Mohammed Ait Ouakrouch, secrétaire régional du Syndicat national de l’enseignement (FDT) à Marrakech-Tensift-El Haouz : “Nous voulons sauver l’école publique”


Propos recueillis par Abdelali Khallad
Vendredi 7 Janvier 2011

Mohammed Ait Ouakrouch, secrétaire régional du Syndicat national de l’enseignement (FDT) à Marrakech-Tensift-El Haouz : “Nous voulons sauver l’école publique”
Pour le secrétaire régional du Syndicat
national de
l’enseignement affilié à la Fédération
démocratique
du travail, les efforts consentis resteront sans impact sur les staffs
pédagogique
et administratif tant que le MEN
persistera à gérer
unilatéralement le Plan d’urgence. Entretien

Libé : En tant que secrétaire régional du Syndicat
 national de l’enseignement (FDT), comment
évaluez – vous la rentrée scolaire 2010-2011 dans
la région de Marrakech-Tensift-El Haouz ?

Ait Ouakrouch : Nous considérons la rentrée scolaire comme étant l’un des principaux indicateurs de la rentrée sociale et politique au Maroc. A cet effet, nous avons tenu un conseil régional le 19 septembre 2010 en présence des représentants des différentes provinces et délégations de la région, ce qui nous a permis, entre autres, de définir de façon objective les grands traits de cette rentrée scolaire au niveau de la région MTH qui coïncide avec la deuxième année de mise en œuvre du plan d’urgence du MEN. Le premier constat fait état de déficit en infrastructures et structures d’accueil des établissements scolaires qui font encore la cible d’actes de vandalisme et de pillage, l’accentuation des phénomènes du sureffectif et des classes sureffectif, le manque de suivi et de contrôle des chantiers de construction et de mise à niveau des établissements scolaires. On constate également un déficit au niveau des domiciles fonctionnels et administratifs dans le monde rural, un déficit de ressources humaines redéployées de façon arbitraire  et inutile bafouant ainsi la stabilité et les acquis sociaux sociale des enseignants. Nous avons aussi soulevé des problèmes relatifs  aux services de nettoyage et de sécurité au sein des établissements scolaires, et des protestations du corps administratif faute de respect des engagements tenus au préalable par le ministère de tutelle. Sans oublier la pénurie en cadres d’accompagnement pédagogique, et l’atmosphère crispée provoquée par la note ministérielle N° 154 ayant pour objet et objectif la « sécurisation du temps scolaire ». D’autre part, nous notons avec inquiétude le recrutement direct de professeurs qui n’ont jamais bénéficié de formation susceptible de les doter de méthodes pédagogiques et la série de nominations et remerciements des responsables régionaux et provinciaux du secteur sans leur donner l’occasion de se défendre et de défendre leurs bilans devant des commissions. Ce qui laisse penser et dire que cette région a une certaine spécificité…

La mise en œuvre du plan d’urgence entame sa deuxième année,
 pouvez-vous nous en faire une évaluation de
mi –parcours à la lumière de la position du SN(FDT)?

Il faut tout d’abord souligner que nous n’avons pas une position négative du Plan d’urgence tant qu’il traduit les orientations et les recommandations exprimées par le rapport du Conseil supérieur de l’enseignement, comme nous avons accueilli positivement toutes les démarches visant l’amélioration de la qualité des structures d’accueil des établissements scolaires. Toutefois, nous nous opposons toujours aux formes de déracinement et de défiguration et d’affaiblissement des rôles de l’école publique avec la privatisation des services, et la gestion décentralisée, et instable  des ressources humaines qu’on traite selon une approche qui est  loin d’être motivante. Quant au premier bilan du Plan d’urgence dont l’impact marquera l’avenir de l’enseignement au Maroc, il vient d’être dressé par le MEN , en l’absence des syndicats , avec pour réalisations l’élargissement et l’amélioration de l’offre scolaire, l’appui financier direct aux familles rurales, la lutte contre la déperdition scolaire, l’amélioration de la sécurité au sein des établissements scolaires, le parachèvement du processus d’instauration de la pédagogie des compétences, la restructuration de l’année scolaire et le renforcement des compétences des ressources humaines par le biais des programmes de formation continue, entre autres.
Mais ces efforts resteront sans résonance dans le milieu des staffs pédagogique et administratif tant que le MEN persistera  à gérer unilatéralement le Plan d’urgence. Quant à la région de MTH qui compte trois millions habitants y compris 630000 élèves et 28000 fonctionnaires dans le secteur de l’enseignement, elle a bénéficié, dans le cadre de ce Plan d’urgence pour l’exercice 2010, d’un budget de 75623301  dirhams dont 73% (551473613,00) a été consacré aux sept projets du pôle de généralisation de l’enseignement. La gestion de ce programme sur le plan régional reste toujours fidèle à la règle d’exclusion des syndicats sachant que le suivi de la mise en œuvre  de ses composantes devrait se faire au niveau provincial et régional. A cet effet, nous comptons consacrer une session du conseil régional du SNE à l’évaluation de mi-parcours de la mise en œuvre du Plan d’urgence au niveau de la région Marrakech-Tensift-El-Haouz.

Pouvez- vous nous dresser un premier  bilan des actions réalisées  par
l’actuel  bureau régional du Syndicat national de
l’enseignement (FDT)
à MTH ?

