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Pour mettre un peu plus de lumière sur cette question, nous avons contacté Dr. Brahim Benbrahim qui a bien voulu nous parler de ce sujet. Entretien
Libé : On dit que la musique adoucit les mœurs. Est-ce vrai et dans quelle mesure ?
Docteur Brahim Benbrahim : Il est certain qu’à travers l’histoire, la musique a toujours joué un rôle d’anti-stressant. Chaque fois que les gens veulent se déconnecter et se détendre, ils ont eu toujours recours à la musique. L’usage de la musique en tant que thérapie était d’ailleurs courant au Maristan de Sidi Frej, où l’on jouait tous les vendredis de la musique andalouse pour les malades. Il ne faut pas oublier que les établissements modernes ont été créés selon ce modèle. A partir de là, on peut dire que la musique a toujours eu un rôle décontractant, relaxant. Ce n’est pas seulement valable pour l’Homme mais également pour les animaux à telle enseigne qu’on est arrivé, en Allemagne, à faire augmenter la production de lait grâce à la musique qu’on sert aux vaches à des heures déterminées dans l’étable. Même chose pour les plantes qui poussent mieux quand l’ambiance est harmonieuse. Tout cela a été scientifiquement prouvé. Maintenant si l’on veut savoir comment la musique agit sur l’Homme, on doit dire que, comme l’Homme est en interaction avec son milieu extérieur et quand on écoute, quand on entend, il y a une onde sonore qui rentre dans les oreilles qui se transmet en un flux électrique au niveau du cerveau. Cela se transforme selon le type de musique, soit en excitation soit en détente. Lorsqu’on entend les klaxons dans les feux rouges, par exemple, cette opération donne lieu à une certaine excitation.
La thérapie par la musique ne date donc pas d’aujourd’hui. Mais est-ce que cela repose sur des données scientifiques ?
Il y a ce qu’on observe et il y a ce qu’on arrive à prouver. Or, dans le fonctionnement humain, on arrive à prouver certaines choses mais il reste des tas d’autres choses à découvrir, notamment sur l’interaction entre les neurones, les neurotransmetteurs, la réaction des différents transmetteurs. C’est dire qu’il y a encore beaucoup à faire à ce niveau-là.
Bien sûr, quand on parle de musicothérapie, cela fait rire certains mais il faut savoir qu’on utilise la musique comme traitement adjuvant, c'est-à-dire par exemple, accompagnant une psychothérapie ou dans le cadre de tout ce qui est ergothérapie. C’est comme quand on fait de la peinture ou de la poterie ; c’est un moyen d’expression sauf qu’il y a une différence entre le fait d’écouter de la musique et le fait de faire de la musique dans la mesure où quand on fait de la musique, on extériorise des choses refoulées ; les choses qui sont au niveau de notre inconscient. C’est le cas par exemple de « jedba » et « l’hadra ». La notion de transe consiste justement à pousser la personne à travers la musique à être dans un état second ; un état qui se trouve à la limite entre le conscient et l’inconscient. A travers la musique, il exprime par son corps un certain nombre de souffrances. C’est une sorte d’exutoire.
Même de nos jours, les avis restent partagés sur les vertus de la musique. Quel est votre avis, vous en tant que spécialiste ?
Si la musique n’avait pas de vertus, elle n’existerait pas. Ce n’est pas comme ce que pensent certains, c’est-à-dire une manière de se vider, ou d’exprimer mais c’est aussi un mécanisme de lutte contre le stress. Regardez les jeunes aujourd’hui qu’on trouve dans les boîtes de nuit en train d’écouter de la musique électronique, ces jeunes ont eu une journée très riche en stress ; la musique les aide donc à se vider, à se déstresser.
Peut-on dire que la musique gnaouie ou hmadcha et celles d’autres confréries possèdent des vertus thérapeutiques, surtout lorsqu’elles aboutissent à la transe ?
Là, il y a le facteur culturel qui entre en jeu. On ne peut pas prendre un Russe, lui faire écouter de la musique gnaouie et s’attendre à ce qu’il entre en transe. C’est impossible. Il y a donc une charge culturelle, une histoire culturelle de la personne qui écoute cette musique. Moi, lorsque l’un de mes patients me dit qu’il va aller assister à une « lila » des gnaouas, je ne m’y oppose jamais, parce que tout ce qui est de nature à soulager les souffrances d’un malade, est bon à prendre.