Rôles des acteurs institutionnels et économiques dans le développement des régions

Regards rhônalpins de la décentralisation à la française : la régionalisation vécue de 1989 à 2002


L
Lundi 18 Janvier 2010

Je voudrais vous faire part de quelques éléments de vécu, au cours de ces 12 années, de faits manquants qui témoigneront, me semble-t-il, de la consolidation du fait régional dans la décentralisation en France.

La région dans les textes

La région existe depuis longtemps, avant même que la décentralisation ne soit en place :
- dans les années 60, les « régions programmes » ont été l’outil d’aménagement du territoire dans le cadre de la DATAR,
- dans les années 70, l’EPR (Etablissement Public Régional) constituait la première assemblée régionale délirante, composée de représentants des élus locaux (députés, sénateurs, maires, conseillers régionaux, etc.) mais sans pouvoir exécutif alors détenu par le préfet,
- dans les années 80, la région est devenue collectivité territoriale de plein droit sur la base d’une élection au suffrage direct.
Depuis 1982, plusieurs lois de décentralisation ont précisé le rôle des collectivités, notamment la loi ATR de 1992 instituant la coopération décentralisée. Au fil des années, la région est devenue un acteur majeur du développement par un renforcement de ses compétences. On peut distinguer les compétences légales inscrites dans les lois successives (cf. tableau sur la répartition des compétences). La région est en charge de la formation, du développement économique et de l’aménagement du territoire incluant notamment la conception du schéma régional d’aménagement et de développement ainsi que des compétences spécifiques comme par exemple les parcs naturels régionaux à la rencontre du développement et de l’environnement
A côté des textes, il y a eu le développement de compétences acquises fondées sur l’intérêt à agir pour le développement régional. C’est ainsi que nous avons mis en place des programmes intégrés de développement agricole (PIDA) à partir de la seule initiative de l’exécutif régional.
Cela a également été le cas de la coopération décentralisée. Les régions ont développé des actions internationales dès 1984, en ce qui concerne Rhône- Alpes. C’est une compétence aujourd’hui reconnue des collectivités territoriales par la loi ATR de 1992. Ceci se traduit dans la diversité des lignes budgétaires régionales et des politiques qui s’y rattachent.
Politiques régionales en millions d’euros (prévisions pour 2002) :
Actions internationales :         6.00
Solidarités :                 9.40
Sport :                    10.40
Environnement :             22.70
Tourisme :                26.40
Politique de la ville :            27.40
Recherche :                31.90
Culture :                32.40
Agriculture, forêts et aménagement rural :    33.70
Politiques territoriales :        40.50
Enseignement supérieur :        61.10
Economie et technologie :        61.40
Formation continue :            140.70
Transport et communication :        402.50
Enseignement secondaire et apprentissage     433.00                            
La région dans la pratique
Je me baserai sur quelques exemples montrant que le niveau régional devient plus en plus important.Rhône-Alpes existe au départ par sa géographie. La région est visible en Europe de par sa taille 10 % du territoire France équivalent de la Suisse ou de la Hollande, comparable aux grandes régions européennes. Rhône-Alpes est également reconnue en Europe du fait de ses relations au sein des « 4 moteurs pour l’Europe » c’est un espace de coopération réunissant la catalogne, le Bade Wurtemberg, la Lombardie et Rhône-Alpes.Un débat existe aujourd’hui entre, petites et grandes régions pour un espace de proximité ou positionnement adapté au niveau européen.
Le premier fait régional que l’on peut évoquer est celui de l’impact budgétaire. Le budget régional est en augmentation constante depuis sa création. Cela est le fait de compétences lourdes lié à des transferts de compétences de l’Etat vers les régions tels que dans le domaine de la formation continue, les transports et les lycées, ces transferts n’ont pas été suivis des transferts de ressources équivalentes induisant une pression fiscale.
Budget 2001 des régions (en milliards de Francs) :
Ile de France :            15.7
Rhône-Alpes :            8.9
Nord Ps de Calais :            7.2
Provence Alpes Cote d’Azur    5.6
Pays de la Loire :            4.5
Centre :                3.6
Aquitaine :                3.5
Midi Pyrénées :            3.0
(Un budget global en hausse de 2 MdF depuis 1999).
Il faut constater qu’il s’agit surtout de transferts de charge sans transferts de l’ensemble des compétences ; la région a la charge des lycées mais non des enseignements, la région a compétence pour les transports ferroviaires régionaux mais en convention avec la SNCF qui conserve la programmation des flux…

Dépenses 2002 (engagements politiques régionales) :
- Développement personnel :     51,3 %
- Aménagement et développement solidaire du territoire :                 35,1 %
- Développement économique :    13,6 %

Recettes 2002 : 1,330 milliards d’euros (8,787 MdF) :
- Dotation d’Etat :             48,9 %
- Fiscalité directe :             23,7 %
- Fiscalité indirecte :             11,1 %
- Divers emprunts :             16,3 %

L’importance du budget régional donne aujourd’hui aux régions une capacité d’initiative forte qui a permis à Rhône-Alpes, par exemple, d’innover dans le domaine de la mobilité internationale, de l’agriculture et du développement rural, de la création d’emploi etc.… cette capacité financière est moins importante aujourd’hui au niveau des départements qui ont la charge de la politique sociale dont on connaît l’impact financier (RMI…)
Le second fait régional est l’évolution politique de la région. En 1972 c’était une assemblée de représentants désignés ; en 1986 l’élection à la proportionnelle s’est faite sur des listes départementales réunissant essentiellement des élus locaux. En 2000 les enjeux politiques nationaux ont agi sur l’élection régionale. L’assemblée est vraiment devenue une assemblée politique et non plus une assemblée administratrice d’un territoire. Dans le même temps, l’institution a développe un fonctionnement partagé entre l’exécutif qui a l’initiative des propositions, les assemblées régionales dans leur stricte fonction délibérative et les services la préparation des politiques régionales. Il s’en suit une structure spécifique de l’administration régionale qui se caractérise par une proportion plus forte de chargé de mission et de cadres (par rapport à une structure pyramidale classique).
Nous sommes aujourd’hui à une étape de renforcement de la décentralisation annoncée par le nouveau gouvernement notamment au niveau régional. La région n’est pas seulement attendue pour sa capacité contributive mais également comme lieu d’orientation de stratégie, lieu de concentration, lieu d’arbitrage…mais sans tutelle des collectivités les unes par rapport aux autres ce qui est principe de la décentralisation française.
Pour jouer ce rôle, on note depuis quelques années un renforcement du lien au territoire…pour « convaincre plus que décider » !
Le troisième et dernier fait régional est l’évolution des relations avec les territoires notamment par le développement de politiques contractuelles.
Si l’on distingue 3 niveaux schématiques : Etat- région - Collectivités locales, deux types de relations ont été établis :
- avec l’Etat, la complémentarité des politiques nationales et régionales est formalisée, à intervalle de 6 ans, dans le contrat de plan Etat/région. A la lumière des contractualisations successives (6ème CPER) ont peu dire que la pertinence du contrat de plan est lié au renforcement de la capacité de négociation du préfet. Un préfet fort pour une région forte !
- avec les collectivités locales, la région a proposé, a formalisé, a suscité des dispositifs de concentrations sans que cela soit formalisé dans les textes :

_ Conférence annuelle de concertation avec les départements et les grandes villes, support d’une harmonisation des projets,
_ Réseau des villes avec les 8pôles urbains régionaux à la recherche d’une spécialisation cohérente des pôles urbains,
_ Contrats globaux de développement avec les pays et conférences économiques en support aux dynamiques de développement local.
En conclusion, la région c’est d’abord un territoire, mais surtout des hommes et enfin des relations. La régionalisation et le développement se construisent par les relations des Hommes et des territoires.
 PAR MARC NOAILLY
Région Rhône-Alpes, Direction de l’Europe, des Relations internationales et de la Coopération, Service Afrique subsaharienne et Méditerranée .


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