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La situation en Egypte
s’enlise dans une violence
systématique entre les
milliers de personnes voulant achever la révolution
en la libérant du pouvoir du Conseil militaire qui ne lésine pas sur la force pour
réinstaurer le calme dans
une rue de plus en plus
effervescente. Midhat
Al Zahid, journaliste
et militant politique de gauche, explique les différents enjeux de la situation
politique égyptienne.
Libé : Quelle est la situation qui prévaut en Egypte actuellement ?
Midhat Al Zahid : Il s’agit actuellement d’un conflit de volontés diverses et parfois contradictoires. Là où les Egyptiens ont réclamé la liberté, l’après-révolution a engendré trois grands courants. Les résidus de l’ancien régime qui tentent toujours de resurgir, et détiennent des représentants dans le Conseil militaire, lesquels veulent enjoliver le régime Moubarak. Les défenseurs de l’Etat religieux, représentés par les partis islamistes, dans leurs différentes figures et enfin les militants qui luttent pour un Etat démocratique moderne. Ce conflit n’est pas encore tranché, mais le plus important est déjà fait par la révolution, à savoir l’ouverture du débat. C’est déjà une grande réalisation qui domine actuellement le champ politique. Ce n’est pas tout, l’initiative populaire actuelle consacre cette donne dans l’espace public. Cette tendance est vraiment progressiste, dans la mesure où aucune force ne pourra ramener cette population chez elle avant l’instauration définitive des devises d’équité et de liberté.
Existe-t-il des forums sociaux en Egypte ?
Il n’y a pas encore eu de forum social, mais il y a eu toujours des dynamiques sociales fondées sur la base des problèmes survenant ici et là. Ces dynamiques ont contribué certainement à l’avènement de la révolution. Tout au long des quatre dernières années, le champ social n’a cessé de vibrer au rythme des protestations de catégories fragiles de la société, notamment les paysans ou ayants droit. La lutte continue pour préserver les terrains et les soustraire à la mainmise des spéculateurs immobiliers. Ainsi, l’on a vu l’émergence d’une véritable force civile, avec la structuration des paysans et leur lutte contre la spoliation de leurs terrains à Koursay (sit-in, justice…). Cette affaire a pu mobiliser des partis politiques, des syndicats et une certaine presse indépendante. Le mouvement ouvrier a été aussi actif et dynamique, notamment à Al Mahalla Lkoubra, ville industrielle, mais les luttes dans ce cadre ne trouvaient pas d’écho dans la presse, étant donné les accointances entre ce secteur et les cercles du pouvoir.
… Et en matière des nouveaux droits de l’Homme ?
Effectivement, la prise de conscience par les populations de l’importance de la donne environnementale s’est traduite par des luttes continues, notamment à Demyat, où l’on a voulu installer une usine pétrochimique canadienne que les habitants surnomment «Usine de la mort». C’était impressionnant, puisque les populations se sont constituées en chaîne humaine autour du lieu où l’on prévoyait de mettre en place cette machine de la mort.
Y-a-t-il des connexions entre ces différentes dynamiques ?
Effectivement, il existe des discussions depuis le début de 2010, pour la création d’un forum social égyptien. L’avènement de la révolution a stoppé cet élan, remplacé par un forum populaire sur la place Tahrir. Dans la foulée, on assiste ces derniers temps à la création de plusieurs syndicats, commissions populaires, associations féminines, organisations des jeunes… autant de composantes qui préparent activement l’organisation du forum social égyptien prévu dans trois ou quatre mois, en attendant l’opportunité de voir un forum social mondial.
Comment expliquez-vous les résultats électoraux en Egypte, surtout que les islamistes ont raflé la mise ?
D’abord, il faut dire que la configuration n’est pas définitive. La liste du parti islamiste « Liberté et Justice » comptait dix formations politiques dont le parti libéral d’Ayman Nour (Al Ghad-Le lendemain) et d’autres partis. En face, d’autres listes comme celle d’Al Koutla Al Masrya-Bloc égyptien qui a remporté au premier tour 15 % des suffrages, puis la liste de la révolution permanente, parti de gauche social-démocrate (5%) et Al Wafd (7%). En deuxième lieu, l’opération électorale avantage les «frères», dans la mesure où elle intervient dans un contexte marqué par la poursuite par les jeunes de la révolution des protestations contre le Conseil militaire. Puis, le temps imparti était insuffisant et n’avait pas été en faveur des jeunes formations démocratiques. En troisième lieu, on avait laissé libre cours aux prédicateurs de mener campagne dans les mosquées sans contrôle ni évaluation. Mais, il existe maintenant les aspirations d’un bloc à une démocratie participative. La place Tahrir a fait tomber Moubarak, Soulayman entre autres. C’est l’heure de la démocratie populaire dans le monde.
s’enlise dans une violence
systématique entre les
milliers de personnes voulant achever la révolution
en la libérant du pouvoir du Conseil militaire qui ne lésine pas sur la force pour
réinstaurer le calme dans
une rue de plus en plus
effervescente. Midhat
Al Zahid, journaliste
et militant politique de gauche, explique les différents enjeux de la situation
politique égyptienne.
