Entretien avec Ali Hajji, directeur du Festival de Casablanca


Propos recueillis par Dorian GELIS
Dimanche 17 Juillet 2011

“Aujourd’hui on préfère programmer un Marcel Khalife qu’une vedette plus éphémère”

Entretien avec Ali Hajji, directeur du Festival de Casablanca
Vendredi après-midi dans un palace, rencontre avec Ali Hajji, Directeur général de Rezo Production, société en charge de la conception et de
l'organisation déléguée du Festival de Casablanca.
A ce titre, il est donc aujourd’hui directeur de la manifestation et fait partie de l’équipe organisatrice depuis la première édition. Plutôt à l’aise, il nous confie les difficultés de l’organisation et concède, à demi-mots, le parti pris  cette année, de moins mettre en avant des vedettes arabes du moment, privilégiant des artistes engagés qui s’inscrivent dans la durée. Enfin, il insiste sur le rôle unique d’aide à la création artistique. Entretien.

Libé : A mi-parcours, quel premier bilan faites-vous de cette septième édition ?

Ali Hajji : Je vais commencer par l’aspect négatif. C’est une édition qui a été très difficile à mettre en route pour des raisons de financements essentiellement mais aussi un contexte politique régional et par rapport au Maroc en particulier...  On s’est donc beaucoup posé de questions sur la forme à donner à cette édition. Tout cela a été très compliqué à gérer, c’est un travail de longue haleine qui s’étale sur toute l’année, entamé dès la fin de l’édition précédente.
Malgré cela, on peut noter de nombreuses réussites. Nous avons eu des retours très positifs sur la programmation. Globalement, le concept du festival  est mieux compris et abordé. Il faut savoir que c’est un festival pluridisciplinaire, donc toutes les idées défendues aujourd’hui sont les mêmes depuis le démarrage mais sauf que des aléas ont provoqué la succession de trois présidents à la tête du projet. Or,  pour développer  une vision à long terme, pour renforcer l’identité du festival, une stabilité est nécessaire. Cette année, pour la première fois, on y arrive avec Farid Bensaïd qui préside le festival pour sa troisième édition consécutive. Cette stabilité permet d’aborder le festival différemment en termes de contenu.   Cette année, je pense que c’est l’édition qui se rapproche le plus de la première qui avait lancé le festival dans un esprit dans lequel il a été difficile de revenir.

Vous évoquez «des retours très positifs sur la programmation». Pourtant d’après nos échos, beaucoup ont déploré la faible représentativité et mise en
lumière d’artistes issus du monde arabe. Quel est votre avis sur ce point ?

Je ne suis pas convaincu. Je pense qu’il faut regarder la programmation : il y a Marcel Khalife qui est une icône de la musique arabe, un chanteur engagé multi générationnel,  se produisant dans le cadre du festival pour la première fois, tout comme Amazigh Kateb venu d’Algérie dans un tout autre genre musical. On peut également  citer Cheb Kader, icône du rai et bien d’autres.... Néanmoins, peut-être que, par le passé, on a fait venir plus de vedettes arabes mais c’est un choix. Maintenant, le choix du festival est véritablement d’aller vers de plus en plus de qualité. C’est pour cela aussi qu’il y a tout un pan de la variété arabe vers lequel on ne va sans doute plus se diriger.  Aujourd’hui, on préfère programmer un Marcel Khalife qu’une vedette plus éphémère. Sinon au niveau de la mise en lumière, il n’y a pas de favoritisme dans notre campagne de communication.Les artistes sont cités dans nos spots publicitaires au même niveau,  quel que soit leur degré de notoriété.

Dans le contexte actuel politique et socioéconomique difficile, quel est le rôle de votre manifestation et quelles doivent être les valeurs véhiculées ?

Le rôle du festival est véritablement de développer un grand soutien à la création. Malgré son financement par des politiques, il ne s’inscrit dans aucune logique politicienne, mais reste dans un objectif purement artistique. J’insiste sur le fait que ce soit une manifestation pluridisciplinaire, complètement urbaine et tournée vers la création actuelle.Dans cet ordre d’idées, on peut  notamment  évoquer le programme «NouzahFennia» créé l’année dernière. Il s’appuie sur des promenades artistiques à travers la ville, s’étalant tout au long de l’année afin de faire circuler la créativité grâce aux acteurs culturels  et associatifs, aux artistes, au  public ou encore aux étudiants...  C’est donc un projet qui s’inscrit dans la durée. Aujourd’hui, nous souhaitons développer cet axe de soutien à la créativité locale en démarrant avec de petits moyens mais que l’on espère voir grandir au fil de l’année. Il est à la portée de n’importe qui aujourd’hui, d’organiser des concerts en faisant venir des stars du monde arabe. Ce n’est pas notre but. Aujourd’hui, l’événement aborde une phase plus mature  et on espère vraiment aller vers des projets à long terme, incluant plus de profondeur...


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