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Les renseignements américains dans la défiance de leur imprévisible président


Mardi 17 Décembre 2019

Il ne les écoute pas, ne semble pas faire de hiérarchie entre ses sources et prend des décisions sans même les prévenir: la relation n'a jamais été aussi distendue, si ce n'est franchement tendue, entre le président américain Donald Trump et ses services du renseignement.
Les exemples d'affronts du président à ses services sont légion. En mai, il avait annoncé l'ouverture de dossiers classifiés sur la Russie pour se défendre contre les accusations de collusion avec Moscou lors de la campagne électorale de 2016.
Peu après, il annonçait le départ de Dan Coats, directeur du National Intelligence, qui chapeaute les services américains du renseignement, et proposait à la place le très républicain John Ratcliffe, connu pour ses saillies conspirationnistes sur Fox News, la chaîne préférée du président.
Ratcliffe a renoncé face à l'opposition féroce contre sa candidature. Mais Susan Gordon, adjointe de M. Coats et qui briguait le poste suprême, est restée à quai. Elle s'est épanchée début décembre, raillant le premier président de l'Histoire "qui n'ait aucun cadre ni fondement pour comprendre les limites du renseignement". Et de citer une de ses réponses classiques aux briefings: "Je ne vous crois pas".
Confirmation d'un ancien analyste de la CIA devenu politologue: "Quand j'étais à la CIA, le gros truc était d'avoir un papier dans le briefing présidentiel quotidien. C'était de l'or, professionnellement parlant", se souvient celui qui a servi sous George W. Bush et Barack Obama.
"Je savais que les deux prenaient ça extrêmement au sérieux", ajoute-t-il. "Maintenant, j'ai vraiment l'impression (...) qu'il prend son briefing sur Fox et avec ses copains".
Certes, Mike Pompeo, l'actuel patron de la diplomatie américaine, était son premier chef de la CIA et s'est imposé comme un cadre majeur de son administration. Il se rendait à l'époque régulièrement à la Maison Blanche, pour des briefings que Donald Trump appréciait.
Mais le président compte jusqu'au FBI, la police fédérale, parmi ses adversaires: c'est elle qui a ouvert l'enquête russe. Et Trump s'en est encore pris la semaine dernière à Christopher Wray, qu'il a pourtant lui-même nommé à la tête du FBI, estimant qu'il ne réussirait "jamais à mettre de l'ordre" dans ses services.
Evidemment, le dédain fait son effet. Fin 2018, son secrétaire à la défense, le général James Mattis, avait démissionné en arguant notamment de son désaccord avec M. Trump sur la Syrie. Il a ensuite été qualifié de "général le plus surestimé au monde". L'ensemble du renseignement et des militaires se sont sentis insultés.
Les services travaillent sur "ce qu'ils pensent être leurs plus grosses inquiétudes et comment y répondre et ils sont complètement ignorés", souffle Brian Perkins, ancien analyste de la marine aujourd'hui chercheur à la Fondation Jamestown.
De nombreux cadres du renseignement sont partis dans le privé, ajoute-t-il, effarés en particulier par "les frustrations auxquelles a été confronté Mattis, incapable de se faire entendre par Donald Trump sur la Syrie ou l'Afghanistan. Le renseignement est censé être objectif mais si les choses ne sont pas écoutées avec un peu d'ouverture d'esprit, à quoi ça sert?"
En janvier, le président avait traité de "naïfs" ses responsables du renseignement, en leur conseillant de "retourner à l'école". Puis il avait assuré être en accord avec eux sur les grands dossiers. Plus récemment, lorsque Donald Trump a décidé de lâcher les Kurdes en laissant le champ libre à l'attaque turque en Syrie, le désarroi fut total. Outre qu'il torpillait une alliance majeure, il renforçait la position des Russes dans la région.
Dans la lutte contre le terrorisme, où chacun souligne l'importance vitale du partage des informations entre puissances, ses coups de sang font des dégâts. "C'est plus difficile politiquement de coopérer avec les Etats-Unis", note Daniel Byman, spécialiste de l'antiterrorisme à l'université Georgetown de Washington.
"Et il y a un problème rhétorique. Une partie de l'objectif est de convaincre les musulmans dans le monde qu'ils peuvent vivre leur vie et sont les bienvenus, où qu'ils soient. Et Trump renforce l'idée selon lequel l'Ouest est en guerre avec l'Islam". Et le chercheur d'ajouter: "Ce sont là certaines des raisons pour lesquelles on sait qu'ignorer ses conseillers est dangereux".
La période électorale et la polarisation extrême de la politique américaine aggravent encore les inquiétudes. Reste le fonctionnement d'institutions solides.
"Le renseignement peut toujours influencer des décideurs politiques majeurs. Le président n'a jamais été le seul consommateur du renseignement", tente de relativiser Seth Jones, un ancien militaire qui a notamment servi en Afghanistan, devenu aujourd'hui expert en contre-terrorisme au Centre pour les études stratégiques internationales (CSIS).
"Il est toujours important de collecter et d'analyser l'information, et les Etats-Unis sont toujours impliqués dans beaucoup d'opérations qui ne nécessitent pas une autorisation présidentielle".

Suite à l’expulsion de diplomates chinois, Pékin dénonce une faute des Etats-Unis

La Chine a qualifié lundi de "faute" l'expulsion de diplomates chinois par Washington, après des informations de presse affirmant qu'ils avaient tenté en septembre de s'introduire dans une base militaire américaine.
Il s'agit du dernier incident en date entre les deux premières puissances économiques mondiales, quelques jours après l'annonce d'une trêve dans leur guerre commerciale.
Un article du New York Times a affirmé dimanche que les Etats-Unis ont "secrètement" expulsé deux diplomates chinois qui avaient tenté en septembre de s'introduire dans une base militaire dans l'Etat de Virginie.
Au moins l'un d'eux est soupçonné par les autorités américaines d'être un agent du renseignement chinois, a ajouté le quotidien, qui cite des responsables américains sous couvert d'anonymat. Il s'agirait des premières expulsions de diplomates chinois aux Etats-Unis pour "espionnage" depuis plus de 30 ans.
Interrogé à ce sujet, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Geng Shuang, a dénoncé lundi des accusations "totalement contraires aux faits" et appelé les autorités américaines à "réparer leur faute".
Il a précisé lors d'un point de presse que Pékin avait "protesté officiellement" auprès de Washington.
L'incident s'est déroulé dans une "installation sensible" près de Norfolk, en Virginie, qui abrite des forces spéciales, selon le récit publié par le New York Times.
Deux responsables de l'ambassade de Chine à Washington, accompagnés de leurs épouses, se sont présentés en voiture au poste de contrôle de cette base mais, faute d'autorisation, se sont vu refuser l'accès, a raconté le journal.
Au lieu de repartir, le véhicule aurait continué son chemin dans la base, échappant au contrôle des militaires pour finalement être bloqué par des camions.
Le motif de cette tentative d'intrusion présumée n'a pas été éclairci, selon le journal.


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