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Libé : Une polémique s’est déclenchée après la présentation du rapport de la commission d’enquête parlementaire dont vous étiez membre. Pouvez-vous nous éclairer sur cette affaire?
Zoubida Bouayad : Le contenu de ce rapport a été publié dans les sites électroniques ainsi que sur les quotidiens et magazines. Le Groupe de l’USFP à la Chambre des conseillers faisait partie de cette commission. On était parmi les signataires de la constitution de cette commission d’enquête et de contrôle. Nous avons toujours prôné la transparence et rejeté le principe de l’impunité. Parmi les premières commissions d’enquête et de contrôle au Maroc, il faut noter celle relative au CIH qui fut présidée par un membre du Bureau politique de l’USFP. Nous sommes pour le principe de la séparation des pouvoirs. Constitutionnellement parlant, les parlementaires ont le droit de procéder à des enquêtes, contrôler les institutions publiques et d’avoir un droit de regard sur la gestion du gouvernement. C’est notre rôle en tant que parlementaires et partis politiques. Nous sommes convaincus de cette démarche ; c’est l’un des aspects de l’exercice de la démocratie. Maintenant, il faut noter que la commission a eu beaucoup de difficultés lors de sa mission. Lors des séances d’écoute avec les responsables, la tâche n’était guère facile. Certains d’entre eux ont même refusé de répondre aux questions et à l’invitation de la commission. Un ministre ayant refusé de se présenter devant la commission, a essayé de faire pression sur certains présidents de groupes pour que ce rapport une fois fini ne soit pas présenté en séance plénière.
Qu’en est-il exactement de ce rapport?
Le contenu officiel du rapport que vous avez probablement lu avec les détails et les chiffres et comportant également les noms des personnes et des institutions qui ont accepté de collaborer avec la commission s’est inspiré en gros du rapport du ministère des Finances qui était très clair et accablant. Il précise en détail les crédits, les prêts octroyés à certaines personnes et qui n’ont pas été remboursés à temps soit partiellement soit en totalité. Il éclaire sur des pratiques douteuses de plusieurs transactions. Il confirme, chose inacceptable, que le Conseil d’administration de l’OCE ne s’est pas réuni pendant huit ans alors que le statut de cette institution préconise que toutes les décisions doivent émaner de ce Conseil. Certains ont voulu politiser l’affaire afin d’étouffer le scandale et créer un conflit entre certains groupes parlementaires. Mais pour nous en tant que Groupe socialiste à la Chambre des conseillers, nous restons objectifs, la commission doit jouer son rôle de contrôle. Le rapport est arrivé aux conclusions suivantes : il est certain qu’au sein de l’Office de commercialisation et d’exportation, des deniers publics ont été dilapidés par certains individus. Par conséquent, on a assisté pendant des années à une mauvaise gouvernance dudit Office. Ce qui a accentué cette situation, ce sont les conflits d’intérêts évidents puisque les membres du C.A. sont aussi des bénéficiaires de ces fonds. Il en va sans dire que le C.A n’a pas exercé ses prérogatives ni assumé ses responsabilités. Par ailleurs, ce qui est grave, c’est que la commission a relevé des irrégularités dans la cession de biens immobiliers de l’OCE au profit de certaines personnes à des prix dérisoires, suivant des procédures qui manquent totalement de transparence.
Ces conclusions ont amené la commission parlementaire à recommander à ce que le dossier soit instruit par les instances judiciaires.
Est-ce que ce rapport est contraignant?
Bien sûr. Formellement, c’est le président de la Chambre des conseillers qui doit interpeller le gouvernement et le ministre de la Justice pour que la procédure en vigueur puisse suivre. Cependant, puisqu’il s’agit de deniers publics, le gouvernement peut entamer une instruction et des poursuites à l’encontre des concernés par ce scandale. De toute façon, à l’USFP, on est contre l’impunité dans la mesure où le rapport émane d’une commission parlementaire. Celui-ci est entre les mains du président de la Chambre des conseillers qui, normalement, doit solliciter l’intervention du gouvernement. Il y a eu des précédents au CIH et à la CNSS. La balle est dans le camp du gouvernement qui prétend vouloir lutter contre la prévarication.
La justice sélective n’a pas lieu d’être. Les citoyens marocains sont égaux devant la justice et doivent être traités sur un pied d’égalité quelle que soit leur couleur politique ou classe sociale.
Je tiens à préciser que ce n’est pas l’opposition seule qui a appelé à la formation de cette commission d’enquête. C’est la majorité et l’opposition. Le groupe istiqlalien était parmi les premiers à signer cette demande pour la création de cette commission. Maintenant, si les conclusions ne sont pas favorables à certains groupes, c’est leur affaire. En ce qui concerne la coordination au sein de la commission, il y a eu quelques divergences sur certains points mais le Groupe socialiste a toujours œuvré pour l’intérêt général et selon les convictions de l’USFP. On a procédé d’une manière objective loin de toute vision politicienne étriquée.
Justement peut-on parler du bilan du Groupe socialiste lors de la session printanière qui vient de prendre fin ?
Nous considérons que notre bilan est relativement positif. Le Groupe travaille d’une manière homogène. Notre taux de présence atteint presque 60%. Quant aux questions orales, notre Groupe n’est pas nombreux et par conséquent, on n’a droit qu’à deux questions par séance. Cela nous pénalise ; cependant, on est arrivé à relever le défi d’exposer les préoccupations des citoyens lors de ces séances. Au niveau des questions écrites, les réponses du gouvernement viennent souvent en retard. Quant aux interpellations prévues par l’article 128 du règlement intérieur de la Chambre des conseillés, il nous donne cette possibilité d’introduire des questions urgentes et pertinentes. Je prends pour exemple notre demande de clarification au sujet de la Cour des comptes, du sport marocain ainsi que la participation médiocre de nos athlètes aux Jeux olympiques.
