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Fathallah Oualalou lors d'une conférence tenue à l'occasion du 17ème anniversaire de la disparition de Abderrahim Bouâbid

“Plus que la crise, c'est l'après-crise que le Maroc doit savoir gérer”


Amina SALHI
Lundi 19 Janvier 2009

Fathallah Oualalou lors d'une conférence tenue à l'occasion du 17ème anniversaire de la disparition de Abderrahim Bouâbid
Le Maroc n'est et ne sera que faiblement influencé par la crise financière internationale. C'est Fathallah Oualalou, l'économiste et l'ex-ministre de l'Economie et des Finances qui l'affirme. 
Animant une conférence organisée par le secrétariat régional de  l’USEP de Rabat-Salé- Zemmour-Zaër à l'occasion de la commémoration du 17ème anniversaire de la disparition de Feu Abderrahim Bouabid, le 1er secrétaire adjoint de l'USFP livre une analyse pointue de la crise actuelle et ses répercussions sur l'économie réelle marocaine. Selon lui, plusieurs considérations font que  le Maroc ne sera que légèrement impacté par cette crise, dont sa proximité avec l'Europe et la déconnexion du système bancaire nationale par rapport au système bancaire international.
Certes, quelques secteurs pourraient être touchés dont les exportations, les recettes des résidents marocains à l'étranger ou encore le tourisme. Cependant, ce qui importe le plus, selon Fathallah Oualalou, ce sont les répercussions qu'aura la crise sur le plan géopolitique. La première est le déplacement du pôle du rayonnement économique d'une région à une autre. « La région la plus forte est celle qui saura résister. On passera d'une polarisation à une multi-polarisation qui fera que l'Amérique restera leader mondial mais pas toute seule. Elle partagera cette première place avec l'Asie et dans une moindre mesure avec l'Europe », a-t-il souligné. Quant à la position des pays arabes et musulmans, elle dépendra de leur force de négociation et d'initiative.
La deuxième conséquence est que cette crise créera inéluctablement de nouvelles locomotives de développement. «La crise prendra fin dans quelques mois et parallèlement, apparaîtront deux nouvelles forces motrices, à savoir les énergies renouvelables qui doivent se substituer progressivement au pétrole ainsi que toutes activités en relation avec l'eau et l'environnement ».
Devant ces faits, la question qui se pose pour le Maroc est de savoir comment gérer la sortie de la crise. Sur le plan national,  Fathallah Oualalou propose la diversification  de l'économie marocaine de manière à ce qu'elle ne soit pas uniquement animée par les secteurs rentiers et son immunisation à travers la baisse de la dette. Sur le plan régional, celui qui vient d'être nommé n°2 de l'USFP reste intimement convaincu « qu'idéologiquement, le Maroc doit rester maghrébin mais également méditerranéen tout en faisant en sorte que les négociations avec l'Europe soient en sa faveur».
Bien entendu, ceci ne se fera pas sans risque. Le risque de voir l'orientation autoritariste et technocrate, apparue durant les années 80, prendre à nouveau le dessus ou encore celui d'assister à nouveau au déclin du politique, à l'instar de ce qui s'est passé lors des élections de 2007. C'est dès maintenant, estime M.Oualalou, qu'il faut agir pour réhabiliter le politique, lutter contre la dépravation et faire en sorte que la gestion des villes ne tombe pas entre les mains des corrupteurs. « Et c'est pour reconcilier les Marocains avec la politique et pour réhabiliter celle-ci que les Uspféistes posent aujourd'hui la question des réformes politiques et constitutionnelles » a-t-il ajouté avant de préciser que « notre principale préoccupation aujourd'hui est de mettre en œuvre les orientations préconisées par notre dernier congrès ». Préalablement à cette analyse, Fathallah Oualalou a fait un historique de l'USFP pour mettre en exergue l'approche économiste d'Abderrahim Bouabid ou ce qu'on appelle communément l'approche «bouabidiste». D'abord un fait. A.Bouabid n'était pas de formation économique et pourtant, il était doté d'un savoir-faire indéniable et d'un esprit d'anticipation qui lui ont permis de graver ses empreintes dans l'histoire du Maroc à l'issue des quatre années durant lesquelles il assuma la responsabilité de ministre de l'Economie et des Finances. Doté d'un grand sens de nationalisme, il a réussi, avec Mehdi Ben Barka, à introduire de nouvelles approches, « évolutistes »,  progressistes puis socialistes. Chargé de rédiger la partie économique du document de l'indépendance, il considérait que la réforme et la modernisation sont impératives, mais doivent s'inscrire dans un cadre politique. Après l'indépendance, en tant que ministre et «démocrate d'Etat » comme le qualifiait un écrivain français, il a réussi à introduire de nouvelles notions dont celle de service public et d'opérer de réelles ruptures avec l'économie de l'indépendance.
C'est ainsi qu'il a crée l'Office de Changes en vue de concrétiser l'indépendance financière marocaine par rapport à la France, puis le système douanier marocain en 1957. Et c'est ainsi qu'en 1959, a été créé le dirham marocain ainsi que Bank Al Maghrib. Il s'est occupé par la suite de l'économie réelle, dont la nomination d'un Marocaine à la tête de l'OCP, l'organisation de l'opération de labourage  collectif, le lancement des travaux de la route « d'Al Ouahda », la création d'institutions marocaines (BMCE, CDG, BNDE) et l'amorce de l'opération d'industrialisation. Sur le plan social, il y a eu la création de la CNSS et la proclamation du SMIG.
Après la dissolution du gouvernement d'Abdellah Ibrahim en 1960, en tant qu'opposant, Abderrahim Bouabid s'intéressait davantage à la politique. Mais cela ne l'a pas empêché durant les années 80, suite à la mise en place du programme d'ajustement structurel, d'adresser un mémorandum à Feu Hassan II dans lequel il a attiré l'attention sur les inconvénients de cette politique qui  rejette, selon lui, toute intégration dans la politique des réformes.
Que ce soit au gouvernement ou dans l'opposition, Abderrahim Bouabid a défendu un certain nombre d'idées et d'approches que Fathallah Oualalou résume dans ce qui suit. Il était nationaliste et pour la souveraineté. Il a défendu l'économie mixte et le partenariat entre les secteurs privé et public. C'était un progressiste et un socialiste qui préconisait la répartition équitable des revenus. Il a défendu l'unité géographique du Maroc et accordait à la dimension maghrébine toute son importance. Il était  en effet parmi les rares hommes politiques de l'époque, sinon le seul d'entre eux qui considérait que la question maghrébine avait une dimension économique. Fervent défenseur des relations avec l'Union européenne, il  considérait que le développement reste intimement lié à la démocratie. 


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