Abdellah Ouzitane, président fondateur du Centre des études et de recherches sur le droit hébraïque

Le Maroc donne sens à la proximité religieuse en terre d’Islam


​Le Maroc ne cesse de donner des signaux et des enseignements en termes de possibilités de cohabitation harmonieuse entre cultures et religions. Terre de métissage culturel et de coexistence entre les cultes, le Royaume du Maroc, réconcilié avec toutes les composantes de son identité plurielle, continue à faire rayonner les valeurs de tolérance et de partage en multipliant les initiatives officielles et civiles en faveur d’un dialogue entre les civilisations porteuses de paix et de coexistence pérenne. Des initiatives qui réconfortent largement le travail mené depuis Mogador et Bayt Dakira précisément, pour la redécouverte et la reconnaissance consciente et juste de la mémoire juive marocaine. Abdellah Ouzitane, président fondateur du Centre des études et de recherches sur le droit hébraïque au Maroc, professeur à l’Université de Bordeaux et chercheur en géopolitique du monde arabe et du monde musulman médiéval, met les acquis et les perspectives du projet pédagogique et culturel de «Bayt Dakira» dans le contexte de la récente et prometteuse dynamique diplomatique enclenchée par le Royaume.

Libé
Dimanche 3 Janvier 2021

Abdellah Ouzitane, président fondateur du Centre des études et de recherches sur le droit hébraïque
Libé : Une déclaration tripartite vient d’être signée devant Sa Majesté le Roi Mohammed VI pour l’ouverture d’une ère nouvelle dans les relations entre le Maroc et Israël. Comment une telle mutation peut-elle servir la paix dans le monde en général et au ProcheOrient en particulier ?

Abdellah Ouzitane
: Sous le leadership de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, le Royaume s’est positionné en haut lieu de transmission des valeurs universelles et humanistes, de culture, d’art, d’histoire et d’échanges où la centralité de l’humain est célébrée dans une continuité responsable et engagée. La visite de Sa Majesté le Roi Mohammed VI à Bayt Dakira en janvier 2020 scelle la forte impulsion donnée à la préservation et à l’illumination de l’histoire judéo-marocaine. "Bayt Dakira" s’inscrit pleinement dans la dynamique insufflée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI et l’intérêt particulier que le Souverain ne cesse d’accorder au dialogue des cultures et des religions en Méditerranée et ailleurs dans le monde. Ceci explique la réussite de cette proximité extraordinaire entre le judaïsme et l’islam en terre d’Islam.

C’est dans cette perspective d’ouverture que le Maroc a accueilli récemment à Rabat les délégations américaine et israélienne afin d’explorer ensemble les possibilités de coopération en cohérence avec la vocation et les objectifs que se sont fixés les parties concernées. La déclaration tripartite signée devant Sa Majesté le Roi, donnera, nous en sommes convaincus, une impulsion remarquable à la paix au Proche-Orient tout en mettant en lumière la place centrale qu’occupe le Royaume dans la promotion des valeurs de tolérance et d’ouverture, auxquelles notre Souverain est intimement lié.

Cette reprise des relations diplomatiques avec l’Etat hébreu coïncide avec la multiplication des initiatives au niveau national en faveur de la revivification de l’histoire du judaïsme au Maroc, dont la signature d’une convention entre le Centre, le ministère de l’Education nationale et l’Association Essaouira-Mogador pour la promotion des valeurs de tolérance et de coexistence dans la diversité au sein des établissements scolaires et universitaires. Comment l’école marocaine peut-elle servir à l’enracinement d’une culture du vivre-ensemble au sein de notre jeunesse ?

Essaouira a toujours réservé une place privilégiée à l’éducation, à la culture et à l’identité marocaine dans toute sa diversité et pluralité. Cette convention vient nourrir davantage les priorités nationales, tout en s’inscrivant pleinement dans la dynamique insufflée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI et l’intérêt particulier que le Souverain ne cesse d’accorder au dialogue des cultures et des religions. La mise en lumière de la place centrale qu'occupe le Maroc dans la promotion des valeurs de tolérance et d'esprit d'ouverture, s'avère nécessaire en ces temps-ci. Le Royaume sera toujours l'espace de la liberté, de l'idéal et de la vertu où la passion de la connaissance et le goût de la liberté sont ancrés dans les mémoires et dans les cœurs, tout en continuant à résister par la culture et par la portée objective de la transmission de ces valeurs et de cette identité plurielle.

«Bayt Dakira» constitue actuellement une référence en matière de réconciliation avec le passé, de reconnaissance de toutes les composantes de notre identité plurielle, et surtout d’engagement commun de Marocains de confessions musulmane et juive en faveur de la revivification de la mémoire judaïque du Royaume. Comment évaluez-vous la portée de ce projet à la fois culturel et pédagogique ?

Nous sommes à la fois conscients et convaincus que l’universalisme n’est pas un privilège, mais une nécessité dont nous devons nous saisir… En menant la réflexion autour de l’évolution du système juridique hébraïque, nous rendons hommage à l’expérience humaine, à notre histoire, à notre identité, et au temps qui se définit non seulement par un humanisme séculier, mais par un humanisme spirituel s’opposant au déni et à toute tentative de fracture. Le temps a aisément conféré à la tradition hébraïque dans le système juridique marocain une suite continue et une véritable identité s'inscrivant dans une utilité réciproque et collective. En moins d’un an après la visite de Sa Majesté le Roi Mohammed VI à "Bayt Dakira", trois événements majeurs ont eu lieu dans cet espace emblématique, notamment deux rencontres scientifiques réunissant plusieurs chercheurs et experts nationaux et internationaux, organisées en février et en novembre à l’initiative du Centre d’études et de recherches sur le droit hébraïque au Maroc, ainsi que la signature d’une convention de partenariat et de coopération pour la promotion des valeurs de tolérance, de diversité et de coexistence dans les établissements scolaires et universitaires.

En cette conjoncture universelle pénible ponctuée par la crise sanitaire de Covid-19, «Bayt Dakira» a envoyé des messages de résistance et d’espoir en boostant davantage les recherches sur le droit hébraïque au Maroc. Qu’en pensez-vous ?

La dernière rencontre initiée en novembre dernier, qui se veut un signal fort de symboles en ces temps incertains, s'inscrit dans une continuité engagée s'exprimant à travers la réflexion et l'échange où chacune et chacun apportent une vision du monde. Essaouira a contribué efficacement au cours de ces dernières années à la valorisation de plusieurs projets universitaires tant sur le plan de la recherche que celui de la formation, estimant que ces dynamiques de coopération scientifique et académique viennent nourrir davantage les priorités nationales en matière d'internationalisation, tout en élargissant les champs d'investigation scientifique à d'autres disciplines.

Propos recueillis par Abdelali Khallad


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