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Le changement climatique va redessiner la carte des zones habitables de la planète, maislesEtats, plutôt d'humeur à "se claquemurer", ne sont "pas prêts" à réfléchir à une redistribution de la population mondiale qu'il faudrait pourtant "planifier", assure à l'AFP l'expert des migrations François Gemenne.
Evacuation brutale ou transfert anticipé, migration choisie ou forcée... Les déplacements des populations victimes des impacts du réchauffement de la planète, des sécheresses à répétition aux cyclones en passant par l'élévation à long terme du niveau de la mer, sont multiformes et soulèvent d'innombrables questions. Mais une chose est sure, ils vont augmenter, selon le rapport des experts climat de l'ONU (Giec) publié lundi.
"Nous sommes à l'aube d'un changement environnemental majeur qui va forcément redistribuer la population à l'échelle de la planète", explique François Gemenne, un des auteurs principaux du rapport. Mais "très clairement, vu l'état actuel du débat politique, nous ne sommes pas du tout prêts à nous poser ce type de questions", poursuit-il, pointant du doigt la tendance à "se claquemurer chez soi, à fermer les frontières, à dresser des murs et des barbelés".
Dans ce contexte, il s'inquiète de la tentation de certains d'"agiter le spectre d'une nouvelle crise migratoire pour convaincre les gouvernements de réduire les émissions de gaz à effet de serre". "Même si on le fait avec les meilleures intentions du monde, on risque de renforcer un discours xénophobe".
D'ores et déjà, l'enjeu n'est pas seulement futur: les "migrants climatiques" sont déjà une réalité, même s'ils ne sont pas reconnus comme tels. "En 2020, 30millions de personnes environ ont été déplacées par des événements climatiques extrêmes, troisfois plus que celles déplacées par des violences ou des conflits", assure l'expert. Des déplacements principalement internes ou dans un pays voisin, le plus souvent dans les pays du Sud.
Quant aux migrants dits économiques, beaucoup d'entre eux sont en réalité poussés sur les routes par des facteurs climatiques, insiste François Gemenne, évoquant l'"exode rural massif" de familles africaines dépendant d'une agriculture de subsistance frappée par le dérèglement climatique.
Sécheresses ou inondations à répétition, températures insupportables... La véritable question est celle de "l'habitabilité": "quelles sont les zones du monde qui vont rester habitables demain?", lance le scientifique. Et donc combien de personnes quitteront les zones inhabitables, sur quelle durée, dans quelles régions ? "C'est très compliqué à dire parce qu'il s'agit de modéliser un comportement humain, parfois irrationnel", couplé à l'ensemble des politiques d'adaptation et migratoires qui seront mises en place, répond-il. "Et ça ne peut pas être modélisé par le Giec".
Certains chiffres donnent malgré tout un ordre de grandeur. "Selon les projections de la Banque mondiale, aujourd'hui les plus fiables, dans un scénario optimiste on aurait jusqu'à 216 millions de personnes" vivant dans des zones à risque en 2050 et susceptibles d'être déplacées à l'intérieur de leur pays. Mais "ça ne veut pas dire que toutes le seront, ça ne veut pas dire qu'elles le seront en même temps". Ni qu'elles quitteront de plein gré leur maison, leur terre. "Ça va être parfois une question d'information, de compensation financière, de planification sur du très long terme...", note le chercheur. Un casse-tête qui touche aussi "au respect du droit des populations des zones à risque: est-ce qu'elles ont le droit de ne pas être déplacées ?".
Dans tous les cas, "plus on parviendra à organiser (ces migrations), plus on maximisera les chances qu'elles se déroulent de façon sûre, ordonnée et dans l'intérêt de tous". Le chercheur met en avant à cet égard la décision de l'Indonésie de déplacer de l'île de Java à celle de Bornéo la capitale Jakarta, menacée à terme d'être engloutie. Une anticipation qui témoigne selon lui d'une meilleure préparation des pays en développement par rapport aux pays riches qui ont souvent "l'impression que les infrastructures seront suffisantes" pour protéger leurs populations. Les inondations catastrophiques qui ont ravagé l'Allemagne et la Belgique l'an dernier devraient servir de "signal d'alarme", insiste-t-il: "nous devons repenser collectivement où nous pouvons vivre, où nous permettons aux gens de vivre".