Il faut noter tout d’abord que nous réservons un intérêt  spécial à l’organisationnel dans notre plan d’action, car nous sommes convaincus  que notre efficacité syndicale et sociale  repose sur la probité et la force de l’organisation. A cet effet, nous avons accentué nos efforts sur un long et fructueux processus de restructuration de nos instances locales et provinciales à Kelaat Seraghna, Attaoueya, Tamelalt, El Haouz, AitAourir,  Tahnaout, Amezmiz, Ourika, Rhamna, Skhour, Ben Guerir, Chichaoua, Imintanout, Mejjat, Sidi El Mokhtar, Marrakech Lamnara , Ait Daoued et Essaouira avec pour perspective la structuration des secrétariats provinciaux  de Marrakech, Essaouira et Chichaoua.
Ce travail organisationnel de longue haleine nous a permis, entre autres, de renforcer notre outil organisationnel et à la fois tripler le nombre de nos adhérents.
En parallèle à ce programme interne, nous avons engagé un dialogue social avec l’Académie régionale dans le cadre de la gestion du mouvement social tout en respectant les règles de transparence et d’équité avec nos adhérentes et adhérents.  Ce qui nous a permis  de résoudre  50% des dossiers sociaux partagés entre les différentes délégations de la région.
D’autre part, nous avons travaillé sur un programme de lutte contre le travail des enfants en menant une campagne de sensibilisation contre la déperdition scolaire en partenariat avec le syndicat hollandais AOB au sein de plusieurs établissements scolaires, en plus de plusieurs activités culturelles et environnementales de grande envergure. Quant au volet de renforcement des compétences, nous avons organisé une session de formation au  profit des enseignants chargés des cours d’appui scolaire, deux sessions de formation au profit de 40 militantes/responsables syndicales en partenariat avec un syndicat espagnol, entre autres.
Pour les mois à venir de l’année scolaire 2010/211, nous comptons organiser un conseil régional qui couronnera ce long processus de restructuration de notre organisation au niveau régional, tout en  accordant une priorité aux problèmes en suspens au niveau de la délégation El Haouz suite au non-respect des engagements tenus par la délégation du MEN. Pour le volet formation, nous comptons organiser une session de formation à l’adresse de 50 responsables syndicaux issus des régions de Guelmim-Smara, Souss-Massa-Draa, Tadla-Azilal et Marrakech-Tensift-El Haouz , en parallèle au parachèvement des activités du projet de lutte contre le travail des enfants.

Quelle est votre stratégie pour le développement des mécanismes de l’action
syndicale à la lumière des enjeux et défis à venir?

L’action syndicale qui a toujours plaidé et milité pour épargner aux couches sociales vulnérables les aléas de l’appauvrissement engendré par le libéralisme farouche, jouit d’un statut très avancé dans les pays démocratiques vu son intérêt dans la dynamisation de l’action sociale et politique. A cet effet, nous considérons que l’abandon et l’affaiblissement de la confrontation et la lutte sociale ont largement contribué à la balkanisation de la scène politique et syndicale envahie par des opportunistes sans expression sociale.
Le mouvement syndical au Maroc a largement contribué à l’indépendance du pays et a milité pendant plusieurs années pour l’instauration  des droits, des libertés et de la démocratie, tout en menant une lutte acharnée pour les droits fondamentaux des salariés et les libertés syndicales. Le Syndicat national de l’enseignement accorde un grand intérêt aux différentes problématiques nationales et universelles pour avoir une meilleure visibilité de la chose syndicale et sociale. A cet effet, nous estimons nécessaire de continuer notre lutte afin d’améliorer les conditions matérielles et morales des salariés en réaction au coût du panier, tout en préservant les libertés syndicales et bien sûr œuvrer pour un environnement sain en parallèle au renforcement de notre présence dans les forums sociaux et méditerranéens pour faire face au libéralisme sauvage par le biais d’alternatives susceptibles de mener à une coexistence au rythme de la synergie et de l’équité. Sur le plan social, nous estimons primordial de protéger les espérances des enseignantes et enseignants qui ont malheureusement pris leur distance par rapport à l’action syndicale faute de sérieux et de crédibilité organisationnelle dans certains cas.
Notre lutte visera la satisfaction de nos revendication tout en accompagnant la mise en œuvre du Plan d’urgence en vue de l’évaluer clairement et contrer toutes les tentatives visant la défiguration du  secteur. Cependant, nous fournirons plus d’efforts au niveau de la formation pédagogique, didactique et syndicale de nos militants, tout en instaurant des outils fiables et durables de la coordination syndicale qui représente un mécanisme efficient de mobilisation et de plaidoyer.
D’autre part, nous pensons qu’il est temps de libérer l’action syndicale de l’emprise de sa focalisation sur le mouvement social et les mutations, malgré leur intérêt, en vue de toucher d’autres volets constituant le fond de son projet et ses actions. Il faut reconnaître que l’image de l’action syndicale a été ternie à plusieurs reprises par des comportements malsains qui traduisent la misère morale et intellectuelle de leurs auteurs qui ne représentent finalement que leurs intérêts personnels. De ce fait, nous allons concentrer nos efforts pour mettre à nu toutes ces pratiques qui nuisent à la noblesse de la mission syndicale et initier un débat élargi autour de la question de gestion des ressources humaines dans le secteur de l’éducation nationale.


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