Etat ne se révèle un piètre actionnaire.
Une position qui arrange les grandes familles grecques actionnaires même si les Costopoulos et autres Latsis verront leur participation diluée à l’issue du processus de recapitalisation.
Selon une source proche des négociations, elles ont obtenu que l’Etat n’ait pas son mot à dire dans la gestion des banques. Si ce schéma est confirmé par le nouveau gouvernement, l’Etat détiendra des actions assorties de «droits de vote limités aux grandes décisions stratégiques».
Un autre dossier explosif et connexe attend le gouvernement: celui de la banque agricole ATE, surtout connue à l’étranger pour avoir échoué à deux reprises aux stress tests.
Croulant sous les prêts défaillants, qui furent longtemps accordés en échange de soutiens électoraux, la banque a fait l’objet d’au moins deux recapitalisations et présenté un plan de restructuration en 2011 qui prévoit une réduction de ses coûts de 25%, via notamment des fermetures d’agences et des coupes dans ses effectifs pléthoriques.