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Relation parents-élèves-profs
métamorphosée
Pendant que les élèves découvraient avec stupéfaction que leurs profs avaient eux aussi des photos de profil sur les réseaux sociaux confirmant que ces échanges d’un nouveau genre peuvent changer la perception qu’ont les élèves de leurs professeurs, «j’ai moi aussi été surprise à des degrés divers depuis le début des cours à distance», nous confie une enseignante du secondaire qui va dorénavant profiter d’une retraite méritée. Et d’ajouter : « Les élèves se sont métamorphosés. Certains qui étaient turbulents en classe sont devenus plus calmes et concentrés. Et à l’inverse, des élèves qui étaient brillants et dynamiques en présentiel sont devenus de véritables fainéants lors de l’apprentissage en distanciel». Le nouveau coronavirus a donc bel et bien chamboulé les habitudes et les certitudes. Et pour cause, les enseignants sont rentrés dans les appartements et pour la majorité d’entre eux, ces contacts par écrit représentent aussi un avantage pour la qualité des échanges entre eux et les élèves. De leur côté, en supervisant les cours de leurs enfants, les parents ont assisté à une drôle d’école. Une école où l’aisance des profs face aux NTIC fut inégale. Logique, sans aucune formation préalable, ces derniers ont dû jongler entre plusieurs plateformes et réseaux sociaux. «Il y avait de quoi avoir le tournis», assure l’enseignante retraitée.
Devant un tel manège, les parents ont donc été obligés de mettre les mains dans le cambouis. Ils sont plusieurs à avoir tant bien que mal répondu aux attentes des enseignants. «Du calme, de la volonté et le sourire, trois armes indispensables pour commencer des journées dures et qui se ressemblent», se souvient Tarik El Kanouni, un Casablancais père de trois enfants dont deux filles scolarisées. «Nous avions un PC et il était à la fois utilisé pour WhatsApp et les cours des enfants, en même temps qu’il servait pour mon télétravail. Nous étions obligés d’aider les profs à superviser car dès le deuxième jour, les enfants se sont mis à s’envoyer des messages audio entre eux sans rapport avec le cours. En plus, des fois, les enseignants peinaient à transmettre leur apprentissage. Donc, on a répété plusieurs fois le même cours», se souvient notre interlocuteur qui a pris le parti de poursuivre l’expérience de l’école en ligne, situation sanitaire oblige, quand bien même certains cours ne sont jamais allés au bout.
Au-delà de cette inédite situation qui a, par moments, pris des allures de chaos, sans nul doute, la crise sanitaire a contribué à une meilleure compréhension entre les enseignants et les parents d’élèves. Les profs sont désormais bien mieux considérés. «Le métier est noble mais la conjoncture économique est difficile. Il faudrait que les écoles s'adaptent à la situation», relève Tarik en pensant notamment aux sommes modiques perçues par les enseignants dans des écoles privées. Des rémunérations qui tranchent avec leurs investissements même s’ils sont parfois dépassés par le modèle pédagogique de l’enseignement à distance. Ce traitement affligé aux enseignants n’est pas l’unique illustration des inégalités qui caractérisent les cours à distance.
Des cours à distance
accentuant les inégalités
Récemment aux Etats-Unis, une nouvelle tendance est apparue. Les familles forment des «Pandemic pods» par le biais de Facebook notamment. En clair, cela revient à organiser des micro-classes à domicile, loin du Sars-Cov2, dirigées par des enseignants sous contrat privés aux rémunérations exorbitantes. Cette forme de ségrégation scolaire a indigné de nombreux Américains. De ce côté-ci de l’Atlantique, on en est pas encore à ces extrémités. Mais l’école en ligne au Maroc a dévoilé au grand jour certaines inégalités restées dans l’ombre jusque-là. En accédant aux foyers, les enseignants ont mesuré plus que jamais le manque d’équipement numérique dans certaines familles et ils ont perdu des élèves en conséquence. Tandis que d’autres familles moins à l’aise avec le système scolaire, par manque d’éducation parfois, ont vu leurs enfants décrocher sans réaction.
Pour preuve «40% des élèves notamment dans les milieux défavorisés et le monde rural, n’ont pas suivi. Nous nous sommes dit qu’il fallait mixer présentiel et distanciel en donnant le choix aux familles», a tenté d’expliquer Saïd Amzazi, le ministre de l’Education nationale mais sans vraiment convaincre. D’autant que les échecs constatés risquent de s’amplifier. D’abord, parce que le MEN se déresponsabilise totalement en laissant le choix aux parents entre le distanciel et le présentiel car «nous sommes dans une période particulière, inédite dans l'histoire. Il faut raisonner en co-éducation.
La réussite et l'apprentissage dépendent également de l'encadrement des parents. Les parents devront non seulement encadrer mais également sensibiliser leurs enfants», dixit le ministre de tutelle.
Ensuite, ledit ministre jette carrément l’éponge et explique à qui veut bien l’entendre que les inégalités sont insolubles, en l’occurrence quand il s’agit d’équipement, «les questions de connectivité ne dépendent pas de nous». Et encore, on ne parle que d’Internet. Quid des tablettes pour les plus démunis d’entre nous ? Le MEN s’enfonce. «En prenant comme hypothèse un prix de 1.000 DH par tablette, et comme cible les deux millions d'élèves bénéficiaires de Tayssir, il faudrait 2 milliards de DH de budget. Nous ne pouvons pas le dégager aujourd'hui», annonce Saïd Amzazi. Pourtant, il existe des tablettes à des prix beaucoup plus abordables. Elles le seront encore plus au vu de la quantité. Mais de toute évidence, les plus démunis sont clairement laissés pour compte.
En somme, si la classe qui injecte de l’égalité et où les enfants découvrent la vie en société et les compromis demeure l’apprentissage pédagogique le plus prisé par le triptyque parents-élèves-enseignants, l’école en ligne peut amener à une redéfinition du rôle de l’enseignant en mettant en place de façon pérenne de nouveaux canaux de communication.