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Halte au harcèlement visant les touristes


IDRISS OUCHAGOUR
Jeudi 2 Avril 2009

Halte au harcèlement visant les touristes
Tafraout. En ce jour printanier, dès la matinée, les premiers bus de transports touristiques des différentes compagnies et autres appartenant à certains tour-opérateurs internationaux, en provenance d’Agadir, affluent  déjà vers la ville. Tous débarquent leurs passagers loin du centre-ville, sur l’avenue des FAR. Le guide précède le groupe de visiteurs étrangers  et l’achemine vers une venelle. Laquelle  fait le raccourci  pour finir dans un magasin de tapis. Une fois les achats faits, le groupe de touristes est vite  embarqué  à bord de son car pour aller se restaurer dans un hôtel  pas loin et prendre illico la route vers Tiznit. Une scène des plus  banales.
Pour les initiés qui  travaillent dans le secteur touristique, ce n’est point anodin.  « Rien n’est fortuit. Le point de débarquement  et l’itinéraire emprunté procèdent de la volonté de faire contourner  aux touristes les nombreux autres commerces de l’artisanat du centre-ville  pour qu’ils fassent leurs emplettes chez le  seul bazar  de mèche avec le guide et l’agence de voyages», nous explique le propriétaire d’un bazar de la place du souk. En effet, chaque jour, c’est la même scène qui se répète. Et c’est toujours le même bazariste  privilégié qui  reçoit dans son commerce en exclusivité  l’ensemble des touristes étrangers  en voyage organisé de passage dans la ville.
Des groupes de visiteurs, en réalité, prisonniers  des guides  et des accompagnateurs qui ne leur laissent jamais le temps de pouvoir faire des  achats à Tafraout, sous prétexte que le temps presse à cause de la longue route qui les attend pour rentrer à Agadir, ajoute un autre propriétaire. Les touristes sont soumis à un «endoctrinement» préalable. D’abord  ils sont avertis par leurs guides contre les bazaristes de la ville « peu scrupuleux » et «redoutables» pour  mieux gagner leur foi et leur suggérer le commerce «de confiance », en fait de connivence, pour faire leurs emplettes les yeux fermés et  sans discuter les prix imposés, nous renseignent les autres bazaristes. Car, ce sont là de grosses commissions  en espèces sonnantes et trébuchantes (appelées dans le jargon du métier Jaaba) frisant l’arnaque parfois, qui se cachent derrière ces pratiques traitées dans les arrière-boutiques de ces commerces complices.
Cet état de fait n’est pas l’apanage de Tafraout toute seule; à Tiznit et Taroudant, On remarque facilement  que tous les touristes en voyage organisé qui y passent sont orientés exclusivement chez deux marchands de la bijouterie en argent et des tapis. Pour ne pas dire que  le phénomène concerne  la totalité des villes programmées dans les circuits que vendent les tour-opérateurs opérant dans la ville d’Agadir.  Certains initiés parlent même de « contrat » tacite entre ces bazars et certaines agences de voyages au début de chaque saison touristique, impliquant de grosses sommes versées d’avance en contrepartie de faire visiter aux clients de ces dernières  les commerces en question pendant toute l’année.
Voilà qui donne souvent lieu à des transactions douteuses déballant des  scandales de duperie  pour arnaquer nos touristes. Ce triste constat de collusion entre bazaristes et agences de voyages est tout à fait corroboré par  le président de l’Association des guides et accompagnateurs des touristes d’Agadir. Pour Abderrazak Abounawadir, il est avéré que ces pratiques existent et ne datent pas d’aujourd’hui. Et il n’hésite pas à pointer du doigt certaines agences de voyages qui, selon lui,  donnent des consignes et imposent ainsi aux guides de ne faire que  les bazars indiqués dans chaque ville  visitée. Sauf que, pour le président de l’AGATA, cela peut s’expliquer aussi autrement. « On sait que bon nombre d’agences de voyages, pour ne pas payer les émoluments complets aux guides recrutés, recourent aux services d’accompagnateurs non agréés.  Ceux-ci doivent  ainsi arrondir leurs fins de mois sur le dos des touristes». Madame Bensoussane, présidente de l’Association régionale  des agences de voyages d’Agadir (ARAVA), tranche formellement  :«Ce n’est pas vrai. Ce sont les agences non  officielles qui usent de  tous ces procédés; il faut savoir que de nombreux intrus et clandestins prétendant aux statuts d’agences de voyages, exercent  et nuisent ainsi à la profession». Une allégation facilement réfutable malheureusement  par la réalité. Sachant que lors de nos enquêtes dans les différentes villes touristiques de l’arrière-pays d’Agadir, ce sont des agences de voyages bel et bien officielles et très connues dans le créneau  que nous avons surprises en flagrant délit d’exercice de ces pratiques de «rabattages collectifs» de leurs clients vers des commerces  qui sont de mèche.  Pourtant la loi 30/96, régissant l’exercice de la profession, est claire en la matière. Le guide touristique  accompagnant touristes en circuits, ne doit en aucun cas faire des visites des magasins. Et encore  moins toucher  des prébendes sur les achats des clients. Il est censé faire découvrir aux touristes les sites et monuments touristiques. En terme de sanctions, la loi en question réserve des sanctions  allant jusqu’à la suppression de l’autorisation d’exercer ce métier aux guides contrevenants.  Bref, une situation illégale qui s’est banalisée, compromettant à bien des égards une activité pourtant érigée en secteur économique prioritaire sur le plan de  développement national.
Nos touristes sont exposés à des escroqueries honteuses qui mettent à mal  la réputation de notre destination. Notre artisanat et le métier de bazariste qui commercialisent les produits en prennent un sacré coup en faussant la libre concurrence et l’égalité des chances. De nombreux bazaristes  privés ainsi de ces clients subissent un préjudice aujourd’hui à cause des difficultés dues aux lourdes charges qu’ils supportent. 


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