L’épuisement professionnel toucherait entre 5 à 10% des salariés

Le “burn out” est-il reconnu en tant que maladie professionnelle ?


Par BENNACEUR ZIGZI*
Mercredi 29 Juillet 2009

L’épuisement professionnel toucherait entre 5 à 10% des salariés
Certains psychologues nous disent : «L’épuisement professionnel est un processus qui s’installe progressivement et la personne qui le subit franchira différentes étapes plus ou moins rapidement en fonction de sa capacité à tolérer le stress. D’abord, galvanisée, débordante d’énergie et d’ambition, elle se fixera des objectifs de performances élevées qui nécessiteront qu’elle s’investisse entièrement dans son travail. Ainsi, une très grande partie de son énergie y sera consacrée.
Puis, arrive une étape où, malgré ses efforts, ses résultats ne sont pas à la hauteur de ses objectifs. Généralement, elle est perfectionniste, responsable et n’aime pas le travail bâclé. Elle redoublera donc d’ardeur. Elle n’hésite pas à travailler le soir et durant les week-ends pour satisfaire aux exigences de son travail. Ses patrons et ses collègues en profitent pour s’appuyer de plus en plus sur elle et la pression devient, pour elle, intense.
Arrive un point où elle déchante. Elle est fatiguée et déçue. On lui en demande de plus en plus. Elle a l’impression qu’elle n’y arrivera jamais et que ses efforts ne sont pas reconnus à leur juste valeur. Elle devient frustrée, s’impatiente, s’irrite. Pour faire face à cette situation, elle pourra prendre des stimulants pour se doper et, pour arriver à dormir, des somnifères ».
Traduit littéralement, le burn out donne "brûlure intérieure" bref, un mal qui vous consume. En langage médical on parle plutôt d'épuisement professionnel. "C'est la phase ultime et catastrophique du stress".
Difficile à chiffrer, le burn out toucherait entre 5 à 10% des salariés, à des degrés plus ou moins élevés. Ce phénomène ne se produit pas à l'improviste, il est précédé d'une période de stress prolongée et résulte d'un épuisement à la fois physique et psychologique. "Lorsque le stock émotionnel est épuisé, on assiste à une déshumanisation de la personne", explique Patrick Légeron psychiatre français.
Détecté pour la première fois chez des professionnels émotionnellement très exposés, tels que les infirmiers, les pompiers ou les policiers, le burn out touche aujourd'hui potentiellement l'ensemble de la population. Le docteur P.Légeron nous aide à en détecter les symptômes.
Les signes avant-coureurs
Ces premiers signes sont révélateurs d'un grand stress, particulièrement violent ou fréquent. Ils se concrétisent par des palpitations, les mains moites, des suées, une digestion difficile, des troubles du sommeil, des troubles sexuels, une consommation accrue de tabac et d'alcool ou encore une émotivité exacerbée.
C'est à ce moment qu'il faut intervenir car la situation est encore réversible. Pour Patrick Légeron, il s'agit d'une période d'alerte :"L'être humain est une machine complexe qui envoie des signaux quand elle arrive en surchauffe. C'est le rôle des managers de repérer ces signes avant-coureurs".
Les principaux signes avant-coureurs et/ou manifestations de l'épuisement professionnel selon les travaux du Dr. Arlene MacBride (1993) tels que rapportés par Dr. Yves Lamontage:
-perte graduelle de satisfaction au travail:le sujet n'a pas le goût d'aller travailler et se rend compte de la perte de plaisir au travail ;
-apparition de plusieurs problèmes de santé mineurs: maux de tête, de dos, d'estomac, rhumes à répétition, troubles intestinaux, perturbations du sommeil ;
-rejaillissement des problèmes sur le milieu de travail: le sujet réagit de façon inappropriée face à ses collègues ou à des situations de travail. Il devient de plus en plus irascible et se coupe de tout contact social ;
-la détérioration du rendement et de la productivité: elle s'accompagne d'une dépression et d'une apathie accrues. L'aboutissement final de l'épuisement se caractérise par une apathie totale et l'incapacité de mobiliser les ressources intérieures pour répondre aux exigences extérieures.
Les symptômes physiques
Une fois la période de stress extrême passée, c'est au contraire un état léthargique qui est caractéristique du burn out. La composante physique se traduit par les symptômes suivants :
-une fatigue non récupérable même après un week-end ou une semaine de congés. "Cela se remarque facilement car ce sont souvent des gens très dynamiques au travail qui connaissent une brutale chute de productivité" ;
-le sentiment que son corps "ne répond plus" et une grande difficulté à faire tout effort physique comme par exemple monter des escaliers ;
-des pannes de sommeil régulières ;-des perturbations alimentaires : en période de stress, on va avoir tendance à manger plus mais quand le burn out surgit, inversement, l'appétit disparaît ;
-la consommation accrue de stimulants tels que le tabac, l'alcool ou des médicaments ; -Tous ces signaux viennent s'ajouter aux signes courants du stress. Selon Patrick Légeron, "on retrouve chez la victime du burn out les mêmes symptômes que chez une personne stressée mais répétés de façon chronique."
Les symptômes psychologiques
La deuxième composante est d'ordre mental. L'énergie psychologique est épuisée, ce qui induit une perte d'énergie et de motivation, "même se lever représente un effort considérable", commente Patrick Légeron. Une apathie qui se décline à tous les niveaux :
-l'émoussement des émotions. Après avoir ressenti les émotions de façon excessive, la personne en burn out a l'impression de ne plus rien éprouver, d'être indifférente à tout ce qui l'entoure ;
-le sentiment d'être inutile, la dévalorisation de soi. C'est la composante dépressive du burn out ;
-un mal-être qui fait tache d'huile pour gangrener tous les éléments de la vie et qui est accompagné d'une remise en question de sa famille et de sa vie sociale en générale ;
-un rapport à l'environnement très froid, une dépersonnalisation qui amène à se comporter "comme un robot".
Dans quelques cas plus rares, le burn out peut entraîner la mort, le Karoshi(*) a déjà touché plusieurs milliers de personnes et est considéré comme une maladie professionnelle. Ce syndrome dit "de mort par surmenage" est le degré le plus absolu du burn out. La mort résulte de la destruction des glandes qui engendrent le stress, les glandes surrénales. Ces dernières fonctionnent de façon intensive en période de stress puis, ne pouvant plus fournir les hormones, s'autodétruisent.

*CAP en Psychiatrie
Enseignant ISFI Beni-Mellal


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