Point de vue : Pour une mise en œuvre de la participation des femmes


Abdellah Boularbah
Vendredi 30 Avril 2010

Point de vue : Pour une mise en œuvre de la participation des femmes
La femme assume un rôle essentiel dans la société. En effet, dans le secteur économique, les femmes représentent au Maroc plus de 30% de la main-d'œuvre active en milieu urbain et plus de 40% en milieu rural, sans compter leur travail domestique dont la valeur reste toujours ignorée. Cependant, leur place sur la scène politique reste modeste voire marginale. Les femmes qui représentent la moitié de l'électorat et plus de la moitié des votants n'ont profité, jusqu'aux dernières élections communales, que des miettes en matière de représentation au sein des conseils communaux (seuls 0,34% d'élus locaux sont des femmes), soit le taux de représentation le plus faible au niveau international. Sans le système de liste complémentaire mis en œuvre au cours des élections communales de juin 2009, il aurait été impossible d'élire pour la première fois 3428 femmes aux conseils communaux, soit un taux de 12,38%.
Le paradoxe entre l'importance des rôles assurés par les femmes et la marginalité de leur place sur la scène politique est lié objectivement à leur statut d'infériorité dans une société patriarcale. Cependant, la pérennité de cette situation dépend de l'incapacité des acteurs politiques à mettre en œuvre l'approche genre au niveau socioéconomique et politique.
Le développement de la participation féminine n'est pas seulement un problème de conscience qui peut être résolu à travers la sensibilisation, de même qu'il n'est pas insoluble du fait qu'il tire ses origines de la société patriarcale. Il dépend dans une large mesure de l'habileté et de la capacité des acteurs politiques et civils, convaincus de l'importance du rôle et de la participation des femmes pour résoudre les problématiques du développement durable et de la modernisation sociale et politique. Beaucoup de femmes disposant d'un niveau de conscience respectable, appartenant à des partis politiques ou des associations, se trouvent néanmoins confrontées à une multitude de problèmes et d'handicaps dans l'exercice de leur rôle politique ou associatif. Les femmes sont d'emblée immergées sous le flot des tâches quotidiennes, liées au travail domestique, à l'éducation des enfants, à l'intérêt porté aux besoins de la famille, en plus de leur travail hors du foyer, sans parler de toutes les difficultés au travail dans la rue et au domicile, particulièrement la violence et le harcèlement sexuel.
La réponse à la problématique de la participation des femmes nécessite la mise en œuvre de l'approche genre comme outil méthodologique d'analyse et outil d'habilitation des femmes par le biais de la planification stratégique basée sur la prise en compte des besoins essentiels des femmes, considérées non pas comme une masse abstraite, mais en tant que catégories sociales, professionnelles ou d'âge bien définies sur un territoire donné, auxquelles tous les acteurs doivent assurer toutes les conditions nécessaires à leur participation effective dans le processus d'identification de leurs besoins, de définition des solutions possibles, de leur mise en œuvre, de leur suivi et évaluation.
Faire participer et impliquer les femmes dans tous les aspects de la vie, n'est pas un luxe idéologique. C'est plutôt une condition sine qua non de tout développement socioéconomique, politique et culturel. Les femmes représentent la moitié de la société, la moitié de ses forces vives, il serait aberrant pour toute société d'espérer un vrai développement sans la moitié de son énergie, sans la moitié de ses forces.
Beaucoup d'acteurs sont désormais convaincus de ce postulat du développement socio-politique.
Cependant, ils n'arrivent pas encore à tenir le principal maillon du processus de développement de la participation féminine. Ils continuent à ignorer ou conçoivent vaguement le rôle de l'Etat et des collectivités locales dans cette affaire, alors qu'il est ici primordial de par l'importance des moyens humains et financiers qu'ils détiennent, issus d'ailleurs des contribuables. Si l'Etat et les collectivités locales disposent de programmes de routes, d'électrification ou d'eau potable, qu'est-ce qui les empêche d'avoir des programmes concrets pour développer la participation féminine, par leur  prise en charge même partiellement et progressivement des coûts du rôle de reproduction des femmes ? Et de celui du travail domestique ? Le travail domestique et la procréation seraient-ils de moindre valeur que les routes, l'électrification ou l'eau potable ? Les enfants pour lesquels les femmes se sacrifient souvent toutes seules pour les élever et les éduquer, ne sont pas leurs enfants à elles seules. Ce sont les enfants des hommes et de la société tout entière. Il est de la justice, de l'équité et du droit des femmes que la société affiche enfin sa pleine reconnaissance à l'égard de ses femmes, en affectant une partie de ses ressources à la prise en charge du rôle de reproduction, de valoriser le travail à domicile et de concrétiser cela par une affectation de ressources financières. Condition nécessaire pour permettre à nos femmes de dégager un temps libre à investir librement pour leur participation socio-politique, culturelle ou simplement en loisir. 


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