Après plusieurs jours de manifestations relativement calmes, des affrontements meurtriers se sont produits au Caire où six personnes auraient été tuées et environ 1.500 blessés lors de heurts entre pro et anti-Moubarak.
Ces échauffourées se sont déroulées sans que l'armée, pièce maîtresse dans le jeu politique, prenne partie pour l'un des deux camps ou qu'elle intervienne afin de faire cesser les troubles.
Les deux camps se sont affrontés à l'aide de pierres, de bâtons et de cocktails Molotov avant que les partisans de Moubarak fassent usage d'armes à feu au cours de la nuit et tuent un manifestant sur la place Tahrir, selon un médecin cité par la chaîne Arabia.
Malgré les attaques, les opposants au gouvernement ont conservé le contrôle de la place, lieu symbolique de leur révolte qu'ils occupent depuis 10 jours.
Dans ce face à face, vendredi, journée traditionnelle de prière, était attendue avec attention, l'opposition ayant appelé à un nouveau rassemblement de masse après celui de mardi qui a réuni plus d'un million de personnes au Caire.
"S'ils sont attaqués comme ils l'ont été aujourd'hui, par des groupes de jeunes gens armés, il y a alors le risque d'une véritable instabilité", juge Elijah Zarouan, expert appartenant à l’International Crisis Group. "Je crains que cela soit le signe avant-coureur de troubles plus grands".
A Washington, un haut responsable de l'administration Obama a dit partager l'analyse faite par les manifestants et par les témoins sur place selon laquelle que les assaillants ont été lancés par un allié de Moubarak pour intimider les contestataires.
"Scènes méprisables"
A Londres, le Premier ministre David Cameron a également dit prendre au sérieux l'idée que ces violences sont orchestrées par le gouvernement égyptien.
"S'il s'avère que le régime a d'une quelconque manière soutenu ou toléré ces violences, cela serait totalement inacceptable. Nous avons assisté à des scènes méprisables", a dit Cameron à la presse.
Les effets bénéfiques, en termes d'image, que Moubarak pouvait avoir obtenus en annonçant sa décision de ne pas briguer un nouveau mandat en septembre, se sont dissipés dans les violences de ses partisans.
Mais pour les auteurs de ces attaques, le problème n'est pas celui d'une campagne de relation publique: des journalistes y compris étrangers ont été agressés et selon le Comité de protection des journalistes (CPJ), le but est d'imposer une censure.
"Ce qui se passe jette une ombre très négative sur l'image du gouvernement de Moubarak. Cela ternit son image à l'étranger", a jugé Moustapha Kamel al Sayyid, politologue.
Pour Hassan Nafaa, figure de l'opposition égyptienne, ces agressions sont "une tentative stupide et désespérée de la part du Parti national démocratique et de la part de l'appareil d'Etat".
"Cela ne mettra pas fin à la contestation. Ce n'est pas une révolution sur la place Tahrir. C'est un soulèvement général", a-t-il ajouté.
La ligne dure choisie par Moubarak qui entend aller jusqu'au bout de son mandat a eu l'heur d'agacer les Etats-Unis dont le président égyptien est un allié fidèle depuis 30 ans.
Mardi, Barack Obama avait expliqué à son homologue que le temps du changement était venu et que la transition du pouvoir devait débuter maintenant.
Face au refus de Moubarak, Robert Gibbs, porte-parole de la Maison blanche, a jugé bon de rappeler que "maintenant veut dire maintenant", accentuant encore un peu plus la pression sur le dirigeant égyptien.