Les prévisions sont encore plus dramatiques et inédites pour des petits Etats insulaires qui pourraient complètement disparaître de la carte, comme Tuvalu ou les Iles Marshall. Et perdre ainsi leur siège à l'ONU ? Transformer des citoyens en apatrides ? A moins de déplacer un Etat souverain sur un territoire cédé par un autre pays, ou de reconnaître un Etat "virtuel" ? "Le changement climatique fait vaciller les fondations traditionnelles des relations internationales", souligne François Gemenne
Evacuation brutale ou transfert anticipé, migration choisie ou forcée... Les déplacements des populations victimes des impacts du réchauffement de la planète, des sécheresses à répétition aux cyclones en passant par l'élévation à long terme du niveau de la mer, sont multiformes et soulèvent d'innombrables questions. Mais une chose est sure, ils vont augmenter, selon le rapport des experts climat de l'ONU (Giec) publié lundi.
"Nous sommes à l'aube d'un changement environnemental majeur qui va forcément redistribuer la population à l'échelle de la planète", explique François Gemenne, un des auteurs principaux du rapport. Mais "très clairement, vu l'état actuel du débat politique, nous ne sommes pas du tout prêts à nous poser ce type de questions", poursuit-il, pointant du doigt la tendance à "se claquemurer chez soi, à fermer les frontières, à dresser des murs et des barbelés".
Dans ce contexte, il s'inquiète de la tentation de certains d'"agiter le spectre d'une nouvelle crise migratoire pour convaincre les gouvernements de réduire les émissions de gaz à effet de serre". "Même si on le fait avec les meilleures intentions du monde, on risque de renforcer un discours xénophobe".
D'ores et déjà, l'enjeu n'est pas seulement futur: les "migrants climatiques" sont déjà une réalité, même s'ils ne sont pas reconnus comme tels. "En 2020, 30millions de personnes environ ont été déplacées par des événements climatiques extrêmes, troisfois plus que celles déplacées par des violences ou des conflits", assure l'expert. Des déplacements principalement internes ou dans un pays voisin, le plus souvent dans les pays du Sud.
Quant aux migrants dits économiques, beaucoup d'entre eux sont en réalité poussés sur les routes par des facteurs climatiques, insiste François Gemenne, évoquant l'"exode rural massif" de familles africaines dépendant d'une agriculture de subsistance frappée par le dérèglement climatique.
Sécheresses ou inondations à répétition, températures insupportables... La véritable question est celle de "l'habitabilité": "quelles sont les zones du monde qui vont rester habitables demain?", lance le scientifique. Et donc combien de personnes quitteront les zones inhabitables, sur quelle durée, dans quelles régions ? "C'est très compliqué à dire parce qu'il s'agit de modéliser un comportement humain, parfois irrationnel", couplé à l'ensemble des politiques d'adaptation et migratoires qui seront mises en place, répond-il. "Et ça ne peut pas être modélisé par le Giec".
Certains chiffres donnent malgré tout un ordre de grandeur. "Selon les projections de la Banque mondiale, aujourd'hui les plus fiables, dans un scénario optimiste on aurait jusqu'à 216 millions de personnes" vivant dans des zones à risque en 2050 et susceptibles d'être déplacées à l'intérieur de leur pays. Mais "ça ne veut pas dire que toutes le seront, ça ne veut pas dire qu'elles le seront en même temps". Ni qu'elles quitteront de plein gré leur maison, leur terre. "Ça va être parfois une question d'information, de compensation financière, de planification sur du très long terme...", note le chercheur. Un casse-tête qui touche aussi "au respect du droit des populations des zones à risque: est-ce qu'elles ont le droit de ne pas être déplacées ?".
Dans tous les cas, "plus on parviendra à organiser (ces migrations), plus on maximisera les chances qu'elles se déroulent de façon sûre, ordonnée et dans l'intérêt de tous". Le chercheur met en avant à cet égard la décision de l'Indonésie de déplacer de l'île de Java à celle de Bornéo la capitale Jakarta, menacée à terme d'être engloutie. Une anticipation qui témoigne selon lui d'une meilleure préparation des pays en développement par rapport aux pays riches qui ont souvent "l'impression que les infrastructures seront suffisantes" pour protéger leurs populations. Les inondations catastrophiques qui ont ravagé l'Allemagne et la Belgique l'an dernier devraient servir de "signal d'alarme", insiste-t-il: "nous devons repenser collectivement où nous pouvons vivre, où nous permettons aux gens de vivre".
Les prévisions sont encore plus dramatiques et inédites pour des petits Etats insulaires qui pourraient complètement disparaître de la carte, comme Tuvalu ou les Iles Marshall. Et perdre ainsi leur siège à l'ONU ? Transformer des citoyens en apatrides ? A moins de déplacer un Etat souverain sur un territoire cédé par un autre pays, ou de reconnaître un Etat "virtuel" ? "Le changement climatique fait vaciller les fondations traditionnelles des relations internationales", souligne François Gemenne