Nos efforts ont été également consentis au niveau de la proposition des lois, il y a eu 5 ou 6 propositions de loi lors de cette session.
Ainsi, la première proposition de loi concerne les amendements des articles 20 et 21 du Code de la famille après le scandale de la jeune femme Amina Filali de Larache. C’est une proposition datée d’avril 2010 et qu’on a réécrite et programmée. A l’époque, un groupe parlementaire avait demandé le report de cette réunion. On a également été derrière la loi sur le tabagisme qui n’a pas été encore validée comme une loi conforme à la réglementation internationale parce que le Maroc avait signé en 2004 cette convention contre le tabagisme mais malheureusement elle n’a pas encore été ratifiée. Notre Groupe a donc demandé de déposer une proposition de loi notamment pour la lutte contre la chicha car celle-ci ne figure pas dans les anciennes lois. Nous avons également présenté une proposition de loi au sujet de l’égalité des chances au niveau de l’emploi entre les hommes et les femmes dans l’amendement du Code de travail. Le Groupe a aussi organisé des tables rondes au niveau de la Chambre des conseillers avec des thèmes différents : le Code de la famille, les accidents de travail ou encore la parité. En général, on a essayé de redynamiser la situation actuelle de la Chambre des conseillers.
Voilà quelques mois que le gouvernement Benkirane est en place. Quel bilan faites-vous de son exercice?
L’USFP a toujours adhéré à la lutte contre la prévarication et l’autoritarisme. Il en a fait l’un de ses principes et préoccupations politiques. Le parti qui préside la coalition gouvernementale en a fait également un slogan de campagne électorale mais une fois au pouvoir, on remarque qu’on est loin de ce principe.
En 2002, on a été les premiers à dire qu’il faut respecter le processus démocratique qui a été bafoué. On est contre les discours creux et les déclarations et sorties politiciennes qui ne mèneront le pays nulle part, sinon vers une crise socioéconomique encore plus profonde.
Certes, on a souligné quelques points positifs dans le programme de ce parti, théoriquement parlant et sur le papier. Des aspects qui correspondaient à nos convictions. Mais on s’est rendu compte qu’au niveau de la déclaration du gouvernement, il y a eu un recul par rapport aux chiffres avancés auparavant.
Personnellement et en tant que citoyenne et présidente du Groupe socialiste à la Chambre des conseillers, je suis surprise par les contradictions au niveau des déclarations des ministres. Les Marocains ne sont pas dupes. Il faut leur dire la vérité. A l’USFP, on a milité pendant des années pour la séparation des pouvoirs et des prérogatives plus larges pour l’institution de la primature. On est vraiment déçu de voir le chef du gouvernement reculer à ce sujet en déclarant qu’il n’est que le chef du gouvernement. C’est grave dans la mesure où Benkirane fait machine arrière sur des droits pour lesquels les Marocains ont consenti tant de sacrifices. D’autre part, l’augmentation des prix des carburants est un scandale parce que les répercussions de ces augmentations sur le consommateur marocain étaient insupportables. Mais ce qui est grave et au-delà d’une crise réelle, c’est que le gouvernement Benkirane ne présente aucun programme ni stratégie pour sortir de la crise. L’autre bourde du chef du gouvernement est sa conception de la parité. Outre la place qu’il réserve à la femme dans son équipe et les postes de responsabilité alors que le Maroc a des engagements internationaux et nationaux à ce sujet, il est clair que ses convictions sont loin d’être féministes. Il s’applique à les voiler par un discours populiste ou parfois religieux. Pour preuve, son refus catégorique de présenter des excuses à la femme marocaine qu’il a humiliée sur une chaîne satellitaire arabe.
Vous qui êtes membre du Bureau politique, pouvez-vous nous dire si le Congrès de l’USFP aura bien lieu au mois de septembre?
Les commissions de préparation du 9éme Congrès de l’USFP ont été constituées juste après le dernier Conseil national. Les militants se réunissent au moins une fois par semaine pour avancer dans la préparation. Plusieurs documents et projets de plateforme organisationnelle ont été déposés auprès de la commission préparatoire présidée par Baïna. C’est cette commission qui présentera le document sur la ligne politique du parti. Notre parti est dynamique et un débat démocratique est ouvert à ce sujet pour tous les militantes et militants.
C’est le Conseil national qui va fixer la date du Congrès lorsque les présidents et les rapporteurs des commissions auront la parole pour nous dire s’ils sont prêts. On sait déjà que deux commissions sont prêtes tandis que d’autres avancent à une vitesse moindre vu certaines difficultés à caractère organisationnel.
L’essentiel réside dans le contenu de ce congrès. Les Ittihadis, femmes et hommes, seront amenés à clarifier leur vision pour l’avenir sur le plan de la stratégie politique, des alliances, du renforcement des valeurs du parti et son organisation afin d’avoir une visibilité pour une redynamisation du parti des forces populaires et en vue d’être un pôle d’attraction pour les différentes couches sociales.
Aspireriez-vous à devenir la première secrétaire femme du parti de la Rose?
Je peux vous déclarer officiellement que je n’ai pas cette ambition. Au cas où il y aurait une militante qui se porterait candidate, je serais parmi les Ittihadiates à encourager sa candidature.