Un réalisateur algérien dénonce la censure d’un film sur un héros de l’indépendance


Jeudi 6 Septembre 2018

Un réalisateur algérien dénonce la censure d’un film sur un héros de l’indépendance
Les autorités algériennes ont interdit la sortie en salle d’un film algérien sur Larbi Ben M’hidi, un des chefs historiques de la guerre d’indépendance contre la France, exigeant des modifications, a dénoncé lundi son réalisateur Bachir Derrais. “Il est strictement interdit de projeter le film ou de l’exploiter sous une quelconque forme, jusqu’à la levée des réserves et à l’accord final sur son contenu”, a écrit à M. Derrais un organisme dépendant du ministère des Moudjahidine (anciens combattants).
La lettre de cet organisme, le Centre national d’études et de recherches sur le mouvement national (Cnermn), publiée par plusieurs journaux et confirmée par M. Derrais, ne détaille pas ces “réserves”. Aucun responsable des ministères de la Culture ou des Moudjahidine n’a pu être joint par l’AFP. Les autorités “trouvent le film trop politique”, a expliqué le réalisateur à l’AFP. Elles auraient préféré davantage de “scènes de guerre” mettant en valeur les combattants algériens ou d’images de tortures commises par l’armée coloniale, a-t-il détaillé.
M. Derrais décrivait en 2016 son film comme un “biopic”, retraçant notamment l’enfance et l’adolescence de Ben M’hidi, l’un des neuf chefs historiques du Front de libération nationale (FLN) qui déclenchèrent la guerre d’indépendance le 1er novembre 1954. “On me reproche aussi de raconter les divergences entre les chefs de la Révolution (algérienne), notamment une scène d’une altercation entre Ben M’hidi et (Ahmed) Ben Bella”, futur président de l’Algérie, qui est pourtant “dans tous les livres d’Histoire”, a-t-il poursuivi.
Mort en 1957, Ben M’hidi s’est, selon la thèse officielle française de l’époque, suicidé après son arrestation par les parachutistes français. Mais le général français Paul Aussaresses avait avoué en 2001 l’avoir fait pendre.
Une source au ministère des Moudjahidine a expliqué à l’AFP, sous couvert d’anonymat, que “le film n’a pas respecté le scénario” validé par les autorités et “donne une image dégradante de Ben M’hidi, le montrant comme un forcené alors qu’il est connu pour sa sagesse”.
Les 800 millions de dinars (environ 6 millions d’euros) de budget du film ont été financés à 40% par le ministère algérien de la Culture et à 29% par celui des Moudjahidine.
M. Derrais a affirmé avoir respecté le scénario validé et assure que le contrat de production lui donne le pouvoir “sur le montage final”. La loi algérienne soumet “la production des films relatifs à la guerre de libération nationale” à “l’approbation préalable du gouvernement” et interdit celle de films “portant atteinte (...) à la guerre de libération nationale, ses symboles et son histoire”.


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