Aux Pays-Bas, soigner le moral des adolescentes pour sauver leurs genoux


Libé
Vendredi 13 Juin 2025

Esmee Stuut, 15 ans, slalome entre des plots sur un terrain de foot aux Pays-Bas. Sous l'oeil des caméras, elle pense à ses amies victimes d'une douloureuse rupture du ligament croisé.
Cette blessure, assez fréquente chez les sportifs, touche surtout les jeunes footballeuses comme Esmee, les éloignant des terrains pendant plusieurs mois.

"Beaucoup de filles de mon âge passent par là, je suis contente de pouvoir les aider un peu de cette manière", confie, essoufflée, la jeune attaquante du FC Groningue, club professionnel du nord du pays.

Le ballon rond est très populaire auprès des filles et des femmes aux Pays-Bas, dont l'équipe nationale féminine a remporté l'Euro en 2017 et atteint la finale de la Coupe du monde en 2019.

Le petit pays compte plus de 175.000 licenciées, un chiffre en constante hausse, contre un peu plus de 250.000 en France par exemple.
Le test physique d'Esmee sert à améliorer les mouvements des joueuses pour éviter la fameuse blessure au genou, cauchemar de tout sportif.

Mais le physique ne fait pas tout: des études montrent que la santé mentale joue beaucoup dans la survenue d'une rupture du ligament croisé, une blessure qui nécessite une opération et de longs mois de rééducation pour revenir au haut niveau.

"Les filles ont 4 à 8 fois plus de risques de se blesser que les garçons à la puberté, la différence commence à se faire dès l'âge de 12 ans", explique Anne Benjaminse, professeure adjointe à l'université de Groningue.
Morphologie différente, ligament plus fragile pendant les règles, mauvaise humeur, stress ou fatigue : le cocktail est complet pour un mauvais mouvement.

"Divorce, décès, déménagement mais aussi une mauvaise note à l'école, une dispute, des petites difficultés à nos yeux mais de gros problèmes pour elles", font qu'elles ont plus de chances de se faire mal, analyse Mme Benjaminse auprès de l'AFP.

Cette spécialiste des sciences du sport est en charge d'une grande étude, en partenariat avec l'UEFA et la fédération de foot néerlandaise, sur le lien entre les facteurs psychosociaux et le développement d'une rupture du ligament croisé chez les filles et les jeunes femmes.
Les footballeuses entre 12 et 21 ans sont appelées à remplir régulièrement en ligne un questionnaire sur leur état d'esprit au cours de la semaine écoulée, permettant aux chercheurs de mieux axer la prévention sur la santé mentale.

Celle-ci doit devenir un "élément standard" du programme de prévention des clubs, au même titre que la musculation et la nutrition, affirme Mme Benjaminse, 44 ans.
"Cela ne doit plus être remis en cause, les filles doivent pouvoir en discuter si elles ne se sentent pas bien et il est important que les entraîneurs en prennent compte", souligne-t-elle.
Entre-temps, Esmee continue de donner de sa personne pour faire avancer la recherche sur le plan physique.

Elle enchaîne les séries de mouvements avec des changements de côté rapides, avec ou sans ballon, puis avec un défenseur qui surgit au dernier moment.
Henderika Kingma, 28 ans, manager du foot féminin au FC Groningue et coach d'Esmee, espère que les études porteront leurs fruits. Deux de ses joueuses ont subi une rupture du ligament croisé en toute fin de saison.

"On doit absolument tout faire pour éviter cette blessure chez les jeunes footballeuses", et "grâce à ces études, je sais que mes filles ont conscience" du problème, confie-t-elle auprès de l'AFP.

Mais, concède la scientifique Anne Benjaminse, "pour une partie des cas, c'est simplement la faute à pas de chance".


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