
Parmi eux se trouvaient le docteur Christian Cruz, un anesthésiste d'origine colombienne, 32 ans au moment de sa mort. Ce spécialiste de l'intubation avait été particulièrement sollicité pour prêter assistance aux patients en détresse respiratoire à cause du virus. Il souffrait pourtant de sclérose systémique, une maladie auto-immune qui l'exposait particulièrement aux risques de contagion. "Nous avons été plus plus prudents, à cause de sa maladie, mais nous ne savions pas comment il s'en sortirait en étant en contact aussi longtemps avec les malades", confie à l'AFP sa veuve, Yesenia Leyva, 33 ans, elle-même oncologue pédiatrique. Près d'elle, s'étalent les diplômes de son mari, ainsi qu'un portrait de lui et de son laryngoscope, l'outil en forme de bec avec lequel il intubait ses patients.
Le docteur Jesus de la Torre était médecin-urgentiste, l'un des plus en vue au Mexique. Jusqu'à sa mort à l'âge de 67 ans, il exerçait dans l'Etat de Morelos, dans le centre du Mexique. "Il était très dévoué, tout à sa très grande vocation", raconte son fils Federico, 43 ans, "et donnait la priorité à son travail, au point de manquer des événements familiaux, des anniversaires". Mais l'âge avait eu raison de son dévouement et il avait cessé d'exercer à l'hôpital pour prêter assistance par téléphone à ses collègues toujours sur le front de l'épidémie. Une autre victime de la Covid, le docteur Diego Gutierrez était un habitué des petites heures de la nuit durant lesquelles il traquait les tumeurs malignes. Oncopathologiste, spécialiste de l'analyse de biopsies et de tumeurs, il passait le plus clair de son temps chez lui, les yeux vissés sur un microscope que sa veuve, le docteur Ariadna Bautista, conserve avec nostalgie, de même que sa blouse et son bureau. "Je ne sais pas comment le virus est arrivé jusqu'à lui, ici, à la maison", s'interroge-t-elle, la voix brisée par l'émotion. Elle explique qu'elle se rendait au laboratoire afin de récupérer les échantillons que son mari devait ensuite analyser. "Il ne sortait pas car il était en surpoids et donc exposé à des complications en cas d'infection", ajoute-t-elle. "Il était tout pour moi", poursuit-elle avec tristesse, "dès qu'il se réveillait, il avalait son café et se dépêchait de retourner à son microscope".