Libé : Quelle est la situation qui prévaut en Egypte actuellement ?
Midhat Al Zahid : Il s’agit actuellement d’un conflit de volontés diverses et parfois contradictoires. Là où les Egyptiens ont réclamé la liberté, l’après-révolution a engendré trois grands courants. Les résidus de l’ancien régime qui tentent toujours de resurgir, et détiennent des représentants dans le Conseil militaire, lesquels veulent enjoliver le régime Moubarak. Les défenseurs de l’Etat religieux, représentés par les partis islamistes, dans leurs différentes figures et enfin les militants qui luttent pour un Etat démocratique moderne. Ce conflit n’est pas encore tranché, mais le plus important est déjà fait par la révolution, à savoir l’ouverture du débat. C’est déjà une grande réalisation qui domine actuellement le champ politique. Ce n’est pas tout, l’initiative populaire actuelle consacre cette donne dans l’espace public. Cette tendance est vraiment progressiste, dans la mesure où aucune force ne pourra ramener cette population chez elle avant l’instauration définitive des devises d’équité et de liberté.
Existe-t-il des forums sociaux en Egypte ?
Il n’y a pas encore eu de forum social, mais il y a eu toujours des dynamiques sociales fondées sur la base des problèmes survenant ici et là. Ces dynamiques ont contribué certainement à l’avènement de la révolution. Tout au long des quatre dernières années, le champ social n’a cessé de vibrer au rythme des protestations de catégories fragiles de la société, notamment les paysans ou ayants droit. La lutte continue pour préserver les terrains et les soustraire à la mainmise des spéculateurs immobiliers. Ainsi, l’on a vu l’émergence d’une véritable force civile, avec la structuration des paysans et leur lutte contre la spoliation de leurs terrains à Koursay (sit-in, justice…). Cette affaire a pu mobiliser des partis politiques, des syndicats et une certaine presse indépendante. Le mouvement ouvrier a été aussi actif et dynamique, notamment à Al Mahalla Lkoubra, ville industrielle, mais les luttes dans ce cadre ne trouvaient pas d’écho dans la presse, étant donné les accointances entre ce secteur et les cercles du pouvoir.
… Et en matière des nouveaux droits de l’Homme ?
Effectivement, la prise de conscience par les populations de l’importance de la donne environnementale s’est traduite par des luttes continues, notamment à Demyat, où l’on a voulu installer une usine pétrochimique canadienne que les habitants surnomment «Usine de la mort». C’était impressionnant, puisque les populations se sont constituées en chaîne humaine autour du lieu où l’on prévoyait de mettre en place cette machine de la mort.
Y-a-t-il des connexions entre ces différentes dynamiques ?
Effectivement, il existe des discussions depuis le début de 2010, pour la création d’un forum social égyptien. L’avènement de la révolution a stoppé cet élan, remplacé par un forum populaire sur la place Tahrir. Dans la foulée, on assiste ces derniers temps à la création de plusieurs syndicats, commissions populaires, associations féminines, organisations des jeunes… autant de composantes qui préparent activement l’organisation du forum social égyptien prévu dans trois ou quatre mois, en attendant l’opportunité de voir un forum social mondial.
Comment expliquez-vous les résultats électoraux en Egypte, surtout que les islamistes ont raflé la mise ?
D’abord, il faut dire que la configuration n’est pas définitive. La liste du parti islamiste « Liberté et Justice » comptait dix formations politiques dont le parti libéral d’Ayman Nour (Al Ghad-Le lendemain) et d’autres partis. En face, d’autres listes comme celle d’Al Koutla Al Masrya-Bloc égyptien qui a remporté au premier tour 15 % des suffrages, puis la liste de la révolution permanente, parti de gauche social-démocrate (5%) et Al Wafd (7%). En deuxième lieu, l’opération électorale avantage les «frères», dans la mesure où elle intervient dans un contexte marqué par la poursuite par les jeunes de la révolution des protestations contre le Conseil militaire. Puis, le temps imparti était insuffisant et n’avait pas été en faveur des jeunes formations démocratiques. En troisième lieu, on avait laissé libre cours aux prédicateurs de mener campagne dans les mosquées sans contrôle ni évaluation. Mais, il existe maintenant les aspirations d’un bloc à une démocratie participative. La place Tahrir a fait tomber Moubarak, Soulayman entre autres. C’est l’heure de la démocratie populaire dans le monde.