Adhésion du Maroc au Partenariat pour un gouvernement ouvert (OGP) : Les défis de la mise en œuvre


Par Elhazziti Mohammed Anouar
Mardi 11 Juin 2019

Lors de sa première journée d’investiture au pouvoir en 2009, le président Barack Obama a signé un mémorandum exécutif dans lequel il s’engageait à créer “un niveau d’ouverture sans précédent au sein de la gestion gouvernementale et un système de transparence, de participation publique et de collaboration, visant à renforcer la démocratie, à garantir la confiance du public et à promouvoir l’efficacité et l’efficience au sein du gouvernement. La finalité derrière cette initiative pour un gouvernement ouvert était triple : la transparence promeut la responsabilité et garantit l’accès des citoyens aux informations publiques, la participation améliore l’efficacité des institutions publiques et la qualité de la prise de décision, et la collaboration engage les citoyens dans le système de gouvernance des institutions publiques. Ce mouvement s’est développé après à une échelle internationale, car il existe maintenant un partenariat pour un gouvernement ouvert (OGP) qui s’élargit rapidement. Depuis sa création en 2011, l’OGP compte désormais 79 membres nationaux et 20 membres locaux qui travaillent en partenariat institutionnalisé avec des milliers d’organisations de la société civile. Tous les deux ans, chaque membre soumet un plan d’action élaboré conjointement avec la société civile et décrivant des engagements concrets visant à accroître la transparence, la responsabilité et la participation du public à la gouvernance publique.
La gouvernance collaborative est la philosophie principale de l’OGP. A cet effet, ce type de gouvernance nécessite de nouvelles procédures et structures dans l’architecture institutionnelle de l’État et de l’administration publique. Il reflète ainsi les revendications des citoyens pour plus de transparence et de participation aux décisions publiques. L’Etat transparent et l’Etat participatif sont interdépendants. L’Etat doit fournir des informations et créer des réseaux efficaces et des processus collaboratifs ou participatifs afin de permettre aux citoyens de s’engager de manière significative dans la coproduction de décisions et de biens publics. Ceci, à son tour, peut contribuer à améliorer la confiance et la légitimité perçue du gouvernement.
Dans le contexte marocain, la Constitution de 2011, a renforcé le principe de la participation citoyenne en énonçant dès le préambule que « le Royaume du Maroc poursuit résolument le processus de consolidation et de renforcement des institutions d’un État moderne, ayant pour fondements les principes de participation, de pluralisme et de bonne gouvernance… ». D´autres articles de la Constitution vont dans le même sens de l’instauration de la démocratie participative (articles 1, 12, 13, 14, 15, et 139). Ce principe constitutionnel a été renforcé par la promulgation des lois organiques relatives aux collectivités territoriales dans le cadre du processus de la Régionalisation avancée. Ces textes prévoient la participation des citoyens et des organisations de la société civile dans la vie publique. Aussi, la démocratie participative a été la finalité principale de la promulgation de la loi organique N° 64.14 relative à la présentation de motions en matière de législation, ainsi que loi organique N°44.14 relative au droit de présenter des pétitions aux pouvoirs publics. Enfin, sous la direction du ministère de la Réforme de l’Administration et de la Fonction publique, l’architecture juridique liée à la démocratie participative a été consolidée par la promulgation et la mise en pratique de la loi relative au droit d’accès à l’information, ce qui a permis au pays d’adhérer au club des membres du partenariat pour un gouvernement ouvert en 2018 et de mettre en œuvre son premier plan d’action national 2018-2020 en partenariat avec la société civile.
Le défi pour le Maroc est que le principe de la démocratie participative se traduit par un mode de gouvernance public participatif et collaboratif impliquant le grand public, ainsi que les institutions publiques nationales, territoriales, les organisations non gouvernementales, les entreprises et d’autres acteurs non gouvernementaux, dans le processus politique et de la prise de décision par le biais de méthodes y compris, sans toutefois s’y limiter, la participation du public, l’engagement civique, le dialogue, la délibération publique, la consultation publique, la collaboration multipartite, la gestion publique collaborative, le règlement des différends et la négociation . L’utilisation de ces processus par les organismes publics devra être adaptables dans tout le processus des politiques publiques (de l’identification à l’élaboration, la mise en œuvre et enfin l’évaluation). Ces processus comprennent des actions législatives et quasi législatives en amont visant à définir les politiques et leur mise en œuvre en aval.
Au sein de l’exécutif, l’approche du gouvernement ouvert devra se concentrer en amont du processus politique sur les activités quasi législatives, de mise en œuvre et les interactions en ligne dans le cadre du développement du gouvernement numérique. Cependant, lors de la mise en œuvre de l’arsenal juridique de la démocratie participative, il s’est avéré que peu de stratégies, de plans ou de politiques incluent une gestion collaborative du public ou des réseaux, tels que des réseaux d’acteurs publics, privés et civils travaillant ensemble pour accomplir une tâche qu’aucun acteur ne pourrait accomplir, et c’est la même chose lors de la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques par la négociation et le règlement des différends.
En conclusion, le Royaume du Maroc a montré sa volonté politique, sous les Orientations de sa Majesté le Roi Mohammed VI qui ne cesse d’appeler et d’inciter les pouvoirs publics à s’ouvrir davantage sur les citoyens pour les intégrer dans les processus des politiques et décisions publiques. Néanmoins, cet objectif est fortement lié d’une part à la réussite des chantiers de la réforme de l’administration et de la déconcentration, et d’autre part à l’engagement des différents acteurs partenaires de l’Etat, secteur privé, société civile, partis politiques, syndicats et tout autre organisation d’intermédiation. Cela nécessitera un changement des cultures politiques et administratives car la réforme réussira sans doute dans un environnement de réformateurs.


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