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Censure à la carte sur les réseaux sociaux

Des posts en soutien à la Palestine supprimés


Libé
Jeudi 20 Mai 2021

Censure à la carte sur les réseaux sociaux
Les réseaux sociaux constitueraient le dernier bastion de la liberté d’expression pour le peuple palestinien, sauf que les responsables de ces mêmes réseaux sociaux n’en ont cure. Alors qu’ils doivent être de nature à laisser des traces contradictoires sans distinction aucune, des fois des cicatrices, et d’autres du baume au cœur, les plateformes des réseaux sociaux s’en éloignent doucement mais sûrement. Des postes supprimés, des livres interdits ou encore des comptes suspendus, si l’on en croit plusieurs ONG, il fait sale temps pour les partisans de la cause palestinienne.

De plus en plus d'utilisateurs ont la mauvaise surprise de voir leurs publications sur la Palestine censurées, journalistes compris. Un apartheid numérique qui ne dit pas son nom. Comme en témoigne le lundi 10 mai, lorsque les forces israéliennes ont envahi la mosquée Al-Aqsa. Au même moment, plusieurs internautes ont indiqué que le hashtag #AlAqsa était restreint sur Instagram. Les dirigeants de la firme américaine se sont excusés auprès de la communauté en indiquant que la suppression était liée à un « bug technique». Idem pour Facebook et Twitter qui ont avancé des erreurs liées à leurs algorithmes. Des mea-culpa difficilement recevables. Et pour cause, les algorithmes en question sont tellement performants qu’ils peuvent non seulement analyser la personnalité et les habitudes de chaque utilisateur, mais aussi influencer ses choix, comme cela a été révélé dans le documentaire disponible sur Netflix “Derrière vos écrans de fumée”. Autant dire que l’argument du bug est, sans doute, vide de sens, d’autant que les chiffres sont édifiants. En moyenne, d’après plusieurs ONG, 80% des posts sur le sort des Palestiniens seraient supprimés par les entreprises des réseaux sociaux, notamment à la demande des autorités israéliennes. Pis, en 2016, Google, Facebook et YouTube auraient censuré 95% des contenus que le gouvernement israélien qualifiait de violent et voulait voir disparaître. Sauf qu’en parallèle, un post raciste ou insultant envers les Palestiniens ou les Arabes serait publié environ toutes les 46 secondes côté israélien. Pour preuve, le compte Twitter officiel de l'Etat d'Israël qui a posté 1.628 émojis fusée dans plusieurs messages, alors que les nouveaux conflits armés dans la bande de Gaza sont les plus meurtriers depuis 2014. Deux poids, deux mesures. Les firmes américaines ont clairement choisi leur camp. Rien de bien surprenant.

Depuis 1967, Washington a mis son veto près de 50 fois au Conseil de sécurité pour protéger son allié israélien. La semaine dernière, le Conseil de sécurité s’était réuni à huis clos. “A chaque fois, selon des sources diplomatiques, Washington s’est opposé à l’adoption d’une déclaration appelant à un arrêt des affrontements, condamnant le conseil à un silence embarrassant, tout communiqué nécessitant l’accord des 15 membres”, d’après le quotidien français “Libération”. Pourtant, la récente escalade des violences est plus que préoccupante.

Tout a commencé à Sheikh Jarrah, quartier à majorité palestinienne de Jérusalem-Est, au nord de la vieille ville. Ses habitants ont protesté contre une vague d’expulsions ordonnée par la justice israélienne, laquelle devait chasser une quarantaine de Palestiniens, dont une dizaine d’enfants, de leurs maisons. Les images des scènes de violence contre les manifestants palestiniens et les militants des droits de l’Homme de plusieurs nationalités ont fait le tour du monde et créé une énorme onde de choc. Mais la censure des réseaux sociaux sur le sujet s’est accentuée de manière exponentielle ces derniers jours. « Il ne s’agit pas d’un incident ponctuel, c’est la poursuite d’une censure et d’une discrimination systématiques plus larges visant principalement les personnes marginalisées et opprimées, souvent à la demande de régimes oppressifs », a déclaré, à Al Jazeera, Marwa Fatafta, membre politique du groupe de réflexion al-Shabaka. L’écrivaine palestinienne a appelé Facebook à «arrêter immédiatement ce carnage de contenu» tout en expliquant à ses utilisateurs et au public les raisons derrière cette atteinte à la liberté d’expression. «Les entreprises des réseaux sociaux font taire les voix palestiniennes alors que celles-ci luttent pour leur survie», a-t-elle regretté. L’invétérée activiste des droits de l’Homme n’est pas la seule à être sensible à ce traitement si injuste.

“7amleh”, le Centre arabe pour l’avancement des réseaux sociaux et Jewish Voice For Peace ont lancé un appel à témoignage conjoint pour recueillir justement les témoignages d’utilisateurs dont les publications sur les évènements de Sheikh Jarrah ont été censurées. «En douze heures, des centaines de mails nous sont parvenus», a indiqué Dani Noble, l’un des responsables de l’ONG Jewish Voice For Peace. Puis de préciser : “Nous avons des exemples de personnes accusées d'enfreindre les directives de la communauté alors qu’elles partageaient des vidéos de la police israélienne attaquant des manifestants palestiniens à Sheikh Jarrah». Sans oublier «d’autres exemples de contenus d’utilisateurs qui disparaissent littéralement de leurs stories ou de leurs flux. Et, enfin, des organisations et des individus ont été avertis que leurs comptes seraient définitivement désactivés s’ils continuaient à publier des articles sur les violences commises par la police israélienne et par les colons israéliens contre les Palestiniens à Jérusalem», conclut Dani Noble, interdit d’entrée en Israël depuis 2018, à l’instar de l’ensemble des membres de l’ONG Jewish Voice For Peace. Il n’y a pas meilleure, ou pire, démonstration.

Chady Chaabi


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