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Ce dont les enfants pauvres ont besoin


Libé
Jeudi 19 Octobre 2023

Ce dont les enfants pauvres ont besoin
Quelle est la meilleure façon d’aider les enfants issus de familles pauvres à gravirl’échelle économique? Les progressistes préconisent davantage de dépenses publiques dans la santé, l’éducation, les programmes d’emploi et les crédits d’impôt pour les familles défavorisées. Les conservateurs insistent de leur côté sur la nécessité d’une plus grande responsabilité personnelle, de foyers stables avec parents mariés, ainsi que d’incitations au travail dans les programmes de dépenses sociales. De plus en plus de données indiquent que les deux camps ont raison. De la taille d’un livre, le récent rapport intitulé «Réduire la pauvreté intergénérationnelle», publié par l’Académie nationale des sciences des Etats-Unis (NAS), et dont nous figurons parmi les auteurs, formule une analyse rigoureuse des politiques dont il a été prouvé qu’elles permettaient aux enfants pauvres de bénéficier d’une vie meilleure à l’âge adulte. De même, un récent ouvrage de l’économiste Melissa Kearney, intitulé « The Two-Parent Privilege», démontre clairement que la présence de deux parents mariés au sein du foyer procure des avantagesimportants et durables aux enfants tout au long de leur vie. La pauvreté infantile a certes considérablement diminué cestrente dernières années, en dépit d’une importante rechute l’an dernier. Il n’en demeure pas moins qu’un tiers des enfants pauvres(en particulier Noirs et Amérindiens) se retrouvent également pauvres à l’âge adulte, une proportion nettement supérieure par rapport aux enfants plusfavorisés. Comme le documente le rapport de la NAS, les enfantsissus de familles à faiblesrevenussouffrent davantage de problèmes de santé, d’une éducation de faible qualité, et sont plus à risque de commettre des délits et d’être incarcérés, autant d’aspects qui limitent leur capacité à devenir des adultes productifs et bien rémunérés. Les enfants noirssont par ailleurs confrontés aux obstacles supplémentaires de la discrimination et du racisme, etsontstatistiquement plussusceptibles d’adopter des comportements préjudiciables – commission de délits ou relation fragile avec le marché du travail au fil de leur vie – ce qui tend à renforcer leurs désavantages. Il est prouvé qu’un foyer monoparental prive l’enfant des ressources financières, du temps et de l’énergie parentale nécessaires à sa réussite, et que l’absence du père nuit davantage aux garçons qu’aux filles. Or, de moins en moins d’enfants grandissent en présence de deux parents mariés à la maison. Il convient de souligner que les résultats et tendances varient considérablement selon la catégorie sociale. Comme le démontre Kearney, près de 90% des enfants nés de parents ayant fait des études supérieures grandissent dans un foyer avec deux parents, tandis que ce nombre ne cesse de diminuer pour les enfants dont les parents ne sont pas diplômés. Comment venir en aide aux enfants issus de familles pauvres ? Le rapport de la NAS abonde de preuves directes indiquant qu’investir pour les familles à faibles revenus, ainsi que dans leurs écoles et quartiers, peut améliorer leurs chances dans la vie. Il est démontré que le fait d’augmenter les financements en faveur des écoles du primaire et du secondaire dans les quartiers pauvres, ainsi que de soutenir une plus grande diversité des enseignants, améliore les résultats des enfants, comme le font les programmes pour un accès continu à la santé et à la nutrition. De même, un plus grand soutien financier et de meilleurs services d’assistance peuvent considérablement aider les étudiants pauvres, tout comme une formation professionnelle de haute qualité. Il reste également beaucoup à accomplir du côté des parents. Le meilleur moyen d’améliorer les incitations au travail et les revenus des ménages à faibles ressources consiste à élargir le crédit d’impôtsurlesrevenus d’activité (EITC), une subvention dont il a été démontré qu’elle favorisait l’emploi et l’autosuffisance, tout en améliorant les résultats scolaires des enfants. Des aides supplémentaires aux parentssans emploi pourraient également soutenir leurs enfants à long terme. Pour réduire la délinquance et les incarcérations parmi les jeunes des quartiers pauvres, il est nécessaire que nous investissions davantage dans les institutions communautaires et les programmes de prévention efficacestels que Becoming a Man. Il serait utile de déployer davantage de policiers dans les rues, et de renforcer la police de proximité, mais nous devrions également décourager la pratique consistant à enfermer les adolescents pour des infractions mineures commises pour la première fois, dans la mesure où une telle incarcération nuit durablement à leurs chances dans la vie. Le gouvernement fédéral américain se situant d’ores et déjà sur une trajectoire budgétaire intenable, les nouvelles dépenses visant à favoriser une mobilité sociale ascendante ne devraient idéalement pas être financées par davantage de dette. Il s’agirait davantage de rediriger les dépenses actuellement consacrées aux ménages à hauts revenus (via les programmes d’allocations et les règles fiscales). Ce rééquilibrage permettrait d’inscrire davantage le budget en phase avec la lutte contre la pauvreté intergénérationnelle, que conservateurs et progressistes considèrent comme une importante priorité nationale. Les conservateurs ont raison d’insister pour que le gouvernement fédéral et les Etats accomplissent davantage afin de souligner les bienfaits que confère aux enfants une famille avec deux parents mariés. L’absence du père n’est pas un simple choix de mode de vie ; elle nuit aux enfants, et les dégâts qu’elle provoque s’étendentsur plusieurs décennies. Quelles mesures envisager toutefois sur ce point ? Nous devons investir davantage dans des efforts d’amélioration de la qualité desrelations parmi lesjeunes couples, ainsi que de leur parentalité. Bien que nous sachions peu de choses sur ce qui fonctionne en la matière, nous pourrions promouvoir davantage d’expérimentations. La mise en œuvre de programmes communautaires pour les pères non mariés et n’ayant pas la garde de leurs enfants pourrait égalementse révéler utile. Il est important que les dirigeants élus et les commentateurs n’aient pas peur d’expliquer que la présence de deux parents mariés à la maison favorise la réussite des enfants. Les messages revêtent de l’importance. Ceux d’entre nous qui exercent une influence sur les débats publics doivent accomplir davantage pourrétablir cette norme sociale qui veut que le mariage joue un rôle déterminant dans le parcours des enfants. Sur la question du soutien à apporter aux enfants pauvres, reconnaissons que le camp progressiste et le camp conservateur expriment chacun de leur côté la moitié de la vérité. Les enfants défavorisés méritent la meilleure chance possible de s’extraire de la pauvreté à l’âge adulte. Cela nécessite de reconnaître que deux moitiés forment un tout.

Par Michael R. Strain.
Directeur des études de politique économique à l'American Enterprise Institute
Et Harry J. Holzer
Professeur de politique publique à l'Université de Georgetown


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