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Le personnel politique est-il prêt à une nouvelle gestion du pluralisme dans l'audiovisuel ? : Les spots électoraux ne remplacent pas le débat contradictoire


Narjis Rerhaye
Mercredi 28 Septembre 2011

«Chez nous, le temps de parole politique continue de se réduire au seul temps électoral ». Le constat de cet homme politique a un goût amer. A quelques semaines des élections législatives, la crainte des capsules électorales qui prennent le plus souvent la forme de longs monologues pointe à l'horizon. Et c'est cette même inquiétude que partagent des responsables du pôle public de l'audiovisuel. Le souvenir de la campagne électorale des municipales de 2007 est encore vivace. « Le gouvernement avait décidé en accord avec les partis du temps d'antenne de ces derniers. Une répartition avait été faite entre les formations politiques qui ont un groupe parlementaire, ceux qui n'en ont pas et ceux enfin qui ne sont pas du tout représentés au Parlement. Résultat, des capsules de 9, 5 et 3 minutes étaient diffusées trois fois par jour. Faites vos comptes : le gros de l'antenne était consacré à ces expressions directes. De plus, et conformément aux dispositions du Code électoral,  la télévision devait prêter main forte aux partis qui n'ont pas les moyens d'enregistrer leurs messages. Résultat,  pendant 14 jours, la télévision ne faisait plus de la télévision. Tout le monde était pris dans cet engrenage des capsules électorales. Et dans la programmation, il n'y avait plus de place pour l'organisation de débats ou de tables-rondes », explique dépité  cet homme de télévision.
A la HACA, on n'est pas prêt non plus d'oublier les communales de 2007. C'est bien à cette époque qu'avait été inauguré le débat dit de pré campagne. « 2 mois et demi avant les élections, les télévisions se sont mises à organiser des débats où les idées politiques des uns et des autres étaient confrontées, des reportages sur les partis et leurs propositions mais aussi sur les attentes des citoyens étaient diffusés. Pendant deux mois et demi, le temps politique avait investi naturellement le service public. Avec l'ouverture de la campagne électorale et la diffusion des fameuses capsules, la parenthèse de la démocratie cathodique s'est fermée », se souvient ce cadre de la Haute autorité.
Les spots électoraux, élaborés par les partis politiques et diffusés en temps de campagne, contribuent-ils à la rupture entre les citoyens-électeurs et la politique ? La question ne traverse pas vraiment le personnel politique. « Le parti est déjà bien content de pouvoir réciter sa tirade, face à la caméra. Il estime que la moitié du travail est faite auprès de l'électeur. La télévision influence-t-elle réellement le résultat du scrutin ? Pour ma part, je ne le pense pas. Ce que les hommes politiques ne savent pas ou feignent de ne pas savoir c'est bien le fait que les taux d'audience de ces capsules sont extrêmement bas. Les chiffres existent, il suffit de les demander », soutient ce journaliste télé.
Ailleurs, sous d'autres cieux, comme ceux français, les expressions directes donnant à voir les responsables politiques s'adresser directement aux citoyens sont programmées toute l'année. Le temps est politique et non plus électoral. « Ce sont des expressions qui durent deux minutes et chaque parti y a droit. Mais attention ce sont toujours deux minutes au contenu fort où le ou la responsable politique s'adresse et explique aux Français. Le CSCA précise bien que ces expressions directes disparaissent de la programmation en période électorale parce que place est alors faite aux débats et à la confrontation d'idées, » indique ce spécialiste de l'audiovisuel pour qui « c'est à l'opérateur de fixer les termes du débat à la télévision et pas aux politiques ».
Et c'est justement ce qu'ont essayé de suivre les Sages de la HACA, nommés à la veille de l'adoption de la Constitution du 1er juillet. Lors de la campagne référendaire, télévisions et radios publiques ont organisé tables rondes et émissions spéciales. « Et pour la première fois, on avait même assisté à une sorte de coordination entre les télévisions notamment 2M et Médi 1 TV », rappelle ce médiatique.
A quelques semaines des législatives du 25 novembre, le temps d'antenne ne fait pas pour l'heure figure d'urgence chez les politiques. Ce sont les lois électorales qui en fixeront les grandes lignes que mettra en musique le gouvernement après consultation des partis. Si l'accès des formations politiques aux médias audiovisuels publics doit être et est  garanti par l'Exécutif -sous l'œil vigilant des Sages, gardiens du temple audiovisuel- qui doit garantir le droit des téléspectateurs citoyens à se construire une opinion politique à travers un véritable pluralisme ? « Autrement dit, les Marocains sont en droit de se faire leur propre opinion et de réclamer pour ce faire l'accès égalitaire des 32 ou 33 partis qui seront en lice aux élections. Cela peut se faire à travers, par exemple  une politique d'invitation aux tables rondes des représentants de ces partis. Plus clairement, tous doivent être alignés sur la même ligne de départ, y compris les champions. Les compteurs doivent être mis à zéro en campagne électorale, » propose ce professionnel de la télévision.
Les partis sont-ils prêts à adopter ce même raisonnement et permettre aux  citoyens de ce pays de se forger leur propre opinion politique avec la confrontation d'idées de tous les partis en lice ? Ceux et celles qui nous gouvernent sont-ils prêts à une gestion autre du pluralisme en temps électoral où les règles quantitatives ne feront pas l'économie de celles qualitatives ? Les questions se bousculent et à la HACA, on se dit en tout cas préparé, travaillant sur ce dossier depuis le mois d'août,  en attendant que le gouvernement ne se saisisse officiellement  des temps d'antenne des partis en campagne. 


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