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Dans l'Ohio comme en Pennsylvanie, l’Amérique suit le procès de Trump


Samedi 25 Janvier 2020

Dans son restaurant vieux de près d'un siècle à Defiance, dans l'Ohio, Karl Kissner laisse l'une de ses télévisions allumée sur Fox News, qui diffuse le procès en destitution de Donald Trump. Mais la plupart de ses clients observent de loin les événements historiques en cours à Washington.
Partisan du milliardaire républicain, il dit avoir parfois entendu des commentaires "méprisants" de la part de ses clients, qui, en majorité, ne s'intéressent pas aux débats.
"Ou alors ils lèvent la tête, disent +ça y est, ça recommence+ et reprennent leur conversation", explique-t-il à une équipe de l'AFP, qui prend le pouls du pays entre Washington et l'Iowa, où aura lieu le 3 février le premier vote de la primaire démocrate pour la présidentielle de novembre.
A Defiance, comme dans le salon d'un barbier de Pennsylvanie ou dans une cave à vins au bord du lac Erié, le procès Trump est sur les écrans. Et comme à Washington, beaucoup de téléspectateurs se sont déjà fait leur opinion.
Les démocrates applaudissent la détermination des procureurs à convaincre que le président a fait pression sur l'Ukraine afin de compromettre Joe Biden, l'un de ses adversaires potentiels en novembre.
Les républicains accusent de leur côté l'opposition de vouloir écarter le président du pouvoir, faute d'avoir pu le battre à la régulière dans les urnes.
Selon un récent sondage de CNN, 51% des Américains souhaitent la destitution du président, accusé d'abus de pouvoir et d'entrave au travail du Congrès. Mais l'affaire n'est pas vraiment la priorité du moment dans les Etats-clés qui pourraient faire basculer la présidentielle.
C'est le cas de la Pennsylvanie, Etat de la ceinture industrielle ("Rust Belt") longtemps démocrate, qui a voté Donald Trump en 2016.
"Le procès me passe au-dessus de la tête, il y a tellement d'étapes différentes", explique Alvin Ross, gérant d'un magasin de pièces automobiles rencontré dans un restaurant de Charleroi.
Afro-américain, il reproche à Donald Trump d'avoir amplifié les tensions raciales par ses déclarations et d'être inapte à la fonction présidentielle.
"Il dit qu'il en sait plus que les généraux. Si je cherche un emploi chez McDonald's, on va me demander si j'ai de l'expérience. Lui, il peut diriger les Etats-Unis sans expérience", regrette-t-il.
Assis à une autre table, Tim Bailey soupçonne des "forces de l'ombre" d'être derrière le procès du président, une rhétorique qui rappelle les théories complotistes.
Cet ancien ouvrier métallurgiste de 72 ans dit avoir quitté le parti démocrate après la victoire de Barack Obama en 2008, à cause du soutien du parti au "socialisme" et à l'immigration.
Il affirme regarder en priorité Fox News, la chaîne d'info en continu préférée des conservateurs, dénonçant la partialité des autres réseaux.
Il reproche à la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, d'avoir joué la montre avant de remettre l'acte d'accusation contre M. Trump au Sénat, qui le juge depuis mardi.
"Elle veut garder les candidats (à la primaire démocrate) loin de l'Iowa pour que Joe Biden l'emporte", dit le septuagénaire en référence aux quatre sénateurs bloqués à Washington pour les audiences.
"Si quelqu'un doit être destitué, c'est Nancy Pelosi et Chuck Schumer", le chef de la minorité démocrate au Sénat, lance-t-il.
Terry McGill, 67 ans, chauffeur Uber à Pittsburgh, assure que le procès en destitution a renforcé son opinion en faveur de Donald Trump. "Les démocrates ont commencé la bagarre, ils ont divisé encore plus le pays", affirme-t-il.
Pour Tracy Ball, 51 ans, toute cette affaire fait du mal à l'Amérique et le président doit rendre des comptes.
Mais elle ignore si les démocrates récolteront des fruits de ce procès, le premier contre un président effectuant son premier mandat.
"Cela pourrait en réalité galvaniser sa base électorale et la pousser à voter", alors qu'il est donné perdant, explique cette salariée d'une société publicitaire. "Il joue très bien les victimes", dit-elle en riant, souhaitant avoir "un peu plus confiance dans le système actuel".
Karl Kissner, le restaurateur de Defiance, dans l'Etat voisin de l'Ohio, déplore la polarisation extrême de la société américaine.
"La beauté de ce pays, c'est que je peux hurler à en perdre haleine, et que vous puissiez me répondre en faisant la même chose", dit-il. "Et ensuite, nous devrions être capables de nous serrer la main et de partir chacun de son côté".

 

Pour l’accusation, Trump doit être destitué

Donald Trump a commis un abus de pouvoir pour son profit politique personnel et doit être destitué car "le bien et la vérité comptent", a assuré jeudi l'accusation, au troisième jour du procès historique du président américain devant le Sénat.
Après avoir exposé les faits mercredi, les procureurs démocrates se sont évertués pendant plus de neuf heures à démonter les arguments avancés dans les médias par les défenseurs du président, qui ne se sont pas encore exprimés à la barre.
Vendredi, l'accusation devait aborder l'autre chef d'accusation retenu contre M. Trump, l'entrave au travail du Congrès.
Compte tenu de la majorité républicaine au Sénat (53 sièges sur 100), les démocrates n'ont pratiquement aucune chance de gagner le procès. Mais ils espèrent marquer les esprits des électeurs à dix mois de la présidentielle.
"Vous ne pouvez pas faire confiance à ce président pour qu'il fasse ce qui est bon pour ce pays, mais vous pouvez lui faire confiance pour qu'il fasse ce qui est bon pour Donald Trump", a lancé aux sénateurs l'élu Adam Schiff, qui mène l'équipe des procureurs.
"Si vous le jugez coupable, il doit être destitué car le bien et la vérité comptent, sinon nous sommes perdus", a-t-il ajouté, visiblement ému, en fin d'audience.
Sous couvert de lutte contre la corruption en Ukraine, le président a commis un "abus de pouvoir" en demandant l'été dernier à Kiev d'annoncer une enquête sur Joe Biden, son adversaire potentiel à l'élection du 3 novembre, avait auparavant plaidé Jerry Nadler, l'un des sept membres de l'accusation.
Pour parvenir à ses fins, le milliardaire "est allé plus loin" en gelant une aide militaire cruciale pour ce pays en conflit avec la Russie, selon l'élu de New York.
Pour M. Nadler, un ennemi de longue date du milliardaire, "la destitution est la réponse ultime de la Constitution à un président qui se prend pour un roi".


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