Quelles conséquences économiques de la pandémie sur la classe moyenne marocaine ?


Mehdi Alaoui Mhammedi
Dimanche 19 Avril 2020

Quelles conséquences économiques de la pandémie sur la classe moyenne marocaine ?
En ces temps de pandémie de Covid-19, les médias se concentrent avant tout sur les dernières informations sur la situation locale et internationale du virus, et présentent en détail le nombre de décès quotidiens et cumulés, le nombre des personnes contaminées, des personnes hospitalisées et des patients en réanimation. Ensuite, les caméras sont braquées sur des informations qui paraissent très futiles pour bon nombre de téléspectateurs. Certainement vous l’avez aussi remarqué, mais on a tous beaucoup appris sur le krach boursier et les conséquences considérables de la pandémie sur les marchés financiers, la guerre des prix du pétrole entre l’Arabie saoudite et la Russie, et l’intervention des Etats-Unis pour stabiliser les prix sur le marché mondial, et pousser les deux pays vers un accord qui porte sur la baisse de la production quotidienne. 
Cependant, très peu d’informations intéressant particulièrement la classe moyenne et populaire circulent dans les médias, et beaucoup de questions restent sans réponses : y aura-t-il une augmentation des prix des denrées alimentaires durant et après la crise sanitaire ? Le secteur public continuera-t-il à recruter ? Les impôts augmenteront-ils ? Qu’en est-il du secteur privé ? Ci-dessous un état des lieux qui vous permettra de vous projeter dans le futur et de répondre par vous-même aux questions qui vous intéressent. 

Tourisme, transferts des MRE, industrie automobile : trois principales sources de devises à l’arrêt !
Comme la plupart des autres pays, l’Etat marocain a décrété le confinement pour limiter au maximum les déplacements de la population. Dès lors, les restaurants, hôtels, cafés sont fermés et resteront fermés jusqu’à la fin de la pandémie. Les avions sont cloués au sol du fait de la fermeture des frontières, les trains, les autocars et les autres moyens de transport entre les villes sont aussi suspendus. Plusieurs rapports publics témoignent de cette situation sans précédent que traverse le secteur touristique, dont notamment celui de la Confédération nationale du tourisme (CNT) qui précise que le manque à gagner pourrait s’élever à plus de 48,1 milliards de dirhams (4,3 milliards d’euros). 
Le confinement, la fermeture des frontières et la crise que traverse la zone euro susciteront une forte chute des transferts des Marocains résidant à l’étranger et des investissements directs étrangers (IDE). Une note publiée par la CDG capital prévoit une forte dégradation et l’estime à une baisse de 30%. 
Quant au secteur de l’automobile, les statistiques de l’AIVAM confirment que les ventes des véhicules particuliers au Maroc ont connu une chute de 61,9 %. Egalement, la suspension de l’activité du site de production du constructeur automobile français causera une baisse des exportations, une chute des rentrées de devises et mettra des milliers de salariés au chômage technique. 
Les entreprises marocaines ne font pas exception, une grande partie des petites et moyennes entreprises et très petites entreprises sont à l’arrêt. Selon une annonce du ministre de l’Emploi et de l’Insertion professionnelle, plus de 700.000 salariés du secteur privé ont été inscrits pour bénéficier d’une indemnité forfaitaire mensuelle auprès de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS). Le ministre a indiqué qu’un total de 113.000 entreprises ont déclaré un arrêt temporaire de travail depuis le 15 mars dernier sous l’effet de la crise liée à la pandémie. 
L’augmentation du taux de chômage et la chute des exportations susciteront par voie de conséquence une baisse des rentrées de devises. Tous ces éléments réunis font que la croissance nationale évoluera en dessous de 1% contre 2,2% estimée par la HCP (selon une note de la CDG capital, 2020). 
Moins de rentrées en devises, moins de recettes fiscales, … Donc plus de prêts pour honorer les obligations et les engagements sociaux de l’Etat !
En ces temps difficiles, le gouvernement a décidé d’augmenter les dépenses allouées au secteur de la santé, ce qui est logique ! Il a décidé également de soutenir les familles les plus démunies, les salariés et les secteurs économiques les plus touchés par les effets de la crise sanitaire. Alors, pour honorer ses engagements et faire face à la chute libre des rentrées de devises et des recettes fiscales, l’Etat a tiré 275 millions de dollars du prêt de la Banque mondiale, et très certainement d’autres demandes de prêts se feront dans les prochains mois si la situation persiste. 
Ce recours massif à la dette causera de l’inflation (+ 1,3% selon une note de la CDG capital), inévitablement une augmentation des taux d’impôt et éventuellement la création de nouveaux impôts à court et à moyen termes.   

Mais qu’en est-il de la reprise économique ? 
Deux grands points de vue s’affrontent, une vision, plus optimiste, qui estime qu’il y aura un déplacement de la demande. Donc, les confinés consommeront plus après le déconfinement pour faire tourner la roue à grande vitesse. D’autres, plus réalistes, estiment que nous allons entrer en récession, et précisent que les confinés en chômage partiel qui voient leurs salaires baisser, puiseront dans leurs épargnes pour compenser leurs charges financières stables. Dans cette perspective, la consommation restera à son bas niveau et la reprise sera lente, longue et difficile.
Vivement le déconfinement - ou plutôt la reprise ! 


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