Atik Essaid : La mise en œuvre du Registre social est un projet stratégique


Vendredi 19 Juin 2020

Le politologue et chercheur en droit constitutionnel 
à l'Université Hassan II 
de Casablanca, Atik Essaid, revient dans un entretien 
à la MAP sur les finalités 
et le contexte de mise 
en place du projet de loi 
sur le dispositif de ciblage des bénéficiaires 
des programmes d’appui 
social, portant création 
de l’Agence nationale 
des registres, adopté 
mardi par la Chambre 
des conseillers.


Que pouvez-vous nous dire sur le contexte général du projet de loi compte tenu des mutations internationales liées à la propagation du coronavirus ? 
Le projet de loi n° 72.18, relatif au dispositif de ciblage des bénéficiaires des programmes d’appui social, portant création de l’Agence nationale des registres, vient parachever la mise en œuvre d'une série de réformes initiées dans le domaine social que connaît le Royaume, sous l'impulsion de S.M le Roi Mohammed VI, pour la promotion des principes de la justice sociale et d’un nouveau pacte de cohésion sociale, au profit des catégories sociales vulnérables.
Ce projet intervient dans un contexte mondial marqué par la révolution numérique et le rôle de plus en plus important de la numérisation de l’administration dans la collecte et la modernisation des données sociales.
A cet égard, la numérisation de l'administration publique permet d’accélérer la cadence de la gestion administrative dans ce domaine, à travers la facilitation et l’amélioration de la réforme de l’administration dans l’espace social, tout en adoptant des critères objectifs et précis avec un recours plus prononcé à la technologie moderne.
En fait, la crise sanitaire du Covid-19 a permis de mettre en place moult initiatives solidaires, le but étant de fortifier le tissu sociétal et de limiter les répercussions de la pandémie tant au niveau économique que social. D'autant plus que la crise nous a incité à établir des priorités pour sortir indemnes de cette situation difficile, de même qu’elle a mis en évidence la nécessité d'instaurer un registre social unifié.
Le projet de Registre social unifié devrait donc être le mécanisme le plus efficace et le plus performant pour faciliter les opérations et procédures d'aide sociale.

Dans quelle mesure l'instauration d’un Registre social unifié s'avère importante et quelles nouveautés apporte le projet de loi 72.18 et ses perspectives d’avenir ? 
Le chantier du Registre social visant à faciliter et à accompagner les opérations d’inscription des familles et des personnes désireuses de bénéficier des programmes d’appui social est un projet social stratégique aux dimensions multiples, fondé sur l'ambition de réduire les disparités sociales et spatiales, puisqu’il concerne des franges entières de la société marocaine.
A cet effet et comme stipulé dans ses articles 1 et 2, le projet de loi tend à établir un système national d'inscription des familles et des personnes souhaitant bénéficier des programmes d’appui social, supervisés par les administrations publiques et les collectivités territoriales par le biais d'un registre social unifié, d'un registre national de la population et d'une Agence nationale des registres chargée de gérer ce dispositif.
Le Registre permet de traiter les données socioéconomiques relatives aux familles par voie électronique, à travers un travail régulier de collecte, d'inscription et de mise à jour, mais aussi une notation périodique des familles conformément aux données liées à leur situation sociale, selon une méthode de calcul bien définie avec la possibilité pour les ménages de revoir cette notation via l’agence nationale des registres, comme stipulé par l’article 16 du projet de loi.
Le texte se traduira par la mise en place d'une banque de données sociales qui se positionnera comme cadre unifié pour le suivi de l'opération d'aide sociale sur la base de critères clairs préétablis.

Quelles sont les considérations qui ont présidé à l'élaboration du projet de loi 72.18 et les modalités de sa mise en œuvre sur le terrain ? 
 Le Maroc a besoin de mettre en œuvre les principes de gouvernance administrative dans les programmes de protection sociale, afin de remédier aux dysfonctionnements de façon efficace, condition sine qua non pour consolider les bases de la justice sociale et spatiale et améliorer les conditions de la paix sociale considérée comme un levier pour stimuler le processus de développement.
Ce projet social, dans toutes ses dimensions et compte tenu de son importance pour le développement durable, incarne la volonté de passer de la gestion classique à l'investissement dans la technologie, de définir des mécanismes pour une meilleure organisation des programmes d'appui social. Il s'agit aussi d’unifier les programmes de protection sociale dans un cadre unique et intégré compte tenu du fait que plus de 120 programmes sociaux dotés de budgets conséquents ont été lancés durant les dernières années, mais dont l'effet escompté tarde à se concrétiser.
Le passage d’un texte juridique à une mise en œuvre optimale des dispositions du projet de loi n°72.18 nécessite l'adoption d'une approche participative avec un accent particulier sur la valorisation et la capitalisation des acquis en bénéficiant d'expériences internationales réussies dans ce domaine.
Le Maroc est au-devant d'un nouveau tournant dans le domaine de la numérisation des données sociales, visant à créer la plus grande base de données biométriques, un projet qui contribuera à réduire la fragmentation des données sociales de manière à garantir la fiabilité, la qualité et l'exactitude du ciblage et du soutien social direct.

  


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