Manque d'eau, dégradation des routes, absence de moyen de transport… : Les chemins de croix des habitants de Tamgret Ikhssane


DNES : IDRISS OUCHAGOUR
Jeudi 9 Décembre 2010

Manque d'eau, dégradation des routes, absence de moyen de transport… : Les chemins de croix des habitants de Tamgret Ikhssane
A entendre les beaux discours  prononcés jusque-là sur les politiques de désenclavement du monde rural  et les prétendues réalisations pour son développement, on rechignerait à imaginer qu’une région comme Tamgret Ikhssane puisse vivre dans l’isolement. Pourtant,  Tamgret Ikhssas se trouve à une dizaine de  kilomètres du centre urbain de Lakhssas. Mais, elle manque de tout. Le premier grand handicap qui plombe son enclavement est la qualité de la route. En effet, le seul accès n'est qu'un semblant d’axe routier. A cause de son caractère sinueux et caillouteux qui en fait un trajet dangereux. Cela en saison sèche. En temps  pluvieux, malheur à qui s’y aventure. Il  devient impraticable. Les torrents  y charrient  grosses pierres et quantités de  terres rouges arrachées des montagnes, pour le transformer en flaques marécageuses. Autant dire un bourbier pour véhicules tous calibres confondus !.  
Bref, en hiver, les  quatre  hameaux de cette région, à savoir Id Lâaoud, Tamgrt, Ahwach et Awassa sont « hermétiquement » coupés du monde extérieur. Par conséquent, toute personne qui, par malheur, achoppe un malaise de santé, doit prendre son mal en patience et souhaiter une guérison providentielle. La  plus proche structure sanitaire (un simple dispensaire) étant à une dizaine de kilomètres des villages. Il n'est pas étonnant  de savoir que la mortalité infantile chez les habitants est fort courante. Les femmes enceintes par ces temps pluvieux sont livrées à elles-mêmes. Elles doivent se contenter d'accoucher chez elles, par les moyens traditionnels avec tout ce que cela comporte comme risques pour leur santé et celle des bébés.
L'état de cet accès routier fait que peu de véhicules fréquentent les lieux, même lors d'une  météo  clémente.   Les quelques Khettafas (transporteurs clandestins) opérant dans le centre d'Aît Rekha et Lakhssas se refusent à offrir leurs services aux habitants de cette région. Ceux qui en consentent, le font au prix d’un billet pour un voyage à Casa !. Les ânes et mulets constituent le  seul moyen de transport pour l'ensemble des habitants afin de faire leurs emplettes hebdomadaires au souk d'Ait Rekha. C'est aussi le cas pour les petits enfants scolarisés des villages d'Id Lâaoud, Ahwach et Awassa. Ceux-ci, faute  de moyen de transport, recourent aux ânes pour parcourir chaque jour un trajet à perdre haleine à travers les versants abrupts des montagnes,  et rejoindre l’école au village lointain de Tamgret.  
Les souffrances de ces villageois ne s'arrêtent pas là. L'autre grand problème qui empoisonne leur vie est la pénurie d'eau potable. Les eaux pluviales  stockées dans les Natfiates (bassins collectifs souterrains) constituent leur seule source d'approvisionnement. Il suffit alors que le ciel devienne parcimonieux pour que ces réservoirs se mettent à sec. Et bonjour la disette et la soif !.Comme cela arrive d'ailleurs chaque été où la consommation d'eau connaît des pics. L'hygiène devient alors un luxe face à l'obsession au quotidien de rationner les petites quantités d'eau disponibles pour subvenir aux besoins vitaux. Voilà pourquoi il n'est pas rare que les maladies microbiennes parmi les vieux et les petits sévissent en période estivale. Bref, avec tous ces maux persistants,  Tamgret Ikhssane continue d’être pour les habitants des centres urbains proches, l’image d'un monde rural archaïque. Avec ses modèles: montagne typique et bétail comme moyen  de somme et de transport…
Toutefois, loin d'être fatalistes, les villageois n'imputent pas cette situation aux seules conditions géographiques difficiles; ils n'hésitent pas à mettre à l’index leurs élus. Plus exactement, ils parlent d'un « ostracisme » dont ils sont victimes et qui les fait vivre dans un sentiment de frustration. Une discrimination à l'encontre de leurs villages sur « la base de critères d'allégeances électoralistes ».  Les habitants mettent en avant le refus de la commune d'Aît Rekha de traiter sur un pied d'égalité les associations des villages de la commune quant aux subventions qui leur sont octroyées par le conseil communal. Sachant que ce dernier n'hésite pas à se montrer généreux avec celles se trouvant dans ses bonnes grâces en les faisant bénéficier de dons allant jusqu'à 8000 DH. Ceci alors que le montant offert à l'Association de Tamgret n'a jamais excédé la bagatelle de 500 DH par an. D'autre part, les villageois arguent le fait que leur association n'a jamais été invitée, à l'instar des autres entités associatives, à prendre part aux réunions du conseil comme le stipule la nouvelle Charte communale. Puisqu'elle est exclue du comité de l'égalité des chances de la commune. Un autre argument de taille évoqué pour incriminer le conseil qui, disent-ils, ne cesse de leur tenir la dragée haute : son refus de tenir sa promesse faite devant le gouverneur de Tiznit (lorsqu'Aît Rekha relevait encore de cette province). Laquelle promesse consiste en l'engagement de la commune comme partenaire de l'association, pour cofinancer le coût de l'étude technique afférente au projet de réaménagement de l'axe routier de Tamgret et qui devrait être produite comme document principal pour prétendre à la subvention de l'INDH.
Les habitants parlent de l'entêtement du conseil à faire bénéficier leurs villages d’un réseau de distribution de l'eau potable. D'autant qu'il vient d'en faire profiter un autre douar à proximité du centre d'Ait Rekha. Ils s'estiment mieux « élus » voire prioritaires quant à recevoir ce projet, eu égard à la gravité de leur situation en termes de disponibilité d'eau potable. Mais, devant cet état, les villageois ne comptent pas y aller avec le dos de la cuillère pour  faire aboutir leurs doléances. Comme rapporté dans un communiqué de l'Association Annour pour le développement et la coopération de Tamgret, ils envisagent d’organiser prochainement un sit-in de protestation  ouvert devant les locaux de leur commune jusqu'à ce qu'une solution soit trouvée aux divers problèmes dont souffrent leurs villages.


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