
Jusque-là, le ministère de l’Intérieur faisait et défaisait les consultations électorales. La seule fois où cela lui a, assurément à dessein, échappé, l’on a dû par la suite tout annuler avec tout ce que cela a eu comme conséquences des plus désastreuses.
Pour être inédite, cette présidentielle se passe en principe du moins, non pas sous la houlette de l’Intérieur, mais sous celle d’une « Autorité nationale indépendante chargée de l’organisation des élections ». On en verrait l’impact après ce 12 décembre et très probablement après le 9 janvier, date prévue pour le deuxième tour.
Inédite aussi, et surtout, parce qu’elle intervient après un hirak qui s’est étalé sur dix longs mois et marqué par un grand enthousiasme et une grande détermination et également par une bienséance saluée de par le monde.
La pression était telle que les tenants du pouvoir ont dû se rendre à l’évidence de se passer des services d’un Bouteflika grabataire depuis des années.
Peine perdue puisque cela était en deçà des aspirations du peuple, ou du moins à ces millions d’infatigables manifestants, qui exigent un véritable changement.
En effet, si Abdelaziz Bouteflika a fini par jeter l’éponge, ceux de la cour sont toujours là.
Inédite aussi et encore vu que cette consultation coïncide avec une petite purge orchestrée par l’actuel homme fort (jusqu’à quand ?) sur la scène algérienne, le très militaire Ahmed Gaid Salah, chef de l’état-major de l’ANP algérienne et dont quelques symboles de l’ère Bouteflika sont en passe d’en faire les frais.
Sauf qu’il faut beaucoup plus pour calmer les ardeurs de toutes ces femmes et de tous ces hommes, de tous ces jeunes et moins jeunes qui ont déjà clamé haut et fort leur rejet catégorique de cette présidentielle bien que pas comme les autres.
Certes celle-ci est censée se dérouler dans le cadre de la Constitution et des lois en vigueur, mais quid de la légitimité qui doit y afférer ? Que peut bien valoir une consultation avec un taux de participation insignifiant ?
N’aurait-il pas été plus sage de reporter ces élections au lieu de s’entêter à vouloir ramer à contre-courant ?
De ce côté-ci, on serait en droit de nous féliciter de la position officielle du Maroc qui s’est refusé à s’ingérer dans les affaires internes de son voisin de l’Est. On en a pour preuve le sort subi par l’ex-patron des patrons Salaheddine Mezouar qui était passé outre.
Il n’en reste pas moins que le Maroc aura été omniprésent dans la campagne électorale de cette présidentielle. Dans un sens comme dans l’autre, c’était une carte à jouer pour les cinq candidats dont la moyenne d’âge prête à réfléchir. C’est plus qu’inapproprié dans un pays à majorité jeune.
Trop consternant quand un homme supposé politique qui prétend à la magistrature suprême ne sait pas écouter la jeunesse. Où est-ce qu’ils étaient les Abdelaziz Belaïd et autres, Abdelmajid Tebboune, pour ne citer que ceux-là, quand Algériens et Marocains n’ont cessé de scander, des deux côtés des frontières, ou à l’occasion de rencontres sportives « Hna Khawa » (Nous sommes des frères ». Absolument ! Des deux côtés des frontières, et partout dans le monde nous sommes frères et sœurs.
Comment donc aspirer à diriger un peuple aussi avisé que celui de l’Algérie quand on se veut sourd à ses aspirations et à ses doléances ?
La première des priorités et au-delà de la nécessité logique et légitime de commencer une nouvelle page avec le Maroc, c’est de veiller à mettre fin à une dilapidation effrénée de l’argent des Algériens pour des causes perdues et qui plus est leur sont tout à fait étrangères.