Quand la Covid et les fake news s'entremêlent pour nous pourrir la vie

Saad Dine El Otmani: Toutes les informations nécessaires et les décisions seront communiquées de manière officielle et publiées par les médias officiels


Chady Chaabi
Lundi 2 Novembre 2020

De nos jours, les gouvernements luttent sur deux fronts : Enrayer la propagation du SarsCov2, mais aussi celle des fausses informations. Dernier exemple en date, un document circulant sur les réseaux sociaux prêtant à l’Exécutif l’intention de rétablir le confinement sur l’ensemble du territoire national. Dûment signé par Saad Eddine El Othmani, le document en question et les informations qu’il véhicule s’avèrent être « faux, infondés et montés de toutes pièces », comme l’a souligné le chef du gouvernement dans un communiqué publié dimanche soir. El Othmani qui s’est étrangement dit surpris par ces « fake news », a assuré par la même occasion que « toutes les informations nécessaires et les décisions seront communiquées de manière officielle et publiées par les médias officiels». Outre le fait que le chef du gouvernement ne précise pas s’il dément la tenue d’un Conseil de gouvernement pour l’adoption d’un reconfinement ou bien le retour du confinement en soi, ce qui renforce le flou, cet épisode rappelle que si les rumeurs et la diffamation ont toujours existé, au même titre que les bobards ne datent pas d’hier, force est de constater que l’avènement des réseaux sociaux en a accéléré la circulation, avec un partage d’informations volontairement facilité et encouragé. Dès lors, on a commencé à parler de « fake news », un terme générique qui regroupe des contenus de natures diverses, manipulés, fabriqués de toutes pièces, tronqués ou volontairement recontextualisés, voire même parodiques. Et depuis le début de la pandémie, un autre terme a fait son apparition, à savoir « l’infodémie ». Un néologisme qui désigne donc une vague d’informations fausses ou trompeuses sur les réseaux sociaux et les moteurs de recherche à propos d’une pandémie. C’est Tedros Adhanom Ghebreyesus, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, qui a prononcé le terme pour la première fois en février dernier, preuve que ce fléau inquiète au plus haut lieu. Du point de vue de l’OMS, « l’infodémie liée à la Covid-19 est tout aussi dangereuse que la maladie elle-même » comme en attestent les fausses mesures de prévention dont les traitements traditionnels africains. Les faux remèdes, comme manger de l’ail ou boire de l’eau tiède avec des rondelles de citron, entravent la lutte contre le virus et servent même son dessein et sa propagation. La question qui s’impose est pourquoi ? Quel est l’intérêt de véhiculer de fausses informations ? Dans le cas du document précité et démenti par Saad Eddine El Othmani, l’intérêt est clairement d’alimenter la panique et la confusion au sein de la population. La ruée sur les hypermarchés est une conséquence concrète. De manière générale, les personnes derrière les fausses nouvelles peuvent le faire également pour une multitude d’autres raisons dont certaines politiques ou tout simplement par méchanceté et malveillance. L’intérêt économique n’est pas à écarter non plus. Sur le web, une nouvelle populaire est synonyme de revenus publicitaires. Concrètement, et ce n’est un secret pour personne, plus il y a de clics vers une page, plus la publicité présente sur ladite la page est vue. Et plus elle est vue, plus il y a de revenus pour les administrateurs de la page. Mais si c’est un secret de polichinelle, pourquoi clique-t-on ? Et surtout pourquoi les internautes participent à la diffusion d’informations dont la source n’est pas vérifiée ? Une étude de Diego F. M. Oliveira, chercheur à l’université d’Indiana et de Northwestern met en cause la capacité d’attention limitée des utilisateurs du web, alors qu’ils font face à une masse toujours plus importante d’informations. Autrement dit « notre attention limitée nous rend moins regardants sur ce que nous partageons, la faible qualité d’un contenu n’ayant pas de conséquence négative sur son partage », explique Diego F. M. Oliveira. De plus, la source d’information principale du public est matérialisée aujourd’hui par les réseaux sociaux en lieu et place des organes traditionnels dont la presse. Or, au risque de se répéter, les réseaux sociaux sont un des vecteurs privilégiés des auteurs d’informations bidonnées. Et pour cause, tous les contenus se ressemblent, aucune distinction graphique des posts n’est possible entre le contenu d’un site parodique et celui d’un site de média classique. En plus, les auteurs de fake news s’appuient sur les algorithmes de ces plateformes en usant de formats qui circulent le mieux dont les images, les vidéos, entre autres. En conséquence, cela crée une confusion qui peut être lourde de conséquences à la fois pour les gouvernements et leurs citoyens. Plusieurs pistes s’offrent aux internautes pour lutter contre les « fakes news ». Il s’agit d’abord de recouper l’information. En clair, vérifier qu’une information est partagée par plusieurs médias, et pas seulement par un média alternatif. Ensuite, et c’est un doux euphémisme, les internautes seraient inspirés de ne pas partager une information non vérifiée. La signaler ne serait pas superflu. Et enfin, les utilisateurs du web ont à leur disposition une multitude d’outils de vérification des informations, proposés par des médias de renom. 



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