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Ahmed Zaïdi lors de la discussion du projet de loi sur les partis : L’Etat est soumis à la neutralité à l’égard de la vie interne des partis


Libé
Vendredi 30 Septembre 2011

Ahmed Zaïdi lors de la discussion du projet de loi sur les partis : L’Etat est soumis à la neutralité à l’égard de la vie interne des partis

Nous attirons l’attention sur le danger de l’affaiblissement, de la marginalisation et de la balkanisation des vrais partis

Au cours de son intervention lors de la réunion de la commission de l’Intérieur, de la décentralisation et des infrastructures sur le projet de loi organique n° 29.11 se rapportant aux partis politiques, Ahmed Zaïdi, président du Groupe socialiste à la Chambre des représentants, a passé en revue les principales étapes qu’a connues le Maroc dans le domaine des libertés publiques et de la relation des partis avec l’Etat et la société, ainsi que de l’interaction de ces composantes sur le terrain. Signalant par là même les zones d’ombre et de lumière politiques qu’a connues le Maroc qui a choisi le pluralisme comme mode, mais avec des outils qui n’ont pas donné audit pluralisme sa dimension réelle.
Le président du Groupe socialiste a évoqué les dysfonctionnements qui ont caractérisé l’ancien texte de loi afférent aux partis politiques, dont la durée a été courte. Laquelle loi est née entachée  d’insuffisances pour trébucher dès la première étape électorale, avec la mise à l’épreuve de l’article 5 relatif à la transhumance politique, reflétant ainsi l’état maladif des nouveaux partis politiques.
Dans ce cadre, le président du Groupe socialiste a rappelé la proposition du gouvernement sur la loi des partis le 7 avril 2011, et notamment la nécessité de priver de représentativité tout élu ayant opté pour la transhumance, entre autres propositions contenues dans ledit projet de loi. «Nous relevons avec satisfaction que certaines de nos propositions de réformes ont été retenues», a poursuivi Ahmed Zaïdi.  
Le législateur marocain a accordé une grande importance aux partis politiques, élevés au statut d’institutions constitutionnelles dans la Constitution du 1er juillet 2011, ce qui impose à l’Etat le respect des principes de la Constitution et aux partis d’assumer une grande responsabilité dont ils devront rendre compte.
Cette importance résulte d’un cumul au niveau d’une culture partisane diverse voire contradictoire.  
D’une part, depuis l’indépendance du Maroc, nous avons toujours vécu dans le cadre du multipartisme, malgré les périodes de répression qui ont entaché les libertés publiques. C’est une caractéristique dont nous sommes fiers, puisque depuis la première Constitution, nous avons interdit le parti unique.
En contrepartie, certains partis, particulièrement ceux émanant du Mouvement national, ont subi un blocus au cours des années 60, 70 et même 80, avec en plus un soutien de certaines parties influentes au sein de l’Etat à des partis créés par l’administration.
D’autre part, nous disposons de plusieurs partis qui ont des orientations différentes, mais nous n’avons pas des projets sociétaux divers. Autrement dit, des partis avec des choix très variés. Peut- être que la culture du consensus joue un rôle dans ce cas de figure. Le consensus n’est pas souvent une position, mais parfois la différence constitue un élément devant enrichir la vie politique. Il y a aussi un autre phénomène derrière cela, la création des partis en l’occurrence, à travers des opérations d’hybridation et d’accouchement par césarienne, d’où l’intervention de l’Etat pour prendre soin du nouveau-né.
En contrepartie, nous avons connu le phénomène de la fabrication des majorités de manière abusive et contre les principes et les orientations idéologiques.
L’autre phénomène marquant le système partisan marocain réside dans la scission des partis. La scission n’a pas toujours été pour des considérations, des différences idéologiques ou internes. Des partis, bien précis, de la gauche et de la droite, ont fait l’objet de chantage et de marchandage. Dès que ces formations ne sont pas soumises à ces pratiques, on y  encourage la scission.
Ceci est une partie de notre histoire et il est de notre devoir d’en débattre afin que ne soient répétées ces pratiques et interventions  de l’Administration. De toute façon, l’appareil qui avait été derrière ces pratiques a beaucoup changé aujourd’hui et veille sur la force des partis politiques.   Je désigne l’appareil de l’Intérieur qui a agi ainsi jusqu’à la fin du siècle dernier.
Nous sommes devant une loi structurante et stratégique de la vie politique et de l’action institutionnelle. Une loi qui encadre le système partisan dans son ensemble : finances, gestion, démocratie interne et surtout la question de l’éthique à travers l’interdiction de la transhumance.
Lors de la discussion de cette question, nous avons demandé, en tant que Groupe, une formule plus ou moins proche de celle proposée par le  projet de loi et que nous discutons aujourd’hui. Malheureusement, notre demande a été rejetée et on a laissé la porte grande ouverte devant la transhumance politique, avec les résultats que l’on connaît.
Ce phénomène abject qui nuit à l’image du Parlement et de la politique est rejeté moralement. Ce phénomène pourrait être un mécanisme à même de chambouler des majorités ou créer des oppositions et des majorités. Au cas où ce phénomène ne serait pas interdit, le pays risquerait d’être entraîné dans des crises politiques  profondes et catastrophiques.
Lors d’un seul mandat législatif et entre l’annonce des résultats du vote et la fin du mandat, on a recensé près de 120 «opérations» de transhumance à la seule Chambre des représentants avec tout ce que cela signifie en termes d’échange d’intérêts mutuels et l’achat des voix. Pire, un ancien parlementaire, ex- leader politique,  a changé de couleur  partisane six fois au cours d’un seul mandat. D’autres parlementaires  qui ont, eux aussi, changé quatre fois  leur appartenance siègent encore au Parlement.
-Aujourd’hui, nous sommes confiants, car la loi interdit cette anarchie et ce manque de responsabilité.
-L’Etat est dans l’obligation d’observer la neutralité concernant la vie interne  des partis politiques. Il doit s’engager à financer ces partis à partir des résultats obtenus par ces derniers lors des élections. Mais en contrepartie, les partis politiques sont appelés à s’engager au respect d’un cahier des charges dont nous résumons les principaux points ci- après :
1-Les partis politiques doivent faire montre dune certaine efficacité et jouer le rôle que la Constitution leur assigne qui se résume dans l’encadrement, la représentation et la mobilisation. En somme, ils sont amenés à exercer une fonction pédagogique pour l’apprentissage de l’éducation à la citoyenneté, à la participation et aux comportements positifs.
2- Il est nécessaire que ces partis installent une démocratie interne dans la gestion de leurs instances et gèrent les différences lors des élections internes. Ils sont tenus également  de bannir la culture des complots et des renversements.
3-Les partis devraient s’engager aussi pour une démocratie lors de la prise de décisions.
4- La gestion financière de ces partis doit être transparente et  subir des audits périodiques dont les résultats seront publiés car si les partis réclament  la transparence de la part des établissements publics et de l’Etat, ils sont censés eux-mêmes  donner l’exemple.
Voici quelques principes auxquels les partis politiques devraient adhérer lors de la gestion de leurs affaires. De telles instances politiques  sont obligées d’être fortes. Cependant, cette force ne peut  s’acquérir avec la balkanisation du paysage politique. Les démocraties modernes reposent sur deux ou trois grands partis autour desquels s’animent d’autres petits partis. (C’est le cas des Etats-Unis, de la France, de l’Allemagne, de l’Espagne, du Japon, de l’Angleterre…) La polarisation et le projet sociétal sont primordiaux pour acquérir puissance et force au niveau de chaque parti politique. Le vide dans la scène politique est un danger qui mène vers la déroute, car il entraîne la marginalisation, la faiblesse et la balkanisation des partis qui est une catastrophe politique.
On peut citer l’exemple des pays où les partis politiques étaient affaiblis ou interdits ou qui ont une présence formelle telles que la Libye, la Tunisie, l’Egypte, la Syrie et  auparavant l’Irak. Même lorsque les soulèvements ont eu lieu et que les révolutions ont éclaté, on n’a pas trouvé de partis politiques capables de mener à bien ces révolutions. Et par conséquent, ils convergent vers l’inconnu. Nous devons donc être confiants quant à notre situation et nos épreuves. Sauf que les textes ne suffisent pas pour atteindre les objectifs escomptés. Ils doivent être accompagnés dans la pratique de principes moraux. La pratique quotidienne du parti doit être à la hauteur de la Constitution de 2011.
Nous devons également couper court à la médiocrité  afin de donner une leçon de probité et de transparence avant de les réclamer à la société et à l’Etat. Mettons fin à cette tendance machiavélique qui prend pour objectif le nombre de sièges. Veillons à la valeur et à la noblesse de la mission dont nous sommes investis.
En contre-partie, mettons fin aux campagnes de dénigrement et de diffamation contre les grands et les vrais partis politiques. Critiquons-les, opposons-nous à leurs idées et décryptons leurs discours, mais sans mensonge, ni assertion, ni désinformation.
Car, on a porté préjudice aux vrais partis politiques à travers ces campagnes destinées à les chasser de la scène politique.
Un acte si grave qui a permis  à des personnes dénuées de principes élémentaires de l’action politique de se transformer en exégètes dans le dénigrement des partis politiques. Tout en rejetant  ce comportement et ses dangers,  n’oublions pas  pour autant notre responsabilité en tant que partis politiques.
Les partis doivent participer au côté de la presse dans la prévention, la sensibilisation et l’émergence d’une opinion publique vigilante, consciente et citoyenne.
Conformément aux dispositions de la nouvelle Constitution, les partis politiques  sont appelés  aujourd’hui à mettre en œuvre la gouvernance interne et à  baliser  la voie aux compétences selon le mérite